Malgré une importante machine bien rodée, la Coalition avenir Québec (CAQ) a dû s’avouer vaincue dans l’élection partielle pour la circonscription de Jean-Talon, lundi, à Québec.

Les résultats préliminaires donnaient déjà le candidat du Parti québécois, Pascal Paradis, vainqueur par plus de 5000 votes d’avance sur la candidate de la CAQ, Marie-Anik Shoiry.

« Marie-Anik, tu n’as pas perdu. C’est la CAQ et moi qui avons perdu », a déclaré le premier ministre Legault, lors de son discours de défaite de cinq minutes.

Plusieurs élus caquistes étaient dans une salle du Centre de glaces de Sainte-Foy, surtout ceux de la région de la Capitale-Nationale. Les visages pensifs, même inquiets, se sont vite multipliés parmi le groupe d’une soixantaine de militants, élus et membres du personnel politique de la CAQ.

La circonscription de Jean-Talon, située à Québec, couvre l’ancienne ville de Sillery et toute la partie sud du secteur de Sainte-Foy.

Cette élection complémentaire, cinquième depuis l’élection de la CAQ en 2018 et deuxième dans ce mandat qui n’a qu’un an, est provoqué par la démission de la députée Joëlle Boutin, survenue fin juillet. Il s’agit d’une première partielle causée par le départ d’un élu de la CAQ.

Coïncidence, Mme Boutin célèbre son 44e anniversaire de naissance, lundi.

Porte-paroles de toute une région

« Ce soir, il y a une chose qui est claire. Les gens de Québec nous ont envoyé un message. Pas juste les gens de Jean-Talon », a poursuivi M. Legault, déçu.

« Les gens de Jean-Talon ont été les porte-paroles de tous les citoyens de la grande région de Québec, pour nous dire : vous devez faire un examen de conscience. C’est ça qu’on va faire. [...] J’ai bien l’intention, dans les prochains mois, de rebâtir ce lien de confiance avec les gens de Québec. »

—  François Legault, premier ministre et chef de la CAQ

La candidate perdante, Mme Shoiry, avait les larmes aux yeux sur la scène, en écoutant celui qui aurait pu devenir son patron. Elle a regretté de ne pas l’avoir emporté, mais y voyait au moins un avantage.

« J’aurais vraiment aimé gagner et représenter mes concitoyens. Mais j’ai une consolation : les enfants, je reviens à la maison », a-t-elle lancé à ses trois ados.

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Depuis cinq ans, les électeurs de Jean-Talon ont pu voter à quatre reprises pour choisir leur représentant à l’Assemblée nationale du Québec. En octobre 2018, ils ont élu Sébastien Proulx du Parti libéral du Québec (PLQ), puis la caquiste Boutin en décembre 2019 et en octobre 2022.

Ce qui fait trois partis différents élus dans la même circonscription dans un intervalle de cinq ans.

« Le message est fort »

« Il y a là-dedans des messages pour tout le monde », a pour sa part analysé le ministre Éric Caire, aussi député dans la région de Québec, dans La Peltrie.

« Jusqu’en 2018, Jean-Talon était un château fort libéral, ils sont quatrièmes. Québec solidaire finit troisième [après avoir été deuxièmes l’an dernier]. M. St-Pierre Plamondon [chef du Parti québécois] a un message aussi. C’est beau d’avoir un discours très large, mais qui est le Parti québécois et que propose le Parti québécois pour les Québécois? »

M. Caire n’a toutefois pas pu nier que la défaite est cinglante pour son parti.

« La victoire du Parti québécois est claire. Déjà là, le message est fort. Il faut prendre le temps de bien écouter ce que les gens avaient à nous dire et avoir la réaction en conséquence », a-t-il indiqué, ajoutant croire que l’abandon du volet routier du troisième lien en avril dernier n’a pas pesé très lourd dans ce résultat.

M. Caire rappelle qu’« il n’y a pas lieu de paniquer. Il y a encore 89 députés de la Coalition avenir Québec, on forme encore le gouvernement et il reste encore trois ans de mandat ».

Sa collègue ministre Martine Biron, députée de Chutes-de-la-Chaudière sur la Rive-Sud, a pour sa part estimé qu’« il faut savoir écouter. C’est ce qu’on a aujourd’hui. Il faut écouter le message de la population et prendre acte de cette décision. C’est ça qu’on va faire. Les gens ont parlé et il faut entendre ce que les gens disent ».

Triste anniversaire pour Guilbault

L’élection partielle dans Jean-Talon arrive 364 jours après les élections générales de l’an dernier, où la CAQ a obtenu le plus fort caucus en plus de 30 ans à l’Assemblée nationale.

On est aussi exactement six ans jour pour jour après l’élection de Geneviève Guilbault dans la circonscription voisine de Louis-Hébert, le 2 octobre 2017, un an avant que la CAQ accède au pouvoir. Plusieurs avaient vu dans cette victoire en complémentaire le début d’un mouvement en faveur de la CAQ.

La victoire de Mme Guilbault constitue la dernière fois qu’un parti au gouvernement du Québec, alors les libéraux, a perdu une circonscription dans le cadre d’une élection partielle.

« Vous savez, les citoyens ont toujours raison. Les citoyens de Jean-Talon ont parlé ce soir et ils ont décidé d’élire M. Paradis. Quel que soit le résultat de l’élection, il faut être respectueux, comprendre le message et l’analyser en groupe. »

—  Geneviève Guilbault, ministre des Transports et vice-première ministre du Québec.

Il s’agit d’une neuvième élection québécoise en 15 ans dans Jean-Talon, soit une quatrième partielle en plus des cinq générales.

La dernière élection partielle dans Jean-Talon s’est déroulée le 2 décembre 2019, soldée par l’élection de la caquiste Joëlle Boutin. Le taux de participation avait alors été de 49,18 %, deuxième taux de participation le plus élevé pour une partielle au Québec en 12 ans après sa voisine Louis-Hébert (52,44 %), en 2017.

Pas moins de 46 940 personnes étaient inscrites sur la liste électorale pour cette élection partielle.

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