Les caisses libre-service favorisent les vols à l’étalage

Inflation, multiplication des sites de revente, meilleure organisation au sein des voleurs. « Il y a plusieurs raisons qui expliquent la hausse des vols. Une de celles-là, c’est les caisses automatisées », affirme Michel Rochette, président du Conseil canadien du commerce de détail.

Les caisses libre-service ne font pas l’unanimité chez les consommateurs, mais elles semblent plaire aux voleurs. Le Conseil canadien du commerce de détail s’inquiète d’une hausse des vols à l’étalage, partiellement propulsée par ces nouvelles technologies.


« De façon générale, dans la dernière année, on remarque une hausse des vols à l’étalage », confirme Marie-Pier Rivard, porte-parole du SPVQ.

Inflation, multiplication des sites de revente, meilleure organisation au sein des voleurs. « Il y a plusieurs raisons qui expliquent la hausse des vols. Une de celles-là, c’est les caisses automatisées », affirme Michel Rochette, président du Conseil canadien du commerce de détail (CCCD).

Selon lui, les caisses libre-service rendent le vol plus accessible aux citoyens.

« C’est un acte de foi en quelque sorte. On présume que le consommateur va prendre tout ce qu’il a dans son panier et qu’il va balayer sans erreur tous les articles, mais ce n’est pas toujours le cas. »

—  Michel Rochette, président du Conseil canadien du commerce de détail (CCCD).

Volontairement ou non, certains clients n’entrent pas le bon code, oublient des produits, ou passent littéralement tout droit devant la caisse, témoigne M. Rochette.

Sylvain Charlebois, spécialiste de l’agroalimentaire, le constate également. « Les caisses libre-service augmentent les risques de vol, c’est clair », dit-il.

Questionnée par Le Soleil, Geneviève Duval, porte-parole du Conseil québécois de commerce de détail (CQCD), affirme que l’organisation « sent aussi cette préoccupation ressortir dans ses échanges avec ses détaillants ».

La surveillance est de mise

Les commerçants n’ont pas les mains liées devant cette problématique. Selon Sylvain Charlebois, les risques de vols à l’étalage peuvent varier selon la sécurité mise en place, la sensibilisation des consommateurs et la manière dont les caisses automatiques sont gérées.

Ann Mathieu, porte-parole de la Sûreté du Québec, pense que la surveillance a un rôle important dans la prévention des vols aux caisses libre-service. « Plusieurs commerçants mettent des préposés pour porter assistance si nécessaire, mais en même temps, ces gens-là ont un rôle important de vigie », soulève-t-elle.

Il est toutefois difficile pour les propriétaires d’assurer une bonne surveillance lorsqu’ils sont confrontés au manque de personnel, nuance le président du CCCD Michel Rochette.

« Une des raisons pour lesquelles on utilise des caisses automatisées, c’est parce qu’on manque de personnel, avance-t-il. Ça prend toujours quelqu’un pour surveiller les caisses, mais comme il y a moins d’employés, évidemment, on voit l’explosion des cas de vols. »

M. Rochette recommande aux commerçants d’installer des caméras de sécurité ou encore de demander aux clients un reçu à la porte afin de dissuader les voleurs. « Ça envoie un signal que la caisse libre-service n’est pas un aller simple vers la sortie », dit-il.

Investir dans des caisses automatiques plus développées peut également être une piste de solution. Par exemple, le magasin sportif Décathlon a des appareils qui facturent automatiquement tous les articles qui sont placés dans une chute. « Plusieurs technologies sont en rodage pour faciliter la tâche aux consommateurs, mais aussi pour réduire les risques de vol », assure le président du CCCD.

Avant tout, il est important de sensibiliser le public. Le vol à l’étalage fait plusieurs victimes, soutient Michel Rochette. « D’abord, le voleur se met à risque inutilement. Le commerçant subit d’énormes pertes. Mais ça touche aussi le consommateur en général, qui va se retrouver avec des prix qui augmentent à cause de ça. »

Pas toujours rapportés

La hausse du vol à l’étalage constatée dans le milieu ne se reflète pas dans les chiffres de la Sûreté du Québec obtenus par Le Soleil. En 2019, la SQ recensait 2270 vols à l’étalage sur son territoire. Pendant la pandémie, ce nombre a descendu à 1469, puis a remonté à 1902 en 2022.

Selon la porte-parole Ann Mathieu, plusieurs facteurs pourraient expliquer cette contradiction. « Est-ce que les commerçants vont s’en rendre compte? S’ils s’en rendent compte, est-ce qu’ils vont le dénoncer? Est-ce qu’ils vont porter plainte? Ça va dépendre du commerçant et de l’orientation qu’il veut prendre. Parfois, il peut simplement bannir le client et la police ne le saura jamais. »

Michel Rochette explique que plusieurs commerçants gardent sous silence les vols à l’étalage dont ils sont victimes « pour des raisons sécuritaires et pour protéger leur réputation ».

Le Conseil canadien du commerce de détail souhaite se pencher sur le problème dans les prochaines semaines. « On a déjà des rencontres prévues avec les corps policiers. Notre objectif, c’est de voir quels sont les modus operandi et de quelle façon on peut partager l’information pour diminuer les vols », affirme M. Rochette.