
Frédérique Hamelin: se projeter dans l’écran vert
Frédérique Hamelin a investi la Galerie des arts visuels, fermée au public, en plaçant son écran vert dans la vitrine qui donne sur le boulevard Charest. «D’un côté, il y a le rectangle vert, qui se veut très franc, matériel, frontal et invite à un face-à-face direct, et de l’autre un texte qui invite à l’errance et à la poésie des idées», explique l’artiste, qui crée ainsi une œuvre d’art conceptuelle avec un fort pouvoir d’évocation.
Habituellement, Frédérique Hamelin laisse les objets, les symboles ou les phénomènes qui l’intéressent parler d’eux-mêmes. Elle aime les œuvres brutes, aseptisées, énigmatiques, qui ont une résonance insoupçonnée.
«Je crois que même dans la plus aride des propositions, il y a toujours la possibilité de dégager une atmosphère, d’éprouver un sentiment, de saisir un fragment d’intention», note-t-elle.
Cette fois, elle équilibre son penchant pour l’art conceptuel avec un texte qui invite le regardeur à se perdre sur une plage bondée de Miami, dans le jardin du Luxembourg ou encore dans le ventre d’une baleine.

Entre les lignes de textes, dans l’espace de la Galerie des arts visuels, on aperçoit une chaise et un petit bureau où sont posés un livre noir et massif (Les drames de la mer, de Jean Merrien, que l’artiste a utilisé lors d’une performance au symposium Mouvances, à Matane cet été) et une lampe de banquier. La chaleureuse petite lueur verte crée un rappel, et un contraste, avec le carré vert crûment éclairé au néon.

«Pour que l’écran vert fonctionne [et permette de créer des effets spéciaux], il doit être éclairé de manière très uniforme», indique Frédérique Hamelin. La distorsion créée par le néon empêche toutefois l’objet de remplir sa fonction. Le promeneur ne peut qu’imaginer les lieux où il aimerait s’immerger, puisque la magie des images factices ne saurait opérer dans ces conditions.
La nuit, le grand aplat de couleur est impossible à manquer, on s’y sent attiré comme un insecte vers la lumière, et le jour, notre reflet s’interpose sur la vitre, entre le rectangle et nous, comme une apparition.
L’étrange miroir poétique sera visible jusqu’au 21 janvier au 255, boulevard Charest Est, Québec.