À son arrivée au centre de réadaptation en toxicomanie Portage, Lorykim Brisson ne savait plus comment se décrire ou se présenter. Depuis ses 17 ans, elle s’était perdue dans sa consommation. Sa dépendance avait pris le dessus. Elle n’avait plus aucun amour de soi. Elle ne pensait pas le mériter. Sa vie lui avait échappé aux mains de la drogue et de l’alcool. Son monde tournait autour de la consommation.
« Si j’avais une soirée d’organisée, j’appelais mes amis pour savoir si je pouvais consommer chez eux. Si la réponse était non, je m’inventais une raison pour ne pas y aller. Je fumais finalement seule à la maison en pleurant. »
Samuel Carbonneau s’est lui aussi retrouvé au pied du mur avant se tourner vers Portage. Sa dépendance s’était installée sournoisement avant de devenir un réel fléau. « Ça commence une fois par mois, puis à toutes les fins de semaine pour ensuite devenir une habitude à la fin de chaque journée. Tu clignes des yeux et tu es drogué du matin jusqu’au soir. »
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Sa consommation de cannabis s’est rapidement transformée en une dépendance pour des drogues beaucoup plus dures. Ce n’est que sous effet de la drogue qu’il arrivait à retrouver son estime de soi. «Je savais que j’allais mal et que je ne devais pas faire ça, mais je le faisais quand même. C’était comme un fou qui sait qu’il est fou. C’était très difficile.»
Les proches dans l’inconnu
La consommation mène systématiquement au mensonge. C’est en tout cas l’expérience des deux jeunes adultes. Ils inventaient mille et une excuses pour sortir de la maison et aller consommer en cachette.
« À chaque fois que je sortais quelque part, je disais à ma mère que j’allais travailler alors qu’en réalité j’allais fumer. Elle croyait que je travaillais beaucoup. Dans sa tête, j’avais huit emplois », mentionne Lorykim Brisson.
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Les proches savent souvent que quelque chose cloche, mais n’arrivent pas vraiment à mettre le doigt dessus. La mère de Lorykim pensait que sa fille fumait un petit joint une fois de temps en temps ou qu’elle ne prenait seulement quelques bières durant des petites soirées. Elle était loin de se douter de ce qui se passait réellement.
« Pratiquement personne ne savait à quel point on consommait mise à part nous même. Il y a plusieurs moments où je fumais seul et personne n’en savait rien. C’était probablement les pires moments », se remémore Samuel Carbonneau.
Faire face à la réalité
Bien au courant de son problème, Samuel a pris son courage à deux mains et s’est regardé dans le miroir pour faire face à la réalité.
« Je ne suis pas la personne que je devrais être. Ce que je suis aujourd’hui ne me représente pas. Et par amour pour moi, même si c’était dur de m’accorder de l’importance à ce moment, je devais aller chercher de l’aide. »
Samuel comme Lorykim s’entendent pour dire que ce n’est qu’au moment où tu avoues ce que tu as fait et ce que tu étais, que tu peux avancer par la suite.
« Sens-toi mal et change! On a tellement répété ce modo durant notre passage à Portage. Accepte la situation dans laquelle tu te retrouves et fais quelque chose pour te sortir de là », ajoute Lorykim Brisson.
Réapprendre à vivre
Une fois dans le besoin, plusieurs adolescents et jeunes adultes comme Samuel et Lorykim se tournent vers Portage pour traverser ces moments difficiles. Depuis plus de 50 ans, l’organisme aide des milliers de personnes aux prises avec des problèmes de toxicomanies à vaincre leur dépendance.
Le programme de Portage est d’une durée d’environ six mois. Les programmes de thérapies sont basés sur l’acquisition de compétences. Ceux qui y passent n’arrêtent pas seulement de consommer, mais réapprennent quelque peu à vivre. On les encourage à recommencer à faire les petites choses du quotidien qu’ils ont délaissées durant leur épisode de consommation.
L’intervenante au suivi post-thérapie, Myriam Khediri, avance que le développement des compétences mène à un sentiment d’efficacité pour remonter l’estime de soi qui, dans la plupart des cas, est véritablement blessé. « La consommation n’est que la pointe de l’iceberg. Des personnes prises avec des dépendances ont une estime complètement blessée et détruite. Il faut les aider à la rebâtir », dit Mme Kedhiri.
Au fil du programme, les participants gagnent de plus en plus de responsabilités. Une fois quelques échelons gravis, certains accompagnent même les nouveaux dans leur processus de réadaptation.
« Nous sommes capables de les aider parce que nous sommes aussi passés par là. Peut-être pas exactement le même chemin, mais on a vécu des choses semblables », dit Samuel Carbonneau.
Tout au long du parcours, les jeunes développent des réflexes pour s’adapter à différentes situations qui pourraient potentiellement réanimer le désir de consommer. « Quand ça va bien, ça va bien. Mais quand ça va mal, qu’est-ce que tu vas faire? Tu dois avoir appris à mettre en place des stratégies que tu connais sur le bout des doigts pour affronter les moments plus difficiles », explique Mme Kedhiri.
La célébration d’une nouvelle vie
Samuel et Lorykim profitent aujourd’hui d’une nouvelle vie. Lorykim est retourné au Cégep en éducation spécialisée et entrevoit une future carrière en communication. Samuel s’est quant à lui donné une deuxième chance pour compléter un programme en création sonore et multimédia. Dans son temps libre, il s’adonne à la musique. Une passion qui le fait vibrer depuis longtemps.
Ils célèbrent ce nouveau départ dimanche soir au Grand Théâtre de Québec en compagnie de 144 autres personnes qui sont elles aussi parvenues à vaincre la dépendance. Portage tient à honorer tous ces gens qui ont pris part à un des différents programmes de la région.
« On a décidé de prendre notre vie en main et c’est la célébration de notre nouvelle vie que nous soulignons», glisse avec fierté Lorykim Brisson.