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La prévision des dépenses en santé et services sociaux pour l’année budgétaire en cours dépasse 54 G$. Selon une étude publiée en 2013 (N.-J. Clavet, J.-Y. Duclos et al.), les dépenses publiques annuelles en santé du gouvernement du Québec pour la période 2013-2030 augmenteront de 31,3 G$ à 61,1 G$ (en dollars constants), atteignant 68,9% des revenus totaux du gouvernement. Une croissance insoutenable à terme.

À la naissance du régime public d’assurance-maladie en 1970, Renée Claude chantait «C’est le début d’un temps nouveau». C’est le désenchantement maintenant, la fuite en avant dans l’aveuglement volontaire. Le GAP (guichet d’accès à la première ligne) et les 50 travaux d’Hercule du ministre Christian Dubé apparaissent comme la nouvelle quête du Graal. «Le désir de croire» (Cyrille Barrette). L’hydre de l’impunité met l’État-assureur à l’abri des poursuites judiciaires.

Une véritable réforme est celle où la concurrence entre les producteurs de soins est au cœur du régime: réseau semi-privé financé par des fonds publics à une hauteur de 50% (comme en éducation), maintien du régime public actuel et création d’une nouvelle profession: les praticiennes (ou praticiens) libérales. Sa réussite repose cependant sur quelques prémisses: une contribution santé des usagers associée aux visites médicales, le calcul des coûts générés par chacun des producteurs de soins et une formule combinant exemption de base et plafonnement de la cotisation, exigible lors de la déclaration fiscale annuelle. J’entends déjà le murmure des étatistes à tous crins et des idéologues désincarnés.

Les praticiennes libérales sont des professionnelles autonomes et indépendantes du réseau public dans leur démarche clinique, soumises à la libre concurrence du marché et à la vigilance d’un ordre professionnel indépendant du Collège des médecins du Québec. Leur formation universitaire ne devrait pas dépasser trois ans, en espérant en former environ 2000 au cours des cinq prochaines années. Cette proposition, audacieuse à certains égards, pemettrait d’alléger le fardeau des médecins généralistes, devenus les boucs émissaires des dérives autoritaires inquiétantes de l’ancien ministre de la Santé Gaétan Barrette et maintenant du premier ministre François Legault.

Multiplier les prescripteurs et dissocier la prescription d’examens paracliniques d’une pratique fondée sur la primauté de la clinique et selon les règles de l’art est une très mauvaise idée.«Mort de la clinique: le grand déséquilibre», titrait La Nouvelle Presse médicale dans un éditorial en 1979… C’est plus que jamais d’actualité.

Ce qui est gratuit est nécessairement rationné. Des humains meurent parce qu’un cancer est diagnostiqué à un stade trop avancé. Il faut croire que les politicos ont fait leur le dicton selon lequel «quand c’est bon, c’est jamais trop long»… Peut-on espérer voir une nouvelle classe politique courageuse et déterminée à «franchir le Rubicon»? Faudra-t-il boire le calice de cette soupe idéologique jusqu’à la lie et se remémorer les mots du poète Claude Péloquin gravés dans le béton de la murale du sculpteur Jordi Bonet en 1971 dans le hall d’entrée du Grand Théâtre de Québec? Pourrons-nous de nouveau fredonner la chanson de Renée Claude?

Pierre Duclos est aussi diplômé de l’École des Hautes études commerciales à Montréal (HEC). Il est aussi membre depuis 28 ans du c.a. d’un organisme communautaire en déficience intellectuelle.

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