La fissure sur une poutre de ce pont a été découverte lors d’une inspection réalisée cette semaine. Elle est suffisamment importante pour interdire tout passage sur la structure, même celui des piétons. Une dizaine de villages regroupant 6500 personnes sont isolées jusqu’à nouvel ordre. Des gens, partis à Sept-Îles pour la journée, n’ont pu regagner leur domicile. C’est pourquoi des centres d’hébergement ont été installés à Sept-Îles et Havre-Saint-Pierre, chef-lieu de la Minganie.
Certains parviennent à traverser la rivière Sheldrake à bord d’une embarcation nautique, mais ce n’est pas tout le monde qui en a une et on ne peut surtout pas y embarquer n’importe quoi.
De nombreux commerces sont privés temporairement d’approvisionnement. Les denrées alimentaires et les médicaments peuvent être acheminés avec le pont aérien, mais de nombreux problèmes demeurent.
La coopérative de solidarité agroalimentaire Le Grenier boréal, de Longue-Pointe-de-Mingan, attend désespérément une centaine de livres de plants de fraises réfrigérés destinés à sa fraisière. «Si on attend quelques jours, les plants vont mourir et on n’aura pas de fraises», a soutenu sur Facebook une des responsables de la coop, Geneviève Lalumière.
Au dépanneur Alimentation chez Jako d’Havre-Saint-Pierre, certaines denrées ont disparu comme par enchantement dès l’annonce de la fermeture du pont. «Hier (mardi), on a tout vendu notre pain et notre lait dans un temps record. On n’a plus d’essence ordinaire non plus depuis hier en fin de journée», a indiqué le gérant de l’établissement, Gaston Boudreau.
Le dépanneur a encore un peu d’essence suprême, mais M. Boudreau en garde un contrôle strict. «On le garde pour les services d’urgence comme les pompiers et les ambulances», a-t-il lancé, un peu découragé d’avoir constaté mardi que certaines personnes remplissaient plusieurs bidons d’essence, en plus de faire le plein, plutôt que de se restreindre au nécessaire.
La pénurie de carburant pourrait durer. «Je sais que le ministère (des Ressources naturelles et des Forêts) travaille fort pour assurer l’approvisionnement en essence, mais j’ignore pour l’instant quand et comment ça se fera», a-t-il souligné.
Un avion-cargo à la rescousse
Pour la ministre des Transports et de la Mobilité durable (MTMD), Geneviève Guilbault, la priorité allait mercredi matin à l’organisation du pont aérien, en place depuis 10h. Ainsi, un avion-cargo de type 737 fera deux allers-retours par jour entre Sept-Îles et Havre-Saint-Pierre au moins jusqu’à vendredi. Un appareil pouvant transporter neuf passagers fera aussi deux allers-retours par jour, et un troisième au besoin. Évidemment, priorité sera accordée aux gens nécessitant des soins de santé.
Même si elle qualifie la situation de «pas facile pour les Nord-Côtiers», la députée de Duplessis Kateri Champagne Jourdain s’est dite rassurée par le Centre intégré de santé et de services sociaux de la Côte-Nord, qui a assuré qu’il n’y avait aucun problème d’approvisionnement de médicaments en vue.
«On commence déjà à réfléchir, si la situation perdure, à ce que les rendez-vous non urgents (en santé) puissent se faire à l’extérieur», a fait valoir Kateri Champagne Jourdain, qui a invité au passage la population à contacter le 1-877-644-4545 pour toute question relative aux conséquences de la fermeture du pont.
Inspection en 2021
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/VL2DC5SD6VCKLHUHI7ADFU4L7A.jpg)
À la direction régionale du MTMD, on soutient que la fissure n’était pas connue avant mardi matin, lors d’une inspection générale fait aux deux ans. Elle n’était pas visible au moment de la dernière inspection du genre, en 2021.
Dans les prochains jours, le ministère complétera ses analyses sur les causes de la fissure et ses impacts sur la capacité portante du pont Touzel, construit en 1973. «Une fois les analyses terminées, dans deux ou trois jours, on aura le choix de la solution», a dit la ministre Guilbault. «On est en train d’évaluer les travaux nécessaires et une fois qu’on sera fixés, on saura quelle durée prendront ces travaux, donc pendant combien de temps le pont sera fermé.»
La ministre a ajouté que son équipe réfléchit actuellement à trouver une solution alternative pendant la fermeture du pont Touzel, «Éventuellement un autre pont, on étudie aussi avec des traversiers», lance-t-elle en évoquant aussi l’idée d’un pont temporaire comme en dispose l’armée canadienne. «On est en train de regarder la configuration des lieux, car ce ne sont pas tous les types de pont qu’il est possible d’installer.»
La direction régionale du ministère a dans ses cartons un projet de relocalisation du pont Touzel, relocalisation rendue nécessaire en raison de l’inexorable érosion des berges de la Côte-Nord. La porte-parole Sarah Gaudreault assure toutefois, même si les analyses ne sont pas complétées, que la présente fissure n’aurait rien à voir avec l’érosion.