Il ne manquait que des numéros de danse pour que ce théâtre-musical deviennent carrément une comédie musicale : les deux tiers du texte y est chanté.
Les comédiens s’en tirent bien au niveau du chant. Les moments boiteux sont camouflés par l’humour, mais on a droit à quelques performances vocales plutôt impressionnantes de la part de Pierre-Olivier Grondin et Frédérique Cyr-Deschênes, qui incarnent les fameux jumeaux de Nouvelle-Arcadie, Petit Frère et Grande Sœur.
Au-delà du chant, c’est la musique in situ composée par Jean-François Mallet qu’on apprécie particulièrement. Les membres de l’Orchestre Tutta Musica – David Scott (clarinettes), Brian McAuley (trompettes et euphonium), Andrés Romero (violon), Katie Bestvater (violoncelle) et Carmen Armao (violoncelle) – sont la force de cette œuvre superbement mise en scène par Philippe Soldevila, mais dont l’histoire est un brin prévisible.
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Tout de même, celle-ci met effacement en évidence le faussé béant qui sépare les riches et puissants du commun des mortels.
«Votre vrai, c’est notre faux et votre faux, c’est notre vrai», dit le personnage de Sibling à Petit Frère au sujet de l’alcool d’abord, puis concernant la perception de la réalité.
La Nouvelle-Arcadie est un royaume futuriste menacé par une crise environnementale où une monarchie coexiste avec un parlement. La poésie est interdite et seule la musique officielle est tolérée.
À la naissance des jumeaux, le roi et la reine sont bien embêtés à savoir qui héritera de la couronne. Jusqu’à leurs 25 ans, les deux enfants sont éduqués exactement de la même manière, mais Petit Frère ne veut pas devenir roi, alors que Grande Sœur le désire ardemment.
Quand le roi décède, Petit Frère décide de quitter le palais et part à la rencontre du peuple. Il atterrit dans une espèce de Cour des miracles, un bar des bas quartiers où se tiennent notamment des citoyens rebelles et marginalisés.
Claire Normand est fort divertissante dans ses rôles de Reine et de Géstring. La comédienne jongle habilement entre l’accent de la reine du Nord et le franc parlé de la tenancière du trou.
Bruno Marquis incarne à la fois le Roi et Sibling, un vagabond avec qui Petit Frère, Géstring et Ixe (Marie-Pier Chamberland) fuiront le royaume à la recherche d’un paradis perdu…
Pendant ce temps, Grande Sœur tente de rendre légitime son pouvoir en Nouvelle-Arcadie. Son nom n’est pas sans rappeler l’expression Big Brother tiré du roman d’Orwell, 1984, qui est d’ailleurs une des suggestions de lecture du Périscope en amont de ce spectacle.
La monarchie de Nouvelle-Arcadie dispose aussi de «chaméras» pour espionner et diffuser des messages dans le royaume. Ces robots sont représentés par des marionnettes manipulées à tour de rôle par les acteurs. Chacun leur tour, ils prêtent aussi leur voix à l’arbre narrateur de cette fable.
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L’univers marionnettique conçu par Pierre Robitaille et Mylène Gagné-Leboeuf est visuellement très plaisant et accentue le côté ludique de cette fable d'une durée de 2h45.
La pièce centrale du décor, une structure circulaire ingénieusement conçue et utilisée, contribue à l’esthétique futuriste de ce conte tragicomique.
Malgré les thèmes sérieux abordés, le comique l’emporte sur le tragique. Avec un personnage nommé Géstring, il fallait s’y attendre!
Les jumeaux d’Arcadie est présentée au Périscope jusqu’au 1er octobre.