Au lendemain de l'annonce faite jeudi soir, le ministère du Travail rapportait avoir reçu un avis de licenciement collectif visant plus de 400 travailleurs. Ces derniers auraient appris la nouvelle sans préavis, au même moment où un communiqué de presse était publié aux médias.
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Selon l'avis, 401 salariés, provenant des trois établissements de Medicago, perdront leurs emplois en date du 2 juin prochain.
L'entreprise se fait plus nébuleuse sur le sujet. Osamu Shimizu, directeur des communications de Medicago, affirme qu'il y a «environ 400 employés au Canada (dont 360 au Québec) et environ 180 aux États-Unis.» Des employés hors Québec seraient donc inclus dans cette vague de licenciement.
Le Soleil est allé faire un tour à l’usine de Medicago, sur le boulevard du Parc Technologique, et au siège social, sur la route de l’Église, vendredi matin. Sur place, la dizaine d’employés rencontrés ont refusé de commenter la situation, citant une interdiction de parler aux médias.
Rappelons qu'il y a trois mois, la biopharmaceutique a remis une lettre de congédiement à 62 employés de son usine américaine de Durham, en Caroline du Sud.
Osamu Shimizu, directeur des communications de Medicago, a confirmé au Soleil que tous les employés sont congédiés «dans le cadre du processus de liquidation de l'entreprise».
Le directeur souligne cependant prendre «grand soin de traiter les employés de manière équitable et appropriée et conformément aux exigences légales locales. Nous ne sommes pas libres de partager des détails supplémentaires à ce stade.»
Rachat possible
Le ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie, Pierre Fitzgibbon, affirme que le gouvernement du Québec est déjà en contact avec des repreneurs potentiels.
«Avec le gouvernement fédéral, on a exprimé clairement à la société que nous serions intéressés de regarder comment on pourrait aider un repreneur», indique-t-il, ajoutant que le gouvernement ne peut pas être le seul actionnaire de l’entreprise.
M. Fitzgibbon assure que l’argent qui a été octroyé à Medicago sera remboursé.
En mai 2015, Québec et Ottawa avaient annoncé des prêts de 60 millions $ et de 8 millions $, respectivement, pour la construction d'un complexe dans la région de Québec pour abriter les activités de Medicago.
À cela s’ajoute un 173 millions $ du fédéral pour la fabrication du vaccin contre la COVID-19 en 2020.
Le ministre a précisé vendredi que Mitsubishi Chemical avait informé le gouvernement québécois à la fin de décembre de son intention de dissoudre Medicago.
Ça aurait pu être fait «d'une manière plus humaine»
Le ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, pour sa part, n’a pas pu confirmer que les sommes investies par son gouvernement dans Medicago allaient être remboursées.
«On va regarder attentivement [...] Les avocats sont déjà là-dessus», dit-il.
Aucune certitude non plus quant aux brevets. «Ce qu’il y a de plus important maintenant, c'est que les travailleurs, leur expertise, leur talent et la technologie de Medicago puissent rester à Québec», affirme-t-il.
Le ministre a aussi écorché la maison mère de Medicago, Mitsubishi Chemical Group, sur la manière dont elle a annoncé la fermeture de l’usine et congédié les employés. «Une nouvelle de cette sorte aurait été beaucoup mieux accueillie et comprise si elle avait été faite d'une manière plus humaine», lance-t-il.
François-Philippe Champagne, ministre fédéral de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie, a déclaré jeudi aux journalistes que son gouvernement était en «mode solution».
Le ministre a reconnu que la technologie des vaccins à ARNm pour lutter contre la COVID-19 est devenue dominante, car elle «semblait être la plus efficace». Mais le vaccin à base de plantes de Medicago était toujours «prometteur», a déclaré M. Champagne.
«Tout le monde a convenu que le vaccin à base de plantes pourrait très bien aider dans une future pandémie.»
«La pire nouvelle économique pour Québec»
Le chef de l’opposition officielle à l’hôtel de ville voit la fermeture de Medicago comme «la pire nouvelle économique pour Québec», rien de moins.
«L’implantation de Medicago, c’est un socle sur lequel on voulait établir la relance de la ville, tout le secteur d’Estimauville et le projet InnoVitam. Ça projetait Québec là où elle voulait se voir, avec des emplois de haut niveau», lâche Claude Villeneuve en entrevue avec Le Soleil.
Le chef de l’opposition se demande si les gouvernements ont tout tenté pour «sauver les investissements et le projet». «Est-ce que le maire était dans le coup?»
À l’inverse, si «on a tenu le maire de Québec en dehors du cercle», M. Villeneuve y voit aussi un problème majeur.
«Il fallait éviter la fermeture à tout prix. Si on perd la propriété intellectuelle et qu'on se ramasse avec un bâtiment vide, on perd sur toute la ligne. C’est un projet qui en valait la peine. Je signerais de nouveau cette entente-là demain matin. Je ne regrette pas l’investissement, mais le résultat laisse un goût amer», termine Claude Villeneuve, conseiller du district Maizerets-Lairet.
Du côté du cabinet de Bruno Marchand, on assure que la nouvelle était une «surprise». Le maire n’effectuera pas d’autre commentaire pour le moment, il doit prendre connaissance de tous les impacts que cette décision a sur la Ville de Québec, laisse savoir son attaché de presse.
Le seul commentaire officiel demeure une courte réaction publiée sur ses réseaux sociaux jeudi soir, dans laquelle il décrit la fermeture comme un «immense dommage».
On assure cependant que le maire Marchand n’avait pas entendu parlé d’une éventuelle fermeture. Avec Judith Desmeules, Olivier Bossé et La Presse Canadienne
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