Chronique|

INDONÉSIE | Préférer les temples historiques à la plage

À environ une heure de voiture de Yogyakarta, le temple de Borobudur est inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO.

CHRONIQUE / L’Indonésie compte des milliers d’îles. Impossible de les visiter toutes. À l’heure des choix, le dilemme paraît insoluble : des plages, une faune mystérieuse et des temples historiques vieux de plus de mille ans. Les férus d’histoire pencheront pour l’ancienne capitale de Yogyakarta, sur l’île de Java, et les temples de Borobudur et de Prambanan.


Le nom de Borobudur ne vous dit rien? Il s’agit pourtant du plus grand temple bouddhiste du monde. Il rappelle d’autres monuments sud-asiatiques prisés des touristes : Angkor Wat, au Cambodge, et l’ancienne ville de Bagan, en Birmanie, qui compte plusieurs milliers de temples.

On m’avait prévenu qu’il était ambitieux d’inclure Borobudur, à une heure de route au nord-ouest de Yogyakarta, et Prambanan, à 30 minutes à l’est de l’ancienne capitale, dans un itinéraire d’une journée. Mais à vouloir partager un taxi et la journée avec d’autres touristes, pour réduire les coûts, il fallait suivre la parade.

Si certains cherchent à rallier les temples pour les premières lueurs du soleil, nous sommes arrivés à notre première escale, Borobudur, en milieu d’avant-midi. Comme au Cambodge et en Birmanie, la chaleur s’abat en même temps qu’apparaît la lumière sur les sites historiques de Java. Il faut emporter de l’eau. Beaucoup d’eau. Et tout indique qu’un tube de crème solaire ne suffira (presque) pas.

À Borobudur, l’immense temple façonné de 60 000 mètres cubes de pierre aurait été érigé autour de l’année 800 pendant la dynastie Syailendra. Plus récemment, il a été redécouvert en 1814 par un Anglais avant d’être restauré. Il est construit en trois niveaux, soit une base pyramidale, trois plateformes circulaires et un énorme stupa. On dénombre également 72 stupas plus petits autour des plateformes circulaires. Dans chacune d’elles, sauf exception, les statues ont toutes perdu leur tête.

Le temple de Borobudur est couronné d'un énorme stupa.

Le temple est en fait une représentation de l’univers divisé en trois sphères, soit les désirs, les formes et le détachement des formes.

Pour aller l’observer de près, toutefois, il faudra éviter les foules, donc les fins de semaine, et faire partie des 1000 visiteurs à qui on permet chaque jour de monter sur le temple. Le tourisme exerçant une pression immense sur le monument, les autorités ont entrepris de limiter le nombre de personnes admises sur la structure. Un tourniquet a même été installé au pied du monumental escalier sur la façade.

Les chanceux se verront par ailleurs remettre des sandales de paille qu’il faudra enfiler pour ne pas abîmer la pierre. La présence d’un guide en tout temps est aussi nécessaire.

Pour s'aventurer sur le temple de Borobudur, il faut absolument être accompagné d'un guide.

En conséquence, il n’est plus possible de déambuler librement sur chacun des six étages de la construction. On nous laissera explorer seulement les alentours des stupas, au sommet, et la surface gazonnée au pied du temple.

L’UNESCO, qui reconnaît la valeur patrimoniale du site depuis 1991, cite d’ailleurs le tourisme comme une menace connue à sa conservation. Les éruptions du mont Merapi posent aussi une menace.

Outre l’immensité du site, son environnement luxuriant nous frappe autant que la chaleur. Il est toutefois beaucoup moins sauvage que ceux qu’on trouvera au Cambodge ou en Birmanie, là où les temples secondaires disparaissent un peu beaucoup dans une jungle qui reprend ses droits. On s’y sent donc moins Indiana Jones ou Lara Croft.

On compte plus de 500 statues de Bouddha à Borobudur. La tête de plusieurs d'entre elles a disparu.

Les milliers de sculptures en relief, les plus de 2000 frises d’éléphants, de musiciens, de rois et de guerriers, et les quelque 500 statues de Bouddha donnent envie de s’attarder plus longtemps que le temps disponible.

Immanquablement, alors qu’on observera l’immense bâtiment de pierre d’en bas, la population locale nous abordera pour une discussion en anglais. Les écolières sont les plus persuasives, lançant la conversation pour la réalisation d’un travail scolaire. Une poignée de camarades ricaneront aux côtés de la plus courageuse du lot, lui tireront la manche pour qu’elle demande la permission de prendre une photo avec nous.

À se laisser prendre au jeu, on peut mettre (perdre) un temps fou avant de poursuivre l’aventure.

Borobudur, protégé, encadré, restauré, fait écarquiller les yeux pour son immensité. Incontournable? Certainement! Mais, à mon avis, il ne surpasse pas Angkor Wat, qui est beaucoup moins bien préservé.

Prambanan

La journée avance et il faut s’efforcer de repartir vers Prambanan, le plus grand complexe hindou d’Indonésie. Certains diront même qu’il est le plus grand de toute l’Asie du Sud-Est. Tous les bâtiments y ont été construits entre le 8e et le 10e siècles. Là, le coup d’œil est complètement différent. Les bâtiments sont plus petits et on peut grimper les marches menant à l’intérieur de plusieurs d’entre eux.

Il est tout à fait possible de visiter Borobudur et Prambanan (notre photo) en une seule journée.

Techniquement, le site, aussi inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, compte les restes de 244 temples. Voilà pourquoi certains estiment qu’il faut une journée complète pour bien l’explorer. Les quelques heures dont j’ai disposé, bien que courtes, m’ont suffi.

Quand la canicule nous martèle le crâne continuellement, l’envie de nous poser finit par ralentir nos ardeurs de toute façon.

Il reste que l’expérience y est beaucoup plus immersive qu’à Borobudur. Les groupes d’écoliers y sont par contre tout aussi insistants. Et les foules moins denses en fin de journée.

De très intéressants panneaux relatent les dommages encourus par les différents temples en 2006, quand un tremblement de terre de magnitude 5,9 a frappé la région de Yogyakarta. On y répertorie combien de blocs de pierre ont été endommagés ou se sont écroulés dans les secousses, de même que l’épopée pour la conservation du site.

Plusieurs temples du complexe de Prambanan ont subi des dommages à la suite d''un tremblement de terre en 2006.

L’incontournable demeure le temple de Shiva, à 47 mètres de hauteur, orné de motifs de têtes de lions. À l’intérieur, une statue de Shiva comportant quatre bras se tient dans une fleur de lotus.

En réalité, j’ai préféré la liberté d’explorer Prambanan à mon rythme même si le complexe n’en impose pas autant que Borobudur. Pour l’ingéniosité, le second l’emporte toutefois haut la main. Et bien qu’épuisante, la visite des deux endroits en une journée est tout à fait possible. Dans un tel cas, un billet combiné (environ 60 $) permet d’économiser, alors qu’il faudrait autrement prévoir environ 35 $ par temple.

S’ajoute le coût pour embaucher un chauffeur, à moins de vouloir prendre le temps d’expérimenter le transport en commun, généralement plus lent.