Visite du pape à Québec: loin de la frénésie de 1984

Les plaines d'Abraham, jeudi matin

D'une messe papale à l'autre, les temps changent. Loin de la frénésie qui flottait dans l'air en 1984 lors du passage de Jean-Paul II, les plaines d'Abraham ont accueilli tout au plus un millier de fidèles pour visionner à distance la messe du pape François.


La messe en plein air célébrée par le pape Jean-Paul II devant une foule estimée à 300 000 personnes à l'Université Laval le 10 septembre 1984 n'a pas d'égal.

Celle de jeudi, dirigée par le pape François à la basilique de Sainte-Anne-de-Beaupré, est loin d'avoir réuni autant de fidèles. Il faut dire que le nombre de places était limité. À l’intérieur de la basilique, 70% des 1600 places étaient réservées aux membres des communautés autochtones.

Mais même sur les plaines d'Abraham, où la cérémonie religieuse était diffusée sur écrans géants, les pèlerins du Québec et de l'international n'accouraient pas. 

En mettant le pied aux abords du grand parc, rien ne laissait croire à la diffusion imminente d'une messe historique, si ce n'est que les nombreuses équipes policières postées un peu partout, les pullulantes installations sanitaires et le son de l'hélicoptère de la Sûreté du Québec dans les airs de la capitale. Sur le pavé, la clientèle habituelle de marcheurs et de coureurs qui le fréquente détournait à peine la tête vers les installations, sans s'attarder à s'arrêter.

Même sur les plaines d'Abraham, où la cérémonie religieuse était diffusée sur écrans géants, les pèlerins du Québec et de l'international n'accouraient pas.

Cris de joie et silence

Parasols, couvertures et boîte à lunch à la main, prêts pour affronter un avant-midi sous un soleil ardent, quelques petits groupes se dirigeaient vers les plaines d'Abraham, aux alentours de 9h, à une heure du début de la messe. Les plus prévoyants s'étaient pressés d'arriver sur le site environ deux heures avant que le Saint-Père prenne la parole en direct de Sainte-Anne-de-Beaupré.

Nul besoin de courir pour réserver sa place, toutefois. Loin de la réalité des festivaliers désirant se frayer une place tout en avant de la scène lors du Festival d'été de Québec, les Plaines n'étaient pas très populaires. Même si le flux de spectateurs s'est accentué à l'approche du déclenchement de la messe, la foule est demeurée très éparse tout au long de l'événement. 

Pourtant, à Sainte-Anne-de-Beaupré, la foule s'était massée très tôt en matinée pour apercevoir l'arrivée du pape. Des cris de joie ont en effet résonné un peu partout lorsqu'il a foulé le site à bord de la «papemobile».

Quelques minutes après le début de la messe, la foule s'est rapidement dissipée. Alors que des groupes installés au Camping du Domaine Sainte-Anne ont pu traverser la rue vers la façade de la basilique, plusieurs spectateurs ont semblé quitter le sanctuaire après le passage de la «papemobile», ce qui offrait un parterre clairsemé. 

Le Saint-Père est entré dans l’église vers 10h, sous les regards attentifs des fidèles. 

À l'intérieur, il a célébré une messe réitérant la volonté de l’Église de se réconcilier avec les communautés autochtones canadiennes. Durant son homélie, le pape François n’a pas mentionné explicitement les survivants des pensionnats autochtones. Mais il a évoqué un «éprouvant chemin de guérison et de réconciliation» envers les Premières Nations. 

À l’intérieur de la basilique, 70% des 1600 places étaient réservées aux membres des communautés autochtones.

Environ 600 personnes se sont rassemblées sur les Plaines pour suivre la messe selon le Diocèse de Sainte-Anne.

Beaucoup de jeunes

Pendant ce temps, sur les plaines d'Abraham, la petite foule se faisait silencieuse, mais très attentive. Les «Amen» résonnaient ci et là, les gens se levaient et s'assoyaient lorsque la messe le commandait. Contrairement à l'extase des pèlerins rassemblés devant la basilique pour scander le nom du souverain pontife, les cris et les applaudissements sont pour ainsi dire marginaux sur les Plaines, sauf à la toute fin de la cérémonie.

Chacun avait sa raison d'être présent. Pour plusieurs visiteurs rencontrés par Le Soleil, assister à la messe était synonyme de «solidarité» avec les peuples autochtones. Ces derniers étaient d'ailleurs nombreux à s'identifier en arborant des vêtements traditionnels.

«On est venus témoigner notre soutien aux communautés», a entre autres partagé un couple venu de l'Outaouais, qui séjournait à Québec pour la durée de la visite de Sa Sainteté.

«On ne peut pas changer le passé, mais on peut [être] avec eux», ajoutait Gabrielle entourée de ses amies Élisabeth et Alicia. Les trois jeunes femmes faisaient partie de l'organisation du Chemin Néocatéchuménal, dont près de 300 membres de partout au Canada étaient réunis à Québec.

Au début et à la fin de la messe ils dansaient et chantaient au rythme de guitares et de tambourins. 

«C'est une manière de réunir les jeunes, on sait qu'il y en a moins dans l'église au Canada, donc c'est le fun de s'encourager et de se voir. En même temps, c'est une manière de souligner cet événement historique du pape au Canada pour nous qui s'identifions à la religion, mais pas à ce qui a été fait par le passé [dans les pensionnats]», a ajouté Isabelle Marceau. 

Lors de la communion, des centaines de fidèles se sont avancés, mains jointes, mais tous n'ont pas pu recevoir une hostie. La foule ayant été estimée à 600 personnes, selon Jean-François Morin du Diocèse de Sainte-Anne, le nombre de portions ne s'est donc pas avéré suffisant.