Celui qui a passé la majorité de son enfance au Saguenay–Lac-Saint-Jean a appris beaucoup en faisant ses recherches sur le sujet, en vue de la publication du livre IA: comment les machines pourraient nous remplacer. Et l’œuvre, brillamment mise en images par l’illustrateur britannique Owen Davey, pourra en apprendre tout autant aux lecteurs. Ceux de 8 à 12 ans, auxquels elle se destine, tout comme à leurs parents. Voire à tout le monde.
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Car l’histoire racontée ici par Matthieu Dugal est peu souvent racontée de la sorte. Autrement que par le discours des grandes entreprises qui en sont les acteurs, et avec un point de départ remontant à bien plus loin que l’arrivée des ordinateurs.
« Quand tu t’intéresses aux automates, tu te rends compte que le Turc mécanique au 18e siècle qui jouait aux échecs, mais qui était animé par quelqu’un dans une boîte en dessous, ça relevait un peu de cette même volonté de bluffer, d’impressionner, de montrer qu’on est capables de créer des doubles humains », fait valoir Matthieu Dugal.
Un sujet d’actualité
Créer son double numérique, c’est justement ce que le journaliste et animateur a fait avec la série documentaire IA : être ou ne pas être, au tournant de laquelle la maison d’édition La Pastèque l’a approché pour explorer le sujet — sous un autre angle — dans un format de lecture. Et surtout de le vulgariser, avec les bonnes métaphores et les bonnes images à l’appui.
Amorcé avant l’avènement des ChatGPT et Midjourney, quelque part en 2020, le projet est arrivé au bon moment sur les tablettes des librairies — le 7 septembre dernier —, alors qu’il trouve plusieurs échos dans l’actualité.
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Il est d’autant plus pertinent, donc, de mettre en contexte la technologie qui se cache derrière les récentes avancées, de même que l’industrie qui en est à la source. Parce que les enjeux sont « démocratiques, énergétiques, environnementaux et de santé mentale aussi ».
Comme l’indique Matthieu Dugal dans les pages de son livre, le développement de l’intelligence artificielle, bien que celle-ci se résume pour nous à de simples clics sur un écran, se veut « extrêmement polluant ». Puis, comme il l’ajoute en entrevue, il y a également tout le processus d’utilisation des œuvres par les différents algorithmes qui reste à encadrer.
« Il faut en être conscient : c’est une industrie d’abord et avant tout extractiviste qui utilise des matières premières. Ce n’est pas quelque chose qui est magique. […] Il y a plein de choses qu’on tient pour acquises, qu’on pense faites selon les règles de l’art, mais c’est des industries qui profitent du fait qu’il y a un no man’s land réglementaire pour avancer énormément et capturer les marchés, de l’attention, des œuvres, des données », met en garde l’auteur.
Prudence
Il le répétera quelques fois durant l’entrevue accordée au Quotidien : il est « extraordinaire » d’en être rendus à ce chapitre dans l’histoire de l’humanité. Mais l’arrivée dans notre quotidien de ces technologies se veut avant tout un test, insiste Matthieu Dugal, un défi à notre propre intelligence.
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« Est-ce qu’on va être si intelligents que ça, si on dit qu’on est capables de créer des IA, mais qu’on se fait complètement bluffer, tromper, si on embarque là-dedans? Si on développe des technologies, mais qu’elles sont hyper polluantes et qu’elles aggravent la crise climatique, est-ce que c’est un signe d’intelligence? […] Est-ce qu’on va être plus intelligents que la machine? Il n’en tient qu’à nous », soulève celui qui juge important de mettre des « garde-fous » dans cette industrie.
Parfois pessimiste face à la suite des choses, l’animateur de l’émission Moteur de recherche sur ICI Première a aussi ses moments d’espoir. Car, après tout, les grands pas — à la fois modestes — faits par l’IA nous ramènent surtout à l’immense portée de l’intelligence humaine, fruit de millions d’années d’évolution et encore très difficile à comprendre pour les scientifiques.
« L’arrivée des robots qui montrent de l’intelligence, ça fait juste nous montrer que, dans le fond, on en sait beaucoup et très peu en même temps sur ce que c’est l’intelligence, la présence au monde », fait remarquer Matthieu Dugal.
Dans tous les cas, le livre IA : comment les machines pourraient nous remplacer est un bon point de départ pour se familiariser avec le sujet, de même qu’avec ces machines que l’on s’efforce de créer à notre image.