Wô les moteurs! disent 55 organismes à Dubé

Le ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé, a déposé son projet de loi sur la réforme du réseau de la santé, le 29 mars.

Moins de participation des citoyens. Plus de privatisation. Trop d’empressement du gouvernement.


Dans une lettre ouverte publiée mardi dans les médias des Coops de l’information, une cinquantaine d’organisations, groupes et organismes de partout au Québec unissent leurs voix pour demander au ministre de la Santé du Québec, Christian Dubé, de prendre plus de temps avant d’adopter sa loi sur la réforme du réseau de la santé.

Cette missive paraît à la sixième et dernière journée de consultations particulières sur le projet de loi 15 à l’Assemblée nationale du Québec.

« M. Dubé prétend qu’on veut tous faire le même gâteau, mais que c’est juste sur la recette qu’on ne s’entend pas? Mais peut-être qu’on ne veut pas tous le même gâteau! » affirme en entrevue la coordonnatrice de la Ligue des droits et libertés (LDL), Laurence Guénette.

Les signataires comptent dans leurs rangs la Ligue des droits et libertés, des groupes de femmes, plusieurs syndicats, la Fédération des femmes et de nombreux organismes communautaires et leurs regroupements.

« Dans le grand public, M. Dubé transmet l’image d’un ministre très à l’écoute, poursuit Mme Guénette. Mais 55 organisations endossent cette lettre parce qu’elles ne se sentent pas consultées ou écoutées en temps utiles. Elles ne sentent pas que l’espace et le temps leur sont donnés pour se faire une tête et se prononcer sur un projet de loi aussi majeur. »

6 jours, 1180 articles

Huit derniers groupes, dont l’Ordre des pharmaciens et la Commission de la santé des Premières Nations, se feront entendre et questionner mardi par le ministre Dubé et les partis d’opposition sur ce que contient ou pas la pièce législative de 1180 articles.

Trois des signataires passent aussi en auditions, mardi : la Table des regroupements provinciaux d’organismes communautaires et bénévoles, le Réseau des Tables régionales de groupes de femmes du Québec et le Regroupement québécois des intervenantes et intervenants en action communautaire en CISSS et CIUSSS.

En six jours d’audiences, une quarantaine de groupes se seront exprimés et auront échangé durant 45 minutes chacun. Vingt-sept mémoires ont aussi été déposés.

Selon son intitulé rédigé par le gouvernement de la CAQ et son ministre de la Santé, le projet de loi 15 «vise à rendre le système de santé et de services sociaux plus efficace».

Pour y arriver, disent les signataires de la lettre, on a besoin de plus de temps.

« Cet empressement, c’est un peu ce à quoi nous a habitués le gouvernement du Québec depuis quelques années, avec la gouvernance par décrets pendant la pandémie. »

—  Laurence Guénette, de la Ligue des droits et libertés

« C’est un nouvel épisode de cet empressement, de ce déficit démocratique, alors que le projet de loi 15 est vraiment vaste », constate la coordonnatrice de la LDL.

Les signataires s’inquiètent de voir la participation des citoyens dans leur système de santé continuer de reculer dans le projet de loi, pendant que de l’autre côté, la privatisation gagne encore du terrain.

Le reste du Plan santé

Le seul fait que le projet de loi compose une brique de 305 pages comptant près de 1200 articles commande une prolongation des auditions publiques et des réflexions qui les accompagnent, selon eux.

Le ministre Dubé a fait savoir qu’il aimerait faire adopter le projet de loi 15 avant la fin de la session parlementaire, au plus tard le 9 juin. Il reste 11 jours de travaux parlementaires avant la pause estivale. Les partis d’opposition ont émis des doutes devant un échéancier aussi serré.

L’adoption du projet de loi à l’automne s’avère plus réaliste.

« On nous propose une réforme importante, pas que négative, mais pas non plus seulement souhaitable, a dit Mme Guénette. C’est majeur et on ne permet pas aux parties prenantes de bien se faire une tête là-dessus. C’est un problème plus vaste qu’on situe dans la foulée du Plan santé annoncé il y a plus d’un an, mais pour lequel on n’a jamais été appelés à se prononcer et à participer à la prise de décisions. »

Autant la Ligue des droits et libertés que les autres groupes signataires de la lettre conviennent que le statu quo n’est pas acceptable.

« Après quelques grandes réformes qui ont eu lieu et ont engendré beaucoup de déceptions, on est en droit de s’attendre à être consultés et à participer pleinement pour réussir à faire de cette réforme la meilleure réforme possible », résume la coordonnatrice de la Ligue des droits et libertés, réclamant que les autres éléments du Plan santé fassent aussi l’objet de consultations publiques.