«Je trouve ça effrayant, ce qui est arrivé», a d'abord commenté François Legault, mercredi midi, en mêlée de presse au parlement de Québec. Il s'agissait de sa dernière sortie officielle dans la capitale en 2022, alors que les travaux parlementaires ont pris fin la semaine passée.
Samedi, avant l’ouverture de la station du Mont-Sainte-Anne, une gondole d'un remonte-pente s’est décrochée du câble pour s’écraser plusieurs mètres plus bas, sur la piste de ski. Aucun passager n’était à bord et personne n’a été blessé. Presque toute la station est fermée depuis, sauf les deux pentes-écoles.
«Il y a un rattrapage monstrueux à faire sur les équipements du Mont-Sainte-Anne, a déclaré M. Legault. L’opérateur n’a pas montré dans les dernières années qu’il pouvait gérer correctement le Mont-Sainte-Anne.»
«On n'a pas dit oui»
Propriétaire et gestionnaire de la station du Mont-Sainte-Anne depuis 1999, l’entreprise albertaine Resorts of the Canadian Rockies (RCR) a déposé un projet d’investissement de 100 millions $ auprès du gouvernement du Québec, en mai dernier. Dans ce plan, RCR débourserait 50 millions $ et Québec 50 millions $ aussi.
Mais le déficit d'entretien des équipements ces dernières années au Mont-Sainte-Anne a convaincu plusieurs acteurs du milieu, dont plusieurs réunis au sein du groupe Avenir Mont-Sainte-Anne, de réclamer un changement d'opérateur.
La chute de la télécabine samedi s'avère un énième épisode dans cette saga.
Le bureau du premier ministre est impliqué dans le dossier, mais aussi la ministre du Tourisme, Caroline Proulx, et surtout le ministre de l'Économie, Pierre Fitzgibbon, qui tient les rênes du dossier.
MM. Legault et Fitzgibbon assurent que dans le cas de l'investissement demandé de 50 millions $, la décision n’est pas encore prise.
«La question qu’on se pose au gouvernement : est-ce que c’est le rôle du gouvernement de mettre de l’argent dans les centres de skis? Indépendamment pour qui», a commenté le ministre Fitzgibbon, à son arrivée pour la réunion hebdomadaire du Conseil des ministres.
Selon lui, le fait que RCR n’a sans doute même pas atteint le strict minimum en frais d’entretien et d’investissements de base au Mont-Sainte-Anne dans les dernières années n’influencera pas la décision gouvernementale, plus large.
«Depuis 15 ans, [le gouvernement du Québec] a mis beaucoup d’argent dans des centres de skis. La question qu’on doit se poser collectivement : est-ce que c’est correct de prendre l’argent des citoyens pour mettre dans des centres de ski? On n’a pas dit oui à RCR, on n’a pas dit oui à personne», a conclu M. Fitzgibbon.
La sécurité prime
Depuis lundi, la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) inspecte les remontées mécaniques du Mont-Sainte-Anne. La réouverture dépend maintenant d’un rapport positif de la RBQ, qui pourrait demander certaines corrections ou réparations.
Jusqu'à nouvel ordre, il n'est donc pas encore question de parler de futurs investissements, indique la ministre du Tourisme.
«Avant tout, on veut s’assurer de la sécurité des skieurs. On va attendre avec impatience le rapport de la Régie du bâtiment du Québec. Après ça, on avisera», a commenté à son tour Mme Proulx.
«On attend ça impatiemment, a poursuivi la ministre. C’est avant tout la sécurité des skieurs et des gens qui empruntent la montagne qui compte.»
Pour sa part, la direction du Mont-Sainte-Anne affirme par communiqué prévoir une réouverture de la station, mais sans préciser de date. Elle confirme que la RBQ et la Commission des normes de l'équité de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) sont passées cette semaine pour inspecter les lieux.
Une autre enquête externe auprès d'experts a aussi été commandée pour connaître les causes des événements de samedi.
Elle précise avoir remplacé au complet le système d'exploitation de ses télécabines en 2021, au coût de 1,5 million $, à la suite des incidents d'arrêts brusques survenus en 2020. Ce qui a «engendré une recertification complète de la remontée en décembre dernier». «Des entretiens préventifs sont effectués annuellement sur toutes nos remontées, selon un plan de prévention détaillé et spécifique à chacune d'elles», ajoute la direction du MSA.
Du côté d'Avenir Mont-Sainte-Anne, on se réjouit de lire «pour une première fois, le gouvernement du Québec reconnaît formellement l’incapacité du gestionnaire à assurer une saine gestion du Mont-Sainte-Anne, et cela vient de la bouche du premier ministre lui-même. Nous accueillons favorablement cette déclaration et espérons maintenant que le gouvernement déploiera des actions concrètes pour paver la voie à un changement d’opérateur».