Un miracle grec à l’OSQ

Le jeune chef grec Dionysis Grammenos était au podium aux côtés de l’excellent violoniste Kerson Leong.

CRITIQUE / Les sympathiques concerts du dimanche après-midi de l’Orchestre symphonique de Québec étaient de retour en fin de semaine. Le jeune chef grec Dionysis Grammenos était au podium aux côtés de l’excellent violoniste Kerson Leong.


Comme d’habitude pour ce genre de concerts, le public – une demi-salle environ – n’est pas celui des grands soirs (on pense aux Carmina Burana, présentées tout récemment à guichets fermés). Mais sa jeunesse et son enthousiasme (applaudissements fréquents entre les mouvements) compensent amplement.

Ceux qui avaient acheté leur billet plus tôt cet automne s’attendaient peut-être à voir sur scène le chef Jordan de Souza, qui a toutefois dû annuler sa venue pour des raisons familiales. Finaliste à la succession de Fabien Gabel, il reste cependant dans la course, comme nous l’a confirmé l’OSQ.

Le programme, lui, était inchangé. Notamment la Symphonie espagnole de Lalo, qui mettait en vedette le soliste de la soirée. On ne s’ennuie jamais lors des prestations de Kerson Leong, qui se donne entièrement chaque fois, même dans des œuvres relativement superficielles comme celle-ci.

Le musicien joue à fond l’aspect romantique de la partition, avec un archet qui mord à fond dans la corde et des aigus brillants. Dommage qu’il ne nous ait pas offert de rappel.

Le jeune chef grec Dionysis Grammenos était au podium aux côtés de l’excellent violoniste Kerson Leong.

Si le musicien d’Ottawa n’est plus une découverte, lui qui se produit fréquemment sur différentes scènes québécoises, il en était autrement de Dionysis Grammenos, qui faisait dimanche ses débuts canadiens.

Né il y a 33 ans sur l’île de Corfou, il s’est d’abord distingué comme clarinettiste (il a même enregistré un disque comme soliste chez Naïve), avant de pousser plus à fond la direction d’orchestre, notamment avec des valeurs sûres comme Bernard Haitink, David Zinman et Patrick Summers.

Dès le Prélude à l’après-midi d’un faune de Debussy, le chef se distingue par un geste lent mais précis, économe, laissant tranquillement se dérouler les différentes lignes de l’orchestre.

Au retour de la pause figurait au programme le Ringelspiel de la sympathique compositrice montréalaise Ana Sokolovic, qui est venue présenter elle-même sa partition datée 2013, ce qui nous a momentanément épargné l’ineffable communicateur engagé par l’orchestre pour les concerts du dimanche…

Inspirée des manèges de son enfance («Ringelspiel» signifie «carrousel» en allemand), l’œuvre d’une quinzaine de minute épousait une forme en arche. L’écriture dissonante, presque bruitiste par moment (on entend le manège se mettre lentement en marche), porte parfois en filigrane d’authentiques mélodies de foire.

Grammenos y a été impeccable, tout comme dans le plat de résistance orchestral, la suite de L’oiseau de feu de 1919 de Stravinsky. Le musicien nous fait entendre des couleurs absolument inouïes dans les premières mesures de la partition, mais également dans la Berceuse. L’interprétation, d’une grande souplesse, pourrait peut-être sembler un tantinet trop romantique aux oreilles de certains, mais il est vrai que l’œuvre a encore un gros pied dans le XIXe siècle.

Ce garçon est probablement voué à de grandes choses. Espérons le revoir rapidement sur la même scène.