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Dans un monde idéal, on préférerait un ministre élu sur le territoire «naturel» de la capitale, celui de la ville de Québec.

Cela n’a rien à voir avec la personne de M. Drainville qui a le profil de l’emploi. Et certainement toute l’ambition qu’il faut.

Rien non plus contre Lévis ou la Rive-Sud.

Ce qui dérange, c’est le symbole, c’est la rupture avec une tradition et surtout, le risque de conflit d’intérêts ou d’apparence de conflits.

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On sait que sa relation avec le maire de Québec, Bruno Marchand, n'est pas au beau fixe et la possibilité d'embellie à court terme semble limitée. Elle préfère donc passer le relais à quelqu'un d'autre.

Les dossiers du tramway et du troisième lien ont causé plusieurs frictions dans la dernière année entre l'administration municipale du nouveau maire Marchand et le gouvernement québécois représenté depuis quatre ans par M^me Guilbault à Québec.

Malgré des différends sur l'implantation de rues partagées au centre-ville et pour la concrétisation de la phase 4 de la Promenade Samuel-de Champlain à l'est de Québec, le maire Bruno Marchand assure qu'il s'entendait bien avec la ministre responsable de la Capitale-Nationale.

Il rejette l'idée voulant qu'il existait des tensions entre M^me Guilbault et lui. «Le maire de Québec, son travail, c'est de défendre la ville [...] en fonction des intérêts de la Ville. Le gouvernement a les siens et il faut les faire converger», s'est-il expliqué.

«Ce n'est pas parce qu'on n'a pas les mêmes visions, qu'on n'a pas toujours les mêmes idées, qu'on n'a pas toujours les mêmes intérêts, qu'on n'est pas capable de se parler», a-t-il commenté mercredi, en marge d'une conférence de presse.

Elle-même réélue haut la main dans la circonscription de Louis-Hébert, M^me Guilbault a aussi demandé au premier ministre de ne plus l’affecter au ministère de la Sécurité publique, secteur dont elle estime avoir fait le tour.

Ces demandes de M^me Guilbault ne datent pas des derniers jours, mais de quelques semaines.

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Ces informations ont été confirmées au Soleil par une source près du dossier.

«Elle a le goût d'autres défis, je respecte ça», ajoute M. Marchand, disant avoir eu l'assurance de la députée de Louis-Hébert que «peu importe la décision du premier ministre, elle va travailler avec l'idée de faire valoir la région. Elle a donné le mieux qu'elle pouvait et je la remercie de ce qu'elle a fait.»

Quel successeur?

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Cela ouvre la porte à la nomination d'un nouveau ministre des deux régions, Capitale-Nationale et Chaudière-Appalaches, ce que les caquistes se plaisent à appeler «la deuxième métropole».

L’élection lundi de deux candidats vedettes sur la Rive-Sud, Bernard Drainville dans Lévis et Martine Biron dans Chutes-de-la-Chaudière, pourrait répondre à cette nouvelle approche. M. Drainville a admis mardi en entrevue à la radio qu'il aimerait redevenir membre du Conseil des ministres, lui qui a été ministre du Parti québécois sous Pauline Marois, de 2012 à 2014.

Le maire de Québec a déjà dit mardi qu'il n'aurait pas de problème à travailler avec un élu de l'autre côté du fleuve, si le premier ministre en décidait ainsi. «C'est la prérogative du premier ministre. Ce qu'on veut, c'est quelqu'un qui défende la région», a-t-il réitéré.

En ce sens, questionné à savoir si le ministre sortant Jonatan Julien pourrait être un bon candidat, M. Marchand répond qu'il «espère qu'il va faire partie de la courte liste qui va être observée sur qui devrait être ministre de la Capitale-Nationale». «Si c'est Bernard Drainville, je vais très bien travailler avec lui aussi», a-t-il poursuivi, pressé de questions par les journalistes.

M. Legault devrait annoncer la composition de son nouveau Conseil des ministres dans deux semaines, dans la semaine du 16 octobre.

Et le maire Marchand lui laisse le champ libre. «On a juste dit qu'on avait grand intérêt à trouver des terrains communs d'entente, parce qu'on avait la même ambition pour Québec», exprime-t-il.

Lundi, la Coalition avenir Québec a été réélue avec 90 députés, le mandat le plus fort donné à un gouvernement au Québec depuis plus de 30 ans.

QS préfère deux ministres

Québec solidaire reste le seul autre parti provincial à avoir des élus dans les régions de la Capitale-Nationale et de Chaudière-Appalaches. Lundi, les solidaires ont conservé les deux sièges qu'ils détenaient depuis quatre ans.

Nouveau député de la circonscription de Taschereau, au centre-ville de Québec, Étienne Grandmont ne croit pas à l'idée d'unir les deux régions sous l'égide d'un même ministre.

«Ça fait une grande région, des réalités complètement différentes. J’ai travaillé comme directeur général chez Accès transports viables et on couvrait les deux régions. C’est deux réalités très, très, très différentes. [...] Ça me semble beaucoup considérant que c’est très hétérogène. Si ce ministre n’a que cette responsabilité-là, peut-être. Mais j’ai de la misère à voir comment ça pourrait être mieux que ce qu’on a [comme modèle] actuellement», a commenté M. Grandmont, mercredi.

S'il refuse d'évaluer précisément le travail de la ministre Guilbault pour la région au cours des quatre dernières années, le solidaire Grandmont estime que le bilan des caquistes de la région s'avère mince.

«De manière générale, on n’a pas tant que ça avancé à Québec, dans les quatre dernières années. Le tramway a été ralenti. Le troisième lien, c’est le seul gros projet porteur dont on a entendu parler depuis quatre ans et on dirait que tout le reste n’était pas vraiment important. Le bilan dans la région n’est peut-être pas celui qu’autant de députés [au pouvoir] à Québec auraient pu amener», a-t-il affirmé.

À la blague, il propose plutôt son collègue solidaire et voisin de circonscription Sol Zanetti comme futur ministre responsable de la Capitale-Nationale. Rôle impossible pour un élu d'opposition.

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L’allégeance première d’un ministre ira toujours aux citoyens qui l’ont élu. S’il s’avérait, comme on peut le croire, que les intérêts de Québec et de Lévis ne soient pas les mêmes sur le 3^e lien, de quel côté pensez-vous, pencherait M. Drainville?

On peut rétorquer que le prochain (ou la prochaine) ministre de la Capitale-Nationale devra de toute façon défendre le projet de 3e lien. Peu importe sa rive et les convictions qu’il (ou elle) pouvait avoir.

L’adhésion au projet était un passage obligé pour une candidature de la CAQ dans la région. En théorie, il n’y aurait donc pas de conflits d’intérêts possibles.

Mais il en est autrement des perceptions.

En ce lendemain d’élection distordue, beaucoup de citoyens de Québec (et d’ailleurs) ont déjà le sentiment de ne pas être adéquatement représentés.

Quelle confiance leur restera-t-il dans le système s’ils perçoivent que «leur» ministre défend d’abord les intérêts de l’autre rive et du tunnel qui va sortir dans leur cour?

Dans un monde idéal, un gouvernement nommerait un ministre de la Capitale-Nationale élu sur la «bonne» rive. Et il en nommerait un autre pour Chaudière-Appalaches, ce qui éviterait toute ambiguïté.

C’est ce que ferait le gouvernement, sauf s’il n’a pas le choix.

S’il s’avérait par exemple qu’il n’y a pas de candidatures satisfaisantes sur la Rive-Nord. Du moins, pas assez au goût du premier ministre.

C’est ce qu’il faudra conclure si M. Drainville devait être nommé à la Capitale-Nationale.

Une sorte de nomination par défaut.

On peut voir d’ici les égos blessés sur la Rive-Nord.

Des députés comprendront que «leur» premier ministre estime que personne n’a les aptitudes pour représenter la capitale au conseil des ministres.

Éric Duhaime va saliver à l’idée.

Le chef conservateur a prévenu qu’il tentera de débaucher un député de la CAQ pour se «gosser» un siège à l’Assemblée nationale.

Le député de la Peltrie, Éric Caire, pourrait devenir un candidat de choix.

Après un passage turbulent dans l’opposition, M.Caire a été un ministre bien discret depuis quatre ans.

M. Legault pourrait considérer avoir maintenant payé sa dette envers cet élu de l’ADQ de la première heure (2007) et ne plus rien lui devoir.

S’il faut faire de la place pour de nouveaux venus de la région au conseil des ministres, M. Caire est le premier nom qui vient à l’esprit.

La place de Jonatan Julien au Conseil des ministres semble moins menacée. M.Julien n’a pas démérité. On ne l’a cependant jamais perçu comme un leader régional en réserve de la république, derrière Geneviève Guilbault.

Sa nomination n’est pas impossible, mais soulèverait peu d’enthousiasme.

M. Legault pourrait-il confier le mandat à un autre député qui ne serait pas un «vrai» ministre avec portefeuille. La députée de Jean-Talon Joëlle Boutin, par exemple.

Cela s’est déjà vu dans le gouvernement de Bernard Landry, mais le résultat fut mitigé.

Plusieurs qualités et conditions sont nécessaires pour devenir un ministre de la Capitale-Nationale efficace et influent. Ce sont les mêmes pour toutes les régions:

- Son réseau d’amitiés et ses relations au sein du conseil des ministres.

- La nature du ministère qu’on détient. Un ministre des Transports trouvera plus facilement des «amis» qu’un ministre du Travail qui n’a pas de projets locaux à autoriser. Cela donne du «poids» et peut aider, le temps venu, à faire avancer les projets de la capitale.

- L’accès au premier ministre et l’intérêt de celui-ci pour la capitale. Jean Charest en avait beaucoup. D’autres en ont eu moins.

M. Legault semble en avoir désormais beaucoup d’intérêt pour la «deuxième métropole» du Québec. Peut-être parce qu’il n’arrive pas vraiment à percer dans la première métropole. Cela pourrait aider le prochain titulaire du poste à Québec.

- Ses bonnes relations avec les élus et acteurs locaux.

- Sa connaissance des dossiers.

Sam Hamad, qui fut ministre de la Capitale à trois reprises dans les gouvernements libéraux, cochait plusieurs de ses cases.

M^me Guilbault, beaucoup moins. Notamment celle des bonnes relations avec les élus locaux de la rive nord.

***

Parlant de lui, le maire Bruno Marchand dit ne pas se formaliser que le prochain ministre de la région provienne de la Rive-Sud ou de la Rive-Nord.

Pour autant, dit-il, que cette personne ait «du chien», la «capacité de collaborer», de «l’ambition» et la «capacité de défendre cette ambition».

Pour le chien et l’ambition, Bernard Drainville ne donne pas sa place. Pour la capacité de collaborer, la démonstration reste à faire. J’entends des avis partagés.

Après un hiver par moments rocailleux avec le gouvernement Legault, le maire Marchand souhaite aujourd’hui poser en «collaborateur».

Il n’a pas renoncé à ses questions et réticences sur le 3e lien. Il veut cependant prendre le temps de bien analyser le résultat électoral et sa portée sur le projet.

La mairie croit qu’il y a d’autres façons de se faire entendre que de taper sur la table, comme le faisait Régis Labeaume, avec un succès variable.

Le chef de l’opposition à l’hôtel de ville, Claude Villeneuve, y voit un «manque de combativité» du maire Marchand et une «perte d’influence de la ville».

«Des fois, c'est le maire que j'aimerais qu'il ait plus de chien», dit-il.

C’est de bonne guerre.

M. Villeneuve avait annoncé l’hiver dernier qu’il se démarquerait du maire Marchand par son ton plus mordant avec le gouvernement. Il suit son plan de match.

***

On peut souhaiter que le prochain ministre de la Capitale-Nationale ait toutes les qualités du monde. Et qu’en prime il soit de la rive nord.

Mais ce qui pourrait avoir un impact bien plus significatif, c’est le choix des prochains ministres des Transports et des Affaires municipales.

C’est dans ces ministères que se débattent les grands enjeux de mobilité et d’aménagement du sol. Et d’où pourraient venir des enfarges au projet de 3^elien.

Y verra-t-on des ministres «poids lourds», capables de changer le cours des choses et de l’histoire?

Des ministres inspirés qui voudront ralentir l’étalement urbain et développer le transport en commun plutôt que des autoroutes?

Des ministres avec du chien et de l’ambition. Pas seulement celle de devenir calife à la place du calife.

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