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Les administrations Lehouillier et Marchand disent vouloir mieux connecter leurs réseaux et intégrer leurs tarifs.

Une bonne idée.

Tellement bonne que cela fait 25 ans qu'on en parle.

Depuis, la marmotte va et revient, hume l'air puis replonge dans le tunnel des ambitions déçues.

La voici à nouveau.

Québec et Lévis ont déposé en juillet un nouveau scénario sur la table du ministère des Transports (MTQ).

Elles souhaitent augmenter les fréquences interrives et réduire le prix des liaisons entre la STLévis et le RTC.

On veut faciliter la traversée en autobus à l'approche des travaux du tramway, des tabliers des ponts et des échangeurs de la tête des ponts.

Si la congestion devient trop lourde, les citoyens pourront choisir l’auto ou l’autobus.

Ce fut «l'élément déclencheur», rapporte le maire Gilles Lehouillier.

Ça, et l'élection de Bruno Marchand à la mairie de Québec, dit-il.

Avec M.Labeaume, ça aurait été impossible.

Le plan déposé au MTQ se décline comme suit:

1- Les autobus de Lévis cesseront de desservir le centre-ville de Québec et de revenir à vide sur la Rive-Sud. Ils s'arrêteront à l'Université Laval. Les passagers en route vers la colline parlementaire devront poursuivre dans les Métrobus du RTC.

2- Les 10 000 heures annuelles que la STLévis prévoit «économiser» sur la rive nord serviront à bonifier le service sur la rive sud. La fréquence des départs vers la rive nord sera augmentée.

Avant la pandémie, 3000 citoyens de Lévis prenaient chaque jour l'autobus pour la rive nord et pour revenir le soir.

3- Les villes prévoient réduire de 144 $ à 105 $ le coût du laissez-passer métropolitain mensuel. Celui-ci donne accès aux autobus des deux réseaux.

Une baisse des prix avait été testée lors des travaux au pont Pierre-Laporte à l'été 2001.

Le MTQ redoutait alors une congestion catastrophe et le transport en commun allait permettre d'en limiter les impacts.

La catastrophe n'a finalement jamais eu lieu et l'impact sur le transport en commun fut modeste. La STLévis a rapporté avoir vendu 150 laissez-passer métropolitains de plus que les 600 habituels. Une hausse de 25 % quand même.

4- Les villes demandent au MTQ d'assumer les coûts de la «nouvelle» connexion interrives. Cela inclut les manques à gagner résultant de la baisse du tarif métropolitain.

Le RTC a estimé sa facture à 900 000 $ par an. La STLévis n'a pas voulu préciser ce qu'elle demande au MTQ.

5- Le scénario d'un pôle d'échange à l'Université Laval sera mis en œuvre dans un an, à l'automne 2023.

Impossible d'aller plus vite à cause des contrats déjà signés par la STLévis avec des établissements scolaires de la rive nord.

6- Lors de la mise en service du tramway, les autobus de Lévis n'iront plus à l'Université et s'arrêteront au pôle d'échange à l'angle de Hochelaga/de l'Église.

L'économie pour la STLévis passera alors à 27 000 heures par année. Toutes serviront aussi à améliorer l'offre de transport à Lévis.

***

Bonne idée de vouloir réduire le prix du laissez-passer métropolitain. Mais ce qui serait encore mieux, ce serait un tarif unique partout sur le territoire du RTC, de la STLévis et des MRC Jacques-Cartier et Côte-de-Beaupré.

Pour convertir des citoyens au transport en commun, il faut que ce soit simple, souple et abordable.

Quitte à ce que les pouvoirs publics (nous tous donc) paient davantage. Ce sera toujours moins cher que de construire de nouvelles autoroutes. Mais tous n'ont pas les mêmes priorités et volontés politiques.

Le coût du passage en autobus a son importance, mais le principal facteur incitatif reste la pertinence du service offert.

Il faut répondre aux besoins, prouver la fiabilité et mener là où les gens veulent aller. Il faut un avantage concurrentiel avec l'auto. La battre de vitesse ou échapper au trafic, par exemple.

Sinon, c'est inutile. On ne réussira pas de conversions. Même en offrant l'autobus gratis.

La STLévis vise à uniformiser un jour les tarifs sur tout le territoire métropolitain de Québec, rapporte son directeur général Jean-François Carrier.

Lors de la course à la mairie de Québec, Bruno Marchand a aussi prôné une intégration des tarifs pour tous les transports collectifs et actifs: tramway, autobus, vélo partage, flexibus, etc.

Il veut que ce soit simple et facile.

Il n'y a que le MTQ qui ne semble pas l'avoir compris encore et continue de se faire tirer l'oreille.

***

Le jour de la marmotte, disais-je.

J'ai écrit mes premiers textes sur les services d'autobus interrives au milieu des années 90. Mars 1996, par exemple.

On annonce ce jour-là une gare d'échange au sud du pont de Québec où les autobus de la rive nord viendront chercher les voyageurs de la rive sud.

L'entente prévoit une tarification unique donnant accès aux autobus des deux rives.

L'amélioration du service va aider à réduire la circulation sur les ponts aux heures de pointe, se réjouit-on déjà.

Ne manque que l'accord (et l'argent) du ministère des Transports.

Trois ans plus tard, les élus s'impatientent.

«C'est très frustrant et ça traîne trop», déplore le président de la STCUQ (aujourd'hui RTC) M.Claude Cantin.

Juin 2000, le ministre délégué aux transports renvoie le projet sur les planches à dessin où il s'enlise. Depuis, un seul progrès concret: l'ajout en 2003 d'un tarif d'autobus métropolitain. Mieux que de payer le plein tarif des deux sociétés de transport, mais loin de l'objectif d'un tarif unique pour les deux rives.

Au début des années 2010, on sent que la volonté revient. C’est l'époque où les maires Lehouillier et Labeaume s’entendent comme larrons en foire.

Il en résulte un excellent plan de mobilité durable avec un tramway qui traverse le fleuve par le pont de Québec.

Faute de financement, le projet sera converti en SRB (Service rapide par bus), puis abandonné.

Le ministère des Transports (MTQ) travaille actuellement à une nouvelle connexion interrives. C'est une des composantes du futur Réseau Express de la Capitale (REC) avec le tramway, le troisième lien et les corridors réservés sur les autoroutes.

Il est prévu qu’au sortir du pont de Québec, les autobus de Lévis rouleront en voie réservée puis en tunnel sous Laurier vers le au pôle d'échange du tramway.

Bien, mais «pourquoi attendre le tramway?», demande M.Lehouillier.

Le maire de Lévis croit possible d’aller plus vite et d'améliorer la traversée en autobus dès l'automne 2023.Il a bien raison.

***

Malgré le télétravail qui réduit les déplacements vers la cité Desjardins et la colline parlementaire, la STLévis a enregistré en septembre 2022 un sommet historique de 392 000 passages.

Hausse de 10 % par rapport au record de l'automne 2019.

La pandémie a depuis plombé l'achalandage de toutes les sociétés de transports. Mais pourquoi un effet contraire à Lévis de celui observé ailleurs?

Explication la plus probable: l'augmentation de la population.

Lévis a gagné 4700 citoyens depuis 2020, dont une bonne proportion de familles et de travailleurs qui se déplacent.

Le jour où son offre de transport en commun s’améliorera, la fréquentation atteindra de nouveaux sommets.

***

De beaux projets et de belles ambitions. Mais en attendant, on stagne au même point qu'il y a 25 ans.

Les villes mettent un projet sur la table. Le même ou à peu près qu'à l'époque et pour les mêmes raisons. Puis attendent que le gouvernement les aide à payer.

La différence est qu’on sent aujourd'hui une vraie volonté politique, assure le maire Lehouillier.

Je veux bien le croire, mais il me reste un doute.

Cette assurance, je l'ai souvent entendue. Les élus des années 90 et ceux d'après parlaient aussi de volonté politique, convaincus de tenir eux aussi le bon moment.

Résultat, rien.

Un quart de siècle de «volontés» et «d'efforts» publics et Québec n’est toujours pas foutu d'attacher un tarif d'autobus unique sur les deux rives.

C'en est gênant. Une caricature.

Et voici qu'on s'apprête à mettre 10 milliards $ pour que l'autre marmotte des projets interrives puisse traverser sous le fleuve en autoroute. C’est à désespérer parfois.

Prix des laissez-passer mensuels

RTC : 91.95 $
RTLévis : 96.49 $
MRC Jacques-Cartier : 91.00 $
MRC Beaupré et Ile d'Orléans : 100.00 $*
Métropolitain : 144.25 $

*gratuit en 2022 pour Côte de Beaupré

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