«Je suis un collectionneur depuis l’enfance. J’avais 13 ans quand j’ai commencé avec Captain America, puis je me suis mis aux clés et aux serrures quand j’ai commencé à travailler», explique Bruno Robitaille, qui a lancé sa carrière de maître serrurier il y a presque 30 ans à Repentigny.
En parallèle de son métier de maître serrurier, il enseigne la serrurerie au Centre de formation de La Prairie, et se sert de son impressionnante collection pour enrichir ses cours en racontant l’histoire de certaines pièces et de leur création.
Au fil des ans, il a accumulé près de 30 000 pièces de serrurerie en tout genre — l’une des plus importantes collections au Canada — allant des clés les plus basiques aux mécanismes de coffres les plus complexes, qu’il est venu présenter récemment au Salon annuel des grands collectionneurs du Québec en tant qu’exposant invité.
Fragments d’histoire
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Parmi les pièces maîtresses, on retrouve certaines des premières clés et serrures du Château Frontenac, telles qu’on pouvait les voir dans les couloirs de l’établissement au début du 20e siècle, ou encore un coffre de Nuremberg. Ce type de coffre, apparu au Moyen-Âge et le plus souvent réservé à la noblesse en raison de son coût pharaonique, basait sa fiabilité à toute épreuve sur un mécanisme en fer forgé complexe.
D’autres pièces sont directement rattachées à des pans d’histoire bien spécifique, comme le mécanisme de coffre-fort de la première Banque du Québec.
Bruno Robitaille ne cache pas non plus sa passion pour les clés et les serrures de prison. Il possède quelques exemplaires de verrous de la première prison de Québec, mais aussi des serrures du pénitencier d’Alcatraz, dans la baie de San Francisco. «Ce ne sont pas des fakes, assure-t-il. Après l’évasion de Frank Morris, en 1962, un directeur par intérim a été nommé. La prison a fermé un an plus tard et il est parti avec trois serrures, qu’il a léguées à sa petite-fille. Je les lui ai achetées directement.»
Une petite communauté
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Pour se procurer de nouvelles pièces, c’est principalement sur Internet que ça se passe, à travers différentes communautés de collectionneurs. «On a des sites spécialisés pour des collectionneurs, sur lesquels on se donne de l’information», explique M. Robitaille. Très à l’affût dès que quelque chose de nouveau apparaît sur le marché, il achète aussi certaines pièces sur eBay.
Les collectionneurs de clés et de serrures ne courent pas les rues au Québec. «On est quelques dizaines de passionnés. On forme une très petite communauté», remarque M. Robitaille. Selon lui, l’histoire des différentes techniques de forge, de pliage, reste largement méconnue des néophytes. «Le monde ne connaît pas et ne s’y intéresse pas.»
Projet de musée
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À plus long terme, son ambition serait d’ouvrir un musée de la serrurerie, pour mettre en valeur les pièces qu’il a mis une vie à collecter. «Je ne compte pas le faire dans les prochaines années, car je me plais comme serrurier et enseignant. Je sais que ce ne sera pas rentable, mais je veux le faire.»
Le projet est déjà mûrement réfléchi. «Il y a énormément d’églises qui ferment aux quatre coins du Québec. J’aimerais en acheter une, pour habiter dans le presbytère et transformer la nef en musée.» L’objectif serait de préserver l’église telle quelle, pour qu’elle puisse quand même servir au besoin pour des offices religieux, tout en permettant au grand public de venir découvrir la grande et les petites histoires que cachent toutes ces clés.
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LES GRANDS COLLECTIONNEURS À L'HONNEUR
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Collectionneurs de monnaies, de jouets anciens, de billets de Loto-Québec, de cartes postales et autres avaient rendez-vous au Salon annuel des grands collectionneurs, qui se déroulait à Québec les 24 et 25 septembre.
«Entre samedi et dimanche, on a accueilli 350 personnes», estime Louise Laplante, qui édite le petit journal de l’association. Un soulagement pour ce rendez-vous qui a connu des moments difficiles ces deux dernières années avec les restrictions liées à la pandémie.
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Malgré cela, le rassemblement qui existe depuis près de 40 ans est assez loin des belles heures de ses débuts. «Dans les années 80 et 90, on accueillait beaucoup plus de monde», se remémore Mme Laplante. Selon elle, ce sont surtout des passionnés qui viennent jeter un œil, et les curieux sont de moins en moins présents.
Outre l’exposant invité Bruno Robitaille, venu présenter sa collection de clés et de serrures, il y en avait pour tous les goûts et tous les centres d’intérêt dans les allées du salon. Autant d’occasions d’en apprendre plus sur des objets qu’on ne penserait pas forcément à collectionner. «J’aime l’histoire et j’en ai beaucoup appris, c’est toujours un événement riche en enseignements», explique Louise Laplante. Son seul regret? Ne pas avoir beaucoup de jeunes dans «cette belle communauté qui s’entraide».