{"accessibility":"METERED","authors":[{"description":{},"email":"scarmichael@lesoleil.com","imageUrl":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F76bd1061-6cd9-49ce-876b-0afdbc824681.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","name":"Simon Carmichael","source":"Le Soleil","twitter":"SimonCarmi"}],"channel":"Affaires","chapters":[{"position":0,"text":"

Lorsqu’on entre par la grande porte aux Galeries Gourmandes des Galeries de la Capitale, les premiers coups d'œil donnent un air de luxe. Grands arcs blancs, tables en bois et bar central au design épuré, avec une touche de bleu.

Toutefois, quelques pas suffisent pour constater que le projet de 16 M$ inauguré en octobre 2019 n’a pas eu le succès escompté.

Là où était il y a peu Ma Cabane en Gaspésie, une table. À la place du fleuriste, quelques jeux pour enfants. À droite, un peu passé le magasin Ricardo, un emplacement pratiquement neuf, mais vide. Devant, le charcutier le Pied Bleu affiche fermé. Une machine distributrice fait office de commis, «en attendant le retour».

À l’Atelier gourmand, on promettait une foule d’activités pour initier le public aux arts culinaires. «Il ne s’y passe presque plus rien depuis un bout», confie une commerçante. Pour participer à la prochaine activité programmée, il faudra attendre deux semaines, selon le calendrier officiel.

","type":"paragraph","contents":[],"photos":[]},{"caption":"D’un bout à l’autre des Galeries Gourmandes, des kiosques sont vacants.","contentType":"image","credits":"Collaboration spéciale, Simon Carmichael ","position":1,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2Ff4967e46-d33b-4135-bb26-87b285e721b8.JPG&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true","contents":[],"photos":[]},{"position":2,"text":"

Plus loin, un grand comptoir, autrefois occupé par Les Épices Kanel, désormais désert. L’administration du «marché» intégré aux Galeries de la Capitale tente tant bien que mal de camoufler ses espaces vacants, ici par un panneau, là par une poignée de tables, mais le départ des commerçants se ressent.

«Mon dieu que c’est vide», commente à voix haute une passante, alors que son mari porte deux gros sacs du magasin Simons. «C’est un peu triste, mais au moins c’est beau», ajoute celui-ci en se dirigeant vers la sortie.

Depuis l’ouverture des Galeries Gourmandes, au moins 13 des entreprises ont décidé de plier bagage ou ont fait faillite. Lors du passage du Soleil, jeudi, huit kiosques sur la vingtaine d’emplacements étaient ouverts.

«On nous a menti», dénoncent des commerçants

Parmi ceux qui ont quitté avant même la fin de leur bail, la poissonnerie Némeau et le kiosque Jos Otis Croustilles. Sans détour, le président des deux commerces, Alain Fillion, affirme qu’on «lui a raconté des menteries» pour l’encourager à s’engager dans les Galeries Gourmandes.

«On s’est basé sur des menteries pour investir 500 000 $», colère l’homme d'affaires derrière plusieurs entreprises alimentaires. «On nous a dit qu’il y avait une étude de marché qui avait été faite. Mais on a toujours refusé de nous la donner, et on a finalement appris que c'était basé sur l’achalandage d’un de leur centre à Toronto», accuse-t-il.

La compagnie Oxford, propriétaire des Galeries de la Capitale, réfute ces allégations. «Oxford a bien fait ses devoirs, affirme le directeur principal de l’expérience de la marque, Patrice Perron. Une étude régionale a été faite avec des chiffres régionaux.»

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On n’a pas fait un dixième des ventes qu’on nous a fait miroiter. Personne n'a fait ses chiffres.

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Selon lui, les exploitants ont présenté des statistiques d’achalandage prenant en compte tous les visiteurs de l’immense lot d’Oxford, plutôt que celles concernant la section où seraient les boutiques. «Tout le monde s’est fait avoir. C’est un projet mal ficelé, mal géré et où on n’a donné aucun support aux entreprises».

«Quand on a ouvert, ils ont fait faire une couronne de fleurs pour l’inauguration. Ça aurait dû être une couronne mortuaire», ironise-t-il, qualifiant les dirigeants d’Oxford de «tueurs de jeunes entrepreneurs».

Sans être aussi virulente que le propriétaire de la poissonnerie Némeau, Jessica Gauthier affirme aussi être l’une des victimes d’Oxford. Elle et son conjoint, Florent, ont décidé de se lancer en affaires dans l’enceinte des Galeries Gourmandes. Trois ans plus tard, la boucherie Florent & Fils est fermée, mais les dettes, elles, sont toujours bien présentes.

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«Ils nous ont écœurés jusqu’à la fin. Dans ma vie et comme entrepreneure, j’ai toujours foncé et je n’ai jamais rien regretté. Mais les Galeries Gourmandes, je l’ai énormément regretté. Et à cause de cette décision-là, on ne pourra plus jamais ouvrir une boucherie de toute notre vie.», témoigne-t-elle.

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«C’est une question de timing. L’ouverture a coïncidé avec le début de la pandémie, des fermetures et des refermetures», expliquait le directeur principal de l’expérience de la marque pour Oxford, Patrice Perron, dans le texte du Soleil rapportant le départ de plus de la moitié des commerçants des Galeries Gourmandes, lancées il y a trois ans à peine.

Toutefois, à la suite de la parution du texte du Soleil, les appels d’ex-commerçants des Galeries Gourmandes ont déboulé pour exposer une tout autre version des faits. Les entrepreneurs ont qualifié l’aventure de «catastrophe», de «fiasco», et de «grand mensonge», et ce, avec ou sans virus.

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«Blâmer la pandémie, c’est l’excuse facile», souffle le propriétaire de la poissonnerie Némeau et du kiosque Joe Otis Croustilles, Alain Fillion, exaspéré par l’argument du locateur. Pour lui, comme pour tous les locataires qui ont contacté Le Soleil, invoquer la pandémie ne tient pas du tout la route. «On n’a pas été rentable une seule journée. Même dans les premières semaines, on n’a jamais fait une cenne.»

Le propriétaire de Ma Cabane en Gaspésie, Gino Ouellet, abonde dans le même sens. «De novembre à janvier 2019, on a fait de 10 000$ à 12 000$ de vente par mois. Pendant ce temps-là, on faisait 150 000$ à Mont-Joli», indique l’homme d’affaires. «Pandémie ou pas, nos quatre autres boutiques vivaient de jolie façon. Pas celle des Galeries.»

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Même avant les fermetures, ça ne fonctionnait pas», lance. On s’était même rencontré pour en parler parce qu’on constatait que tous nos chiffres d’affaires chutaient. La pandémie n’a aidé personne, mais franchement, à la tangente que ça prenait, ça aurait fini au même résultat.

"},"type":"quote"},{"position":4,"text":{"fr":"

Si les propriétaires avec qui s’est entretenu Le Soleil posent tous des diagnostics différents sur les causes de l’échec du projet, une variable revient : le manque de support d’Oxford.

À de nombreuses reprises, des initiatives pour mousser la popularité des Galeries Gourmandes auraient été refusées, voire bloquées par l’administration des Galeries de la Capitale, selon les ex-commerçants. On aurait, par exemple, empêché les occupants des locaux du marché de faire de la publicité dans la Halte-bouffe du centre commercial.

«La communication a toujours été très difficile. lls n’écoutaient personne et n’ont jamais considéré nos idées, on se sentait pris de haut par des gens qui s’en foutaient», résume le propriétaire de la poissonnerie et du kiosque de croustilles des Galeries, désormais fermées.

Le Marché Adonis comme compétition

Un autre reproche commun des commerçants à Oxford Properties est l’ouverture sans préavis d’un Marché Adonis directement vis-à-vis les Galeries Gourmandes, sur le terrain aussi détenu par les Galeries des Capitales, quelques mois à peine après l’ouverture des kiosques.

«On a appris que ça faisait des années qu’ils étaient en négociations avec Adonis, et ils ne nous en ont jamais parlé, s’enrage Alain Fillion. Si on l’avait su, on n’aurait jamais ouvert une poissonnerie juste en face. On n’est pas des imbéciles quand même !»

Dès l’ouverture du supermarché Méditéranéen, l’effet s’est fait sentir au marché situé de l’autre côté du grand stationnement. «Ç’a eu un impact direct sur nos ventes. Les gens ont arrêté de venir aux Galeries Gourmandes, ce n’était plus la nouveauté», se désole l’homme d’affaires.

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«Quand on a appris qu’Adonis allait ouvrir en face, tout le monde capotait, témoigne le saucissier Vincent Blackburn-Marquis. Comment voulez-vous attirer des clients vers le marché pour faire leur épicerie quand ta compétition débarque, rodée et attendue, juste en face. Il y a des jours où on voyait une poignée de gens dans notre couloir, et le stationnement d’Adonis était plein.»

Contacté par Le Soleil, le directeur principal de l’expérience de la marque d’Oxford, Patrice Perron, a plutôt plaidé plutôt que l’arrivée d’Adonis est «une complémentarité à l’offre» des Galeries Gourmandes.

«Ça faisait des mois qu’on nous promettait un marchand de fruits et de légumes dans les halles. Finalement, le ‘’IKEA de l’alimentation’’ est apparu de l’autre côté du parking, juste assez loin pour pas que les gens viennent à pied, mais juste assez proche pour qu’ils ne veulent pas reprendre leur auto pour venir», laisse tomber la propriétaire de la boucherie Florent & Fils, Jessica Gauthier. «Notre château de cartes s’est complètement effondré.»

Ce qu’ils ont dit :

«On perdait de l’argent à chaque fois qu’on ouvrait la porte. Ç’a été notre premier échec, une vraie claque sur la gueule»

Gino Ouellet, propriétaire de Ma Cabane en Gaspésie.

«C’est un gros requin qui nous a mangés, les jeunes entrepreneurs. On a vraiment l’impression de s’être fait arnaquer. Ça nous a enlevé le goût de se relancer dans le commerce au détail»

Vincent Blackburn-Marquis, copropriétaire de Victorius Saucissier Comptoir.

«Plus le temps passait, plus on s’est rendu compte que le concept changeait. Au moins, j’ai toujours eu de bons rapports avec les équipes d’Oxford, mais je sais que ça n’a pas été le cas pour tout le monde.»

Élodie Bourgoin, propriétaire d’Élodie Fleuriste.

«Travailler 100 heures semaines, on est capable. Mais si la personne avec qui on doit collaborer ne veut pas participer, tout est voué à l’échec.»

Jessica Gauthier, propriétaire de la boucherie Florent & Fils.

«Incomparable» avec le Grand Marché de Québec

Au fond du marché, la Laiterie de Charlevoix persiste malgré le départ de ses voisins. «C’est clair que ça ne va pas aussi bien que ce qu’on nous a vendu, convient le directeur du développement des affaires de la fromagerie, Philippe Labbé. Est-ce qu’on fait fortune ? Non. Mais au moins on ne perd pas d’argent», résume-t-il.

L’entreprise a aussi un kiosque au Grand marché de Québec, deux magasins «pratiquement copiés-collés», toutefois, M. Labbé n’ose même pas faire la comparaison entre les deux emplacements. «Mon dieu, la différence est énorme. C’est absolument incomparable», lance-t-il.

Pour l’instant, l’entreprise charlevoisienne continue à offrir ses produits aux clients des Galeries de la Capitale, mais peut-être pas pour longtemps. «Notre bail tire à sa fin. C’est clair qu’il y a déjà des réflexions qui sont faites sur notre avenir ici ou non. Dans le contexte actuel, c’est peut-être moins intéressant pour nous de rester», confie le directeur du développement des affaires.

«Si les autres kiosques étaient pleins, ça serait autre chose. Après trois ans, on réalise que la synergie entre les commerçants n’est pas ce qu’on aurait espéré.»

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Au niveau du support ou de l’effort marketing, c’est sûr qu’on aurait aimé en avoir un peu plus d’Oxford. Mais bon, on comprend que leur business principale, c’est de louer des espaces.

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Juste «un mauvais timing», défend Oxford

L’entreprise derrière le projet, Oxford, entend la déception des commerçants. Mais la propriétaire d’une dizaine de centres commerciaux au pays croit toutefois qu’annoncer l’échec du projet de 16 M$ est prématuré.

«Il est un peu tôt pour faire ce constat, juge le directeur principal de l’expérience de la marque d’Oxford, Patrice Perron. L’exercice qu’on vit présentement est un peu sur le neutre, convient-il, mais on a l’intention de donner un autre tour de manivelle pour relancer les Galeries.»

M. Perron ne croit pas non plus que l’équipe de gestion derrière le projet soit à blâmer pour le départ de plus d’une douzaine de commerces. Il pointe plutôt les mesures sanitaires liées à la COVID-19 et la pénurie de main-d'œuvre. «C’est une question de timing. L’ouverture a coïncidé avec le début de la pandémie, des fermetures et des refermetures. Maintenant, il faut qu’on prenne deux pas en arrière.»

Pour souligner le potentiel du projet des Galeries de la Capitale, il donne l’exemple de projets similaires dans l’Ouest du pays, où les mesures sanitaires ont été bien moins sévères.

«On entend la déception, mais on voit ça comme un projet qui a encore besoin de temps, note le représentant d’Oxford. Maintenant, on doit voir ça comme une relance, avoir une discussion et ressortir notre artillerie lourde en communications.»

Et les quelques commerçants restants peuvent s'attendre à de la nouveauté. «Il y a une offensive en cours pour aller chercher de nouveaux joueurs pour les espaces, promet-il. Ils devraient s’ajouter à court terme.»

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Si les propriétaires avec qui s’est entretenu Le Soleil posent tous des diagnostics différents sur les causes de l’échec du projet, une variable revient : le manque de support d’Oxford.

Le Marché Adonis comme compétition

Ce qu’ils ont dit :

«On perdait de l’argent à chaque fois qu’on ouvrait la porte. Ç’a été notre premier échec, une vraie claque sur la gueule»

Gino Ouellet, propriétaire de Ma Cabane en Gaspésie.

Vincent Blackburn-Marquis, copropriétaire de Victorius Saucissier Comptoir.

Élodie Bourgoin, propriétaire d’Élodie Fleuriste.

«Travailler 100 heures semaines, on est capable. Mais si la personne avec qui on doit collaborer ne veut pas participer, tout est voué à l’échec.»

Jessica Gauthier, propriétaire de la boucherie Florent & Fils.

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