Plus ça va, plus il faut s’appauvrir pour se loger convenablement. Même la classe moyenne, si chère au gouvernement Legault, a du mal à accéder à la propriété, ou encore, à trouver un logement à un prix abordable.
Des exemples? Au cours du premier trimestre de 2023, le prix moyen d’une maison unifamiliale se situait à 599 659 $ dans la grande région de Montréal. Pour un condo, c’était 435 215 $.
Pour l’ensemble de la province, la maison se vendait en moyenne 449 734 $, alors que c’était 395 274 $ pour la copropriété (source: Baromètre résidentiel).
Que l’on vive à Montréal, Québec, Trois-Rivières, Sherbrooke, Granby, Saguenay ou Gatineau, la réalité immobilière est sensiblement la même un peu partout.
Les acheteurs de maisons ou de condos vivent un grand stress quand vient le moment de passer à l’action. Les locataires angoissent à l’idée de devoir déménager.
On ne parle pas ici des locataires qui se font évincer par leur propriétaire... Avec la vigueur du marché immobilier, bon nombre de proprios sont passés maîtres dans l’art de la «rénoviction».
On rénove le logement et on dit au locataire: désolé, mais c’est comme ça! Rénovation rime avec hausse salée du prix du loyer. C’est la loi du plus fort. C’est ce qui contribue à faire monter les prix et à créer beaucoup d’incertitude chez les locataires.
Ouvrons ici une courte parenthèse: les bons propriétaires, ceux qui entretiennent leur immeuble et des relations harmonieuses avec leurs locataires, constituent la majorité. On peut comprendre, dans leur cas, qu’ils doivent augmenter les loyers pour rencontrer leurs obligations hypothécaires, payer l’électricien et le plombier.
Un ménage sur cinq
On a appris, plus tôt cette semaine, qu’un ménage sur cinq, dans la grande région de Montréal, a maintenant du mal à subvenir à ses besoins de base. Un ménage sur cinq, ça veut dire 360 000 ménages!
Ces chiffres sont tirés d’une étude réalisée par la firme McKinsey, qui a mesuré le revenu résiduel des ménages.
C’est quoi le revenu résiduel? Concrètement, c’est ce qui nous reste dans nos poches après avoir payé le loyer, entre autres choses. De plus en plus de ménages québécois n’arrivent plus à joindre les deux bouts. Plusieurs en sont rendus à «couper» sur l’épicerie pour payer le loyer ou l’hypothèque.
Ce n’est pas ce qu’on peut appeler le bonheur, doit-on en convenir. C’est le constat qu’a fait le PDG de Centraide, Claude Pinard, il y a quelques jours, en référant aux problèmes engendrés par les logements devenus inabordables.
«Tout le monde s’est déjà posé la question. En louant un logement, est-ce que j’ai les moyens de me payer ce logement? Combien d’argent me restera-t-il à la fin du mois?» Il a tenu ces propos lors de la journée Agir ensemble pour le logement, organisée par Centraide du Grand Montréal, alors qu’il dévoilait l’étude de McKinsey, laquelle a permis de mesurer le fameux revenu résiduel. Il a déploré que trop de ménages vivent dans un logement insalubre.
On pourrait ajouter que les Banques alimentaires n’ont jamais été aussi fréquentées par des gens qui ont un emploi.
Trouver des solutions
C’est pourtant clair: la crise du logement sévit durement un peu partout au Québec et le temps presse de trouver des solutions.
Des solutions?
La ministre responsable de la Solidarité sociale, Chantal Rouleau, a reconnu que «partout au Québec, incluant dans la grande région de Montréal, la pénurie de logements est avant tout une pénurie de logements abordables».
Qu’entend faire la ministre de l’Habitation, France-Élaine Duranceau?
Elle l’a dit publiquement et il faudra voir si ça donnera des résultats. Un plan d’action sur l’habitation sera rendu public bientôt. Il est aussi question d’un projet de loi pour «rétablir l’équilibre entre les droits des propriétaires et des locataires».
Elle a parlé d’une «crise d’envergure». Il était temps qu’elle prononce ce mot maudit.
Cela fait des années, depuis 2018, en fait, que les groupes de pression réclament des actions énergiques du gouvernement de la CAQ afin qu’il trouve des solutions concrètes à la crise du logement; crise du logement que ce même gouvernement a toujours niée, soit dit en passant.
Cela fait des années que le Regroupement des comités logement et association de locataires du Québec (RCLALQ) tente de tirer la sonnette d’alarme sans parvenir à se faire entendre.
Une autre réalité
Il y a 10-15 ans, on parlait très peu de logement inabordable. On disait tout simplement que le logement à louer était un peu plus élevé que la moyenne.
On signait un bail avec le propriétaire avec la certitude qu’on allait bien se loger, et qu’on pouvait dormir tranquille pendant trois, cinq ans... et que peut-être, un jour, on allait pouvoir déposer une offre d’achat sur un beau petit bungalow.
Ce n’est plus comme ça que ça se passe dans la Belle Province. Les logements pas chers sont rares, très rares. Et il ne se construit pas un nombre suffisant de logements pour rééquilibrer le marché.
Le nombre de mises en chantier de logements collectifs est en baisse pour un 8e mois d’affilée, selon l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation (APCHQ).
Une statistique révélatrice: le recul des mises en chantier de logements locatifs accusait un retard de 47 % le mois dernier, comparativement à avril 2022.
Va falloir que le plan d’action de la ministre de l’Habitation en tienne compte. Il ne se construit pas suffisamment de logements pour contrer la pénurie.
La crise du logement ne se résoudra pas en claquant des doigts, encore moins en y allant de belles promesses qu’on ne saurait tenir.
Parce que la crise du logement n’a pas fini de faire des victimes.