Réfléchir avec Nous

Le Musée national des beaux-arts du Québec inaugure sa nouvelle exposition, Nous, mettant en vedette des pièces de sa collection. (Le Soleil, Frédéric Matte)

À quoi ressemblerait une société sans stéréotype? Est-il parfois nécessaire d’être dans la lune? Qu’est-ce qui fait de moi une personne unique? Voilà le genre de questions sur lesquelles nous emmène le Musée national des beaux-arts du Québec avec Nous. Une nouvelle exposition permanente à saveur philosophique.


Il faudra emprunter l’ascenseur doré ou le célèbre escalier pour découvrir le plus récent projet du MNBAQ.

Situé au deuxième étage, Nous propose au public de réfléchir sur trois grands thèmes d’actualité : identités, migrations et territoires.

Accompagnées par la philosophe Lynda Champagne, les équipes du musée ont voulu monter une exposition créant de véritables dialogues entre les œuvres elles-mêmes ainsi qu’avec les visiteurs. Un projet où l’art incite à porter un regard «sur soi, sur l’autre, sur nous».

Portraits de société (1999-2000) de Marie-Claude Pratte happe les visiteurs dès leur entrée. L’œuvre, qui joue avec une cinquantaine de clichés, permet de poser des questions sur l’impact des préjugés.

Parmi les 43 000 pièces qui dorment dans les réserves du MNBAQ, 69 œuvres sont désormais sous les projecteurs de Nous.

Avec ce tout nouveau projet, le MNBAQ souhaite offrir un «nouveau format» d’exposition au public. Principalement parce que Nous s’orchestre sous le signe du dialogue. Entre les époques, les styles, les médiums, etc.

Contrairement à ce que le public a l’habitude de croiser au musée, l’exposition colorée et ludique ne se construit pas autour d’un parcours chronologique ou d’une grande trame narrative qui retrace la vie d’un artiste. Mais bien grâce à des questions et des thèmes précis.

«On veut montrer aux visiteurs qu’il y a plusieurs façons de découvrir les arts, plusieurs façons de faire des rencontres.»

—  Maude Lévesque, commissaire d’expositions au MNBAQ

«Poser des questions, c’est une nouvelle approche pour aborder des œuvres d’art. C’est peut-être moins centré sur les éléments biographiques de l’artiste, mais c’est plus axé sur les grands thèmes qu’on observe dans l’œuvre elle-même», estime Maude Lévesque, commissaire d’expositions au MNBAQ.

Tout au long de la visite, les liens entre les œuvres se font ainsi plutôt grâce à des motifs, des couleurs semblables ou encore des matériaux.

Pour l’équipe du musée, l’objectif ici est donc de placer côte à côte des œuvres qui n’ont pas l’habitude de se voisiner, mais qui résonnent pourtant les unes avec les autres.

Trois sujets à observer

L’exposition ouvre avec différentes formes de portraits qui permettent de creuser le thème de l’identité. Parmi ceux-ci, on retrouve notamment les créations de Mimi Parent, Eddy Firmin, John Heward, Manasie Maniapik, etc. Des artistes qui illustré l’autre ou qui se sont représentés eux-mêmes à travers leurs créations.

L’œuvre Portraits de personnes qui se ressemblent (1971) permet aussi de réfléchir sur le temps. Françoise Sullivan juxtapose ici une photo d’école de son fils à l’image d’un portrait peint par l’artiste italien Lorenzo Lotto (1480-1556).

Plusieurs questions tapissent le bas des murs et le sol de la salle d’exposition. Si le premier chapitre de Nous s’intéresse à la définition de l’identité ou demande «Que serions-nous sans les autres?», le second porte sur les migrations.

Un sujet certes, chaud et délicat, mais qui soulève de grands questionnements tels que «Qu’est-ce qu’un « chez soi » lorsqu’on est nomade?» ou encore «Comment le territoire influence-t-il la culture qui l’habite?»

Plusieurs artistes ont créé des œuvres qui témoignent des déplacements de population. À ce titre, le MNBAQ propose le travail de Jinyoung Kim, Couturier-Lafargue ou encore Ari Bayuaji.

«Certaines migrations peuvent être très grandes comme celles infligées par la guerre qui vont inciter des millions de gens à se déplacer. Mais il y en a aussi à plus petite échelle pour les enfants, par exemple, qui doivent se déplacer une semaine sur deux si leurs parents se séparent», explique Maude Lévesque.

Avec cette suite d’images, Couturier-Lafargue documente la vie à Resolute Bay, un village au Nunavut qui a été créé «artificiellement» par le gouvernement fédéral dans les années 50.

La question du territoire habite finalement la dernière partie de l’exposition qui s’ouvre avec Sans titre (1992) de Jean-Paul Riopelle.

Voyager dans les collections du musée

Si l’exposition Nous est un «voyage philosophique», elle naît toutefois d’une question assez pratique : comment mettre en valeur les collections du MNBAQ malgré la fermeture temporaire des pavillons Gérard-Morisset et Charles-Baillairgé?

Avec Nous, le musée souhaite donc mettre de l’avant des pièces qui ont été peu ou jamais présenté au public… mais aussi les «rocks stars» de ses collections, des œuvres particulièrement aimées de tous.

Tout au long du parcours, les visiteurs croiseront ainsi des grands noms de l’art québécois. En plus de Jean-Paul Riopelle, on retrouve Marc-Aurèle Fortin et L’orme à Pont-Viaux, Fernand Leduc avec L’alpiniste ou encore Jean Dallaire et Le coq licorne.

Nous sera ouverte au public dès le 20 avril.