Charles-Antoine Gosselin : Lâcher prise 201 [VIDÉOS]

Après son album <em>Bleu soleil</em> (2017), qui l’a conforté dans son choix de se lancer en solo, Charles-Antoine Gosselin vient de lancer son deuxième album, <em>Un graffiti sur le mur du son,</em> le 21 octobre.

Des trucs pour affronter les doutes et oser une carrière solo, Charles-Antoine Gosselin en a développé plusieurs. Et pas des plus reposants, parfois. Des exemples? Déposer sa candidature au concours Les Francouvertes ou aux FrancoFolies... en sachant très bien qu’il n’avait pas assez de chansons en poche pour donner une prestation.  


Cette façon de faire, de s’imposer ainsi des échéances pour ne pas avoir le choix d’écrire, a eu du bon : Bleu soleil (2017), l’opus 1 de l’ancien chanteur du groupe sherbrookois Harvest Breed, a reçu des critiques élogieuses et le musicien s’est retrouvé avec un agenda de presque 80 spectacles. 

Mais pour son deuxième album, qu’il a coréalisé et à nouveau produit, Charles-Antoine a eu envie de créer un peu moins sous tension.

«Avec le recul, je trouve que ça n’a même pas de bon sens de m’être mis cette pression-là. Au fil du temps, j’ai affiné ma méthode de travail. Aujourd’hui, je suis plus dans le plaisir. En fait, cette fois-ci, j’ai créé des chansons juste pour créer des chansons. Je n’avais même pas comme objectif de faire d’album», résume celui qui vient de lancer Un graffiti sur le mur du son.

L’élément déclencheur de cette façon plus zen de composer et d’écrire, c’est la lecture de La guerre de l’art (The War of Art) de Stephen Pressfield. L’auteur américain y identifie toutes les barrières, souvent intérieures, qui empêchent les artistes, mais aussi entrepreneurs, athlètes, etc., de laisser libre cours à leur créativité.

«Il fait le tour de tout ce qui t’empêche de t’asseoir avec ton crayon, ou de poursuivre une fois que tu as commencé, résume-t-il. Par exemple, moi, j’étais un spécialiste de l’autocensure : j’écrivais une ligne et je la trouvais tout de suite mauvaise. Mais quand tu comprends que c’est un passage obligé, que ce sera toujours comme ça, tu apprends à vivre avec et à reconnaître la résistance quand elle arrive. Ça m’a vraiment réveillé. C’était ensuite beaucoup plus agréable de créer. Et je savais assez vite si j’avais entre les mains un simple exercice de style ou une chanson avec du potentiel pour un disque.»



Un graffiti sur le mur du son  - Folk francOCharles-Antoine Gosselin

La devise de tout respecter

En fait, on se rend compte, en découvrant les nouvelles chansons de Charles-Antoine, que, dans la lignée du précédent disque et du livre de Pressfield, on n’est encore jamais bien loin d’un discours rassurant à propos de toutes les incertitudes de la vie. Il est souvent question de lâcher prise, d’avoir confiance que le meilleur est à venir, de s’aventurer sans crainte sur des territoires inconnus et de sortir de sa zone de confort.

Par exemple, impossible de ne pas penser, en écoutant les paroles de la nouvelle chanson Je laisse la mer me guider — «l’imprévu est un rendez-vous avec l’essentiel» — à une autre de Bleu soleil, Les moments de dérive : «Les moments de dérive s’avèrent être les meilleurs.» 

«Le plus drôle, c’est que, lorsque j’écrivais, je ne me rendais pas compte de la ressemblance des thèmes, raconte Charles-Antoine en riant. Ce sont les autres qui me le faisaient remarquer, la plupart du temps. Mais je n’avais pas envie de scraper une toune — surtout quand je la trouvais bonne! — juste parce que j’avais déjà parlé de ça. Ma devise, c’était de respecter tout ce qui venait.»

Pour celui qui a longtemps douté de sa place comme auteur-compositeur (le succès de Bleu soleil l’a conforté dans son choix) et avait tendance à voir souvent le verre à moitié vide, on soupçonnait presque, au début, une forme de thérapie par la création. 

«La différence, c’est que, sur Bleu soleil, je m’adressais beaucoup à moi-même, par souci non pas de me convaincre (je suis assez convaincu de tout ça), mais de me le rappeler. Maintenant, j’ai davantage le sentiment de vouloir partager. J’ai l’impression que ce disque-là s’adresse plus aux autres, je suis moins dans ma tête.»

«Sur <em>Bleu soleil</em>, je m’adressais beaucoup à moi-même [...]. Maintenant, j’ai davantage le sentiment de vouloir partager. J’ai l’impression que ce disque-là s’adresse plus aux autres, je suis moins dans ma tête.»

Attendre un petit train

On acquiesce lorsqu’on découvre notamment le texte de Petit train : «Je t’espère en secret / On s’est jamais vus / T’es une partie de nous / Qui n’a jamais vécu [...] / Ta mère à la maison / Ne sait pas où je suis.» 

L’auditeur détectera assez vite une lettre à un enfant attendu mais qui n’arrive pas, et surtout, un propos très souvent tabou chez les hommes.

«Ça a été extrêmement difficile à écrire et à aborder pour moi. Cette chanson, c’est vraiment le plus loin que j’ai pu aller, le plus que j’étais capable de donner», confie-t-il à propos de ce sujet sensible qui l’émeut profondément.

Ce n’est pas non plus un thème facile qu’il aborde dans La pluie, ta peine, l’amour, un duo avec Caroline Savoie. «La pluie ne semble pas savoir / Quand les rues sont assez nettoyées / Quand c’est le temps de s’arrêter / De laisser sécher les trottoirs / Céder la place au soleil.»

«C’est un bel exemple de texte que j’ai failli jeter dès le début. Je trouvais ça trop simple, limite quétaine. Mais je me suis mis au défi d’aller jusqu’au bout et, aujourd’hui, je l’assume totalement. Je découvre qu’elle est plus profonde que je pensais.»

«J’ai beaucoup écouté l’album de Barry Gibbs et Barbra Streisand, Guilty. C’est un peu kitch mais tellement bon, et évidemment plein de duos. C’est là que je me suis dit qu’on n’en entendait plus souvent. J’ai pensé à Caroline en premier. On s’est connu au Festival de la chanson de Granby, on était là la même année. Mon frère est d’ailleurs son guitariste. Je savais non seulement qu’elle avait une méchante voix, mais que ça se ferait dans le plaisir.»