Cette participation massive des professeur.e.s a transformé cette «simple» Assemblée générale en un magnifique et puissant moment collectif qui nous a fait prendre conscience que, depuis le début de nos carrières à l’Université Laval, nous n’avions jamais eu l’occasion de participer à un événement réunissant autant de collègues mobilisés autour d’un objectif commun.
Ce constat nous a profondément étonnés: comment se fait-il que ce soit un événement syndical qui permette de galvaniser les forces vives de professeur.e.s qui, au fond, ne demandent pas mieux (mais pas moins) que d’obtenir les moyens de donner le meilleur d’eux/elles-mêmes pour mener à bien la mission d’intérêt public de cette grande institution qu’est l’Université Laval?
Comment expliquer que, peu à peu, les membres de la haute direction de l’Université se soient éloigné.e.s, jusqu’à la déconnexion, de la réalité vécue par les collègues, alors qu’ils et elles ont eux-mêmes déjà été des professeur.e.s? S’il est difficile de répondre précisément à cette question, une chose est toutefois sûre: devant la mobilisation sans précédent des professeur.e.s, l’équipe de direction de la rectrice Sophie D’Amours ne peut plus se permettre d’ignorer ou de nier les importants problèmes que décrient les collègues depuis de nombreuses années et qui doivent être réglés pour le bien de notre université.
De la surcharge de travail endémique (qui s’explique notamment par le fait que l’Université Laval soit la seule université québécoise à avoir vu le nombre de ses professeur.e.s diminuer depuis vingt ans), en passant par la multiplication des processus bureaucratiques d’une utilité discutable, le manque de soutien administratif adapté, l’effritement du principe de direction collégiale de l’Université et la perte de pouvoir d’achat des collègues dans le contexte inflationniste actuel (alors même que la masse salariale de l’administration et de la gouvernance de l’Université Laval a augmenté de façon vertigineuse [+96%] au cours de la dernière décennie): la coupe déborde et on ne peut plus continuer de demander aux collègues de faire plus avec moins au nom de la «passion» pour leur travail.
À brève échéance, nous espérons donc que le mandat de grève de deux semaines, à être exercé à partir du 20 février prochain et entériné à 96% par les collègues, mènera à une accélération des négociations pour nous permettre de trouver une entente et éviter un arrêt de travail que personne ne souhaite. À plus long terme, cependant, nous espérons sincèrement que cette mobilisation historique constituera un point tournant qui modifiera de manière structurante la manière de diriger l’Université Laval au cours des prochaines années.
De fait, cette mobilisation montre le fossé qui sépare l’administration D’Amours de la réalité du travail professoral et il est donc urgent que la direction de l’Université Laval, pour permettre aux membres de la communauté et à ses professeur.e.s de jouer valablement leur rôle au sein de la population de (et du) Québec, redevienne résolument ancrée dans la réalité des acteurs/trices du terrain qui, par le truchement des activités d’enseignement et de recherche, sont au cœur de la mission de l’Université Laval.
Nous sommes donc extrêmement reconnaissant.e.s à nos collègues de nous avoir permis de vivre ce moment collectif déterminant pour le futur de notre Université et espérons maintenant que les membres de la haute direction de l’Université sauront se montrer à la hauteur du message qui vient de leur être envoyé.
Claire Bilodeau, Chantale Jeanrie, Louis-Philippe Lampron, Madeleine Pastinelli et Simon Viviers, professeur.e.s à l’Université Laval et membres du comité exécutif de son syndicat des professeur.e.s