Les traitements, la perte des cheveux, puis celle des seins. Une famille magnifique en soutien. L’envie de l’amour et une immense soif de vivre. C’est tout ça que raconte le généreux et lumineux documentaire, tourné de surcroit en temps de COVID.
Geneviève Dulude-De Celles (Une colonie) souhaitait traiter du cancer du sein. Elle pensait rassembler les témoignages de plusieurs femmes. L’histoire de Marie-Philip l’a happée et est devenue le sujet de son film.
« Je ne m’attendais pas à travailler avec quelqu’un qui serait plus jeune que moi. Je m’imaginais rencontrer des femmes plus âgées », observe la réalisatrice.
Marie-Philip a répondu à un appel sur les réseaux sociaux. Elle ne se doutait pas qu’elle deviendrait le point central du film de Geneviève Dulude-De Celles.
« Je venais d’avoir mon diagnostic. J’étais vraiment révoltée. Partout où j’allais, c’était des mamies. Moi, j’avais 28 ans. Tout le monde, même les radiologistes, me disait : “mais que tu es jeune!” » raconte-t-elle.
« J’arrivais en chimio avec des madames de 70 ans et plus, ajoute-t-elle. Je ne comprenais pas et j’étais fâchée contre la vie. Quand j’ai vu l’annonce pour ce film, j’ai décidé de m’inscrire pour que la prochaine fille dans la vingtaine se sente moins alien. »
Pendant ses traitements, Marie-Philip est retournée vivre chez ses parents, en Beauce. Dans le film, elle dit se sentir un peu « loser ».
Avec le recul, elle confirme que sa famille été une bénédiction : des injections faites avec humour par le paternel aux têtes rasées par sympathie.
« Je n’aurais pas survécu sans eux. J’aurais chocké. Moi, avant, j’avais peur d’aller chez le dentiste. J’avais peur des vaccins. J’ai dû être désensibilisée à vitesse extrême », exprime Marie-Philip.
« Je suis tombée en amour avec la famille », indique la cinéaste Geneviève Dulude-De Celles, devenue une amie de ce clan visiblement tricoté serré.
« Je pense que c’est aussi déstabilisant pour la personne que pour ses proches, précise Marie-Philip. Moi, j’ai pété de sales coches. Je suis hypersensible. Quand je vis une émotion, ça explose. Eux, ils ne savaient pas comment me gérer. Ils ont dû apprendre aussi à gérer ça. »
Pandémie oblige, la réalisatrice a été éloignée de son sujet. Mais Marie-Philip avait bien sûr en main de quoi documenter son quotidien : des danses sur TikTok à une entrevue avec sa maman, entre autres. Et ses tentatives de trouver l’amour en ligne.
« J’ai laissé mon chum pendant ma chimio. Après, je me disais : “ark, comment je fais pour dater? Est-ce que je le dis ou pas? À un moment donné, il va me voir toute nue. J’ai des cicatrices” », raconte-t-elle.
« C’était ma plus grande peur d’être trop défectueuse pour ravoir un chum. Que personne ne veuille me dater parce que j’étais brisée, rapiécée », exprime Marie-Philip, en couple depuis 18 mois avec un infirmier rencontré sur une application.
« On a l’impression que c’est un film qui peut faire œuvre utile, ajoute Geneviève Dulude-De Celles. Pour des gens qui vont traverser une épreuve de ce type ou pour ceux qui les accompagnent.»