«Lire, c’est la base de tout!»

Daniel Marquis

Les adolescents lisent peu et sont de moins en moins bons en français, reconnaît Daniel Marquis, ex-bibliothécaire et conseiller pédagogique au Cégep de Granby. Ce qui ne l’inquiète pas pour autant.


«On n’en voit plus avec un magazine dans les mains, dit le nouveau retraité de 63 ans à la voix douce. Le livre ne fait pas partie de leur quotidien non plus. Pour un étudiant au collégial, si ce n’est pas à la portée d’un clic, ça n’existe pas.»

«Mais c’est à nous de s’adapter, ajoute-t-il. On a des étudiants curieux, mais ils sont différents et il faut les prendre où ils sont.»

«Mais c’est à nous de nous adapter, ajoute-t-il. On a des étudiants curieux, mais ils sont différents et il faut les prendre où ils sont.»quête des savoirs et de la culture, paru aux Presses de l’Université Laval.

Cette évolution a permis aux bibliothèques collégiales de réduire leurs coûts tout en en offrant davantage qu’avant. Presque tout se fait en ligne. Le Cégep de Granby offre entre autres l’une des meilleures collections de films de répertoire. Il est aussi très fort au niveau industriel.

Bibliothèque du Cégep de Granby

«On n’a jamais eu autant accès à l’information aujourd’hui, dit Daniel Marquis. Le rôle du bibliothécaire est justement d’amener l’étudiant à identifier les bonnes sources… et à éviter le plagiat.»

L’intelligence artificielle maintenant accessible via Internet et qui permet d’écrire des textes argumentatifs qui se tiennent pose évidemment problème aujourd’hui.

«Ça inquiète durant les examens où l’ordinateur est permis», dit Daniel Marquis. Pour les travaux scolaires, il faut citer ses sources, ce que le programme le plus populaire présentement ne fait pas.

Guérir la fracture numérique

Daniel Marquis veut aujourd’hui guérir ce qu’il appelle la «fracture numérique», soit les disparités de ressources entre les bibliothèques des 53 cégeps. C’est notamment ce qu’il évoque dans le chapitre du livre auquel il a collaboré.

Le livre et la bibliothèque.

«Pourquoi avoir 53 bibliothèques différentes? Pourquoi tout faire 53 fois? Ça se fait déjà en Ontario et dans l’État de New York. Et règle générale, on a les mêmes ressources à 90 %.»

Il milite pour la création d’une seule Bibliothèque collégiale nationale qui permettrait «des économies d’échelle énormes» tout en garantissant un meilleur accès au savoir pour tous.

La Fédération des cégeps y réfléchit, mais l’idée n’est pas populaire partout, souligne le Bromontois. Certains cégeps la refusent puisqu’elle mettrait en évidence le fait que leurs bibliothèques sont moins bien pourvues. D’autres craignent des pertes d’emploi.

«C’est faux, dit M. Marquis. Les bibliothécaires offriraient simplement davantage de formations plutôt que de constamment maintenir et mettre à jour leur portail Web.»

Bibliothèque du Cégep de Granby.

Le troisième lieu

Il faut garder en tête que les bibliothèques servent aujourd’hui des fonctions différentes qu’autrefois. Comme celle du Cégep de Granby, agrandie sur trois étages en 2012, elles sont maintenant un «troisième lieu» complémentaire à l’école et à la maison.

«C’est le grand changement des 30 dernières années. C’est devenu un lieu agréable pour étudier en paix ou travailler en équipe. La moitié du temps, quand les élèves y vont, ce n’est pas pour lire.»

Or, on peut être un citoyen engagé même si on ne lit pas énormément, dit Daniel Marquis.

«L’important, c’est de former des étudiants éclairés et critiques, et critiques aussi par rapport aux nouvelles technologies.»

Pour ce qui est de la qualité de la langue, la solution passe tout de même par la lecture. «Lire, c’est la base de tout! Un étudiant qui a des difficultés en français en aura dans toutes les matières.»