La question m’a été posée, récemment. La réponse : j’y pense depuis longtemps, mais le retour ponctué uniquement de côtes ne m’enchantait pas. Et puis, j’ai l’excuse des assignations imprévues et des entrevues à l’extérieur du bureau.
De retour des vacances, fin août, je me suis dit que c’était le temps de me lancer… si je ne voulais pas encore laisser passer une année.
Soyons clairs : je n’ai aucun mérite pour mon trajet d’un peu plus de quatre km quotidien, aller-retour, d’autant que je n’ai pas à me transformer en taxi. Se déplacer à vélo demande quand même un peu plus d’organisation.
Clairement, mon méga sac à main ne rentre pas dans mes sacoches; mes multiples contenants de lunch réutilisables me semblent soudainement plus encombrants, et je dois m’astreindre à un ménage de mes carnets de notes… Rien d’insurmontable, cependant.
N’empêche : le bonheur est le même qu’en allant courir tôt le matin. L’air est frais, la lumière est belle… et je commence ma journée énergisée.
Je risque de vous reparler dans les prochaines semaines de ces envies de laisser la voiture à la maison, mais d’ici là, j’ai eu envie de parler à des gens qui, tranquillement, ont changé leurs habitudes de transport.
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Les fameuses côtes… C’est ce qui a poussé Julie Di Tomasso, Sherbrookoise de 45 ans, à mettre la main sur un vélo électrique afin de se rendre au boulot.
Après trois ans de télétravail, un changement d’emploi et une seule voiture pour la famille, une certitude s’imposait : pas question d’acheter une seconde auto. Celle qui a habité Montréal avant de s’installer à Sherbrooke se servait du vélo comme moyen de transport dans la métropole. « À Sherbrooke, tout est proche. De prendre la voiture pour aller à mon travail, je trouvais ça ridicule. »
« J’ai voulu prendre le vélo pour aller au travail, mais les côtes m’ont vite découragée… »
Habitant dans le secteur de Marie-Reine, la conseillère en communication doit monter la 12e Avenue pour se rendre au Centre 24-Juin, où elle travaille. « Quand j’ai commencé, j’arrivais en sueur, toute rouge. Je me suis demandé si je voulais commencer ma journée comme ça. »
La douche n’est cependant plus un enjeu avec son vélo à assistance électrique, qu’elle a acquis récemment. Elle concède que cela peut représenter un bon investissement, mais qui ne se compare nullement à l’acquisition d’une deuxième voiture.
« J’arrive fraîche et dispose. Je commence juste à l’utiliser; pour l’instant, je l’ai pris pour le travail. C’est mon moyen de transport alternatif à la voiture », dit-elle en comptant le prendre jusqu’à ce qu’il y ait de la neige, voire beaucoup de neige… et tant qu’elle n’a pas trop de choses à transporter.
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Pour Isabelle Lacroix, c’est lors de la fermeture du pont Joffre, en 2022, qu’un déclic s’est fait. « Le transport en auto était devenu infernal. Je me disais : ce n’est pas vrai que je vais rester prise plus longtemps dans l’auto que si j’étais à vélo… »
« Ça faisait plusieurs années que je me disais : il faudrait que j’intègre du transport actif dans mes déplacements, ça me semble évident. »
« Avec le pont Joffre, les premiers jours, il me semble que c’était environ 40 minutes! Il y avait une grande différence. Je me disais : c’est ridicule… » indique celle qui est vice-doyenne au développement et à l’international à la faculté des lettres et sciences humaines de l’UdeS.
Maintenant, raconte la Sherbrookoise, elle part de chez elle en autobus, en accrochant son vélo sur un des véhicules de la Société de transport de Sherbrooke (STS). Le soir, elle revient à vélo, à la course ou en marchant. « J’ai fait ça l’hiver passé parce que je n’aimais pas beaucoup me déplacer à vélo l’hiver, j’avais peur des automobilistes […] »
Il s’agit de la meilleure option qu’elle a trouvée, lui évitant d’arriver du même coup détrempée au bureau le matin, même si des douches sont disponibles.
Un autre facteur a influencé grandement cette transition vers le transport actif et intermodal : le programme incitatif de son employeur, l’Université de Sherbrooke, qui lui permet d’utiliser le transport en commun à faible coût.
Le trajet d’Isabelle Lacroix est d’environ sept km à vélo, ce qui lui prend environ 27 minutes, comparativement à environ 30 minutes en voiture. Elle a du même coup augmenté ses déplacements à pied et à vélo hors du travail.
Les deux femmes soulèvent le même point : avec le transport actif, on part quand on veut.
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Ces craintes qui nous empêchent de passer à l’acte
Isabelle Lacroix raconte avoir anticipé d’accrocher son vélo sur le support de l’autobus... décalant du même coup son passage à l’action. Question d’être prête, elle a visionné la vidéo de la STS quelques fois.
« Je me disais : si j’essaie de mettre mon vélo et que ça ne marche pas, les gens dans l’autobus, en plus de me voir, ils vont attendre après moi. À un moment donné je me suis dit : force-toi ma grande ! Ça m’a fait hésiter, mais je ne reviendrais pas en arrière. »
Elle ne cache pas, non plus, sa crainte envers les automobilistes.
« Autant que possible, je prends la piste cyclable. C’est probablement une minorité, mais c’est ceux qui nous marquent, ceux qui passent très près de nous, qui ont des réactions impatientes [dont on se souvient]. Moi, à la lumière rouge, quand la lumière tombe verte, je décolle moins vite qu’eux autres. J’ai encore cette crainte. J’utilise la piste au maximum, quitte à faire des détours… »
Julie Di Tomasso raconte pour sa part qu’elle a dû s’adapter à l’idée de rouler sur un vélo assistance électrique « à son âge », alors que certains peuvent penser qu’il s’agit d’un modèle pour les baby-boomers. Et pourtant, aujourd’hui, elle ne s’en passerait plus. « Je m’assume! »
Bon à savoir
C’est la semaine de la mobilité durable, du 16 au 22 septembre, organisée par le Conseil régional en environnement de l’Estrie (CREE) : surveillez sa programmation. Du 18 au 24 septembre, c’est aussi le Défi sans auto solo.
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