Crise du logement et boom de la construction

J’en arrive donc à penser que nous devrions regarder un peu plus du côté des changements de société. Nos gouvernements ont tout de même accès à plusieurs leviers et incitatifs fiscaux pour en diminuer les effets et cette action pourrait être plus efficace si on s’affairait un peu plus à comprendre les causes de cette pénurie de logement et à les mitiger, avant de se mettre à construire frénétiquement pour un jour peut-être passer tout droit.

POINT DE VUE / Est-ce qu’on se rend compte que les deux semblent se produire en même temps? Dans la grande région de Québec, je n’ai jamais vu autant de grues de chantier autour desquelles des tours à logement sont en construction. Beau paradoxe que celui-là.


Il y a quelque chose qui se passe et personne ne semble prendre la pleine mesure du phénomène ni en comprendre les causes profondes. C’est comme si la population du Québec avait soudainement explosé et c’est à n’y rien comprendre.

Ni sociologue ni démographe, qui suis-je pour avancer des hypothèses alors que rien ne semble sortir de la bouche des experts, au point que notre gouvernement allait tout récemment jusqu’à nier qu’il y avait un problème.

Ce qui n’empêche pas de se poser des questions. La première hypothèse qui vient à l’esprit est la suivante: se pourrait-il que le nombre de ménages augmente plus vite que la population? Des séparations et des divorces à la hausse ont pour effet de granulariser les ménages: là où papa et maman habitaient ensemble, ils se retrouvent à occuper deux logements différents et, pire encore, chacun des enfants de parents séparés se met à occuper deux chambres à coucher, à mi-temps souvent pour chacune dans les cas de gardes partagées.

Seconde hypothèse: le travail à la maison durant la pandémie a laissé à l’abandon des millions de pieds carrés d’espaces de bureau. Où pensez-vous que cet espace de travail s’est retrouvé? 

Dans le parc immobilier résidentiel bien sûr. Rien ne se perd, rien ne se crée, tout est question de vases communicants. Est-ce que ça va revenir comme avant? Probablement pas tout à fait, j’imagine que plusieurs travailleurs auront pris l’habitude du travail à la maison et qu’ils ne reviendront pas en arrière. Mais une chose est certaine, ça a donné un grand coup dans la disponibilité du logement.

J’hésite à aborder la question des baby-boomers parce que c’est moins évident. Je constate par contre qu’ils sont encore nombreux à occuper la résidence familiale, quelquefois seuls après le départ ou le décès de leurs conjoints. Ça en fait beaucoup, des pieds carrés inoccupés, des personnes seules ou des couples de personnes âgées dans des bungalows de banlieue, qui restent attachées à leurs grandes maison et à leurs immenses terrains, même si elles n’ont plus la force ni la capacité d’en assurer l’entretien. Et qui plus est, beaucoup de ces immeubles souffrent d’un manque d’entretien qui risque de leur être fatal si on laisse les choses dégénérer.

J’en arrive donc à penser que nous devrions regarder un peu plus du côté des changements de société. Nos gouvernements ont tout de même accès à plusieurs leviers et incitatifs fiscaux pour en diminuer les effets et cette action pourrait être plus efficace si on s’affairait un peu plus à comprendre les causes de cette pénurie de logement et à les mitiger, avant de se mettre à construire frénétiquement pour un jour peut-être passer tout droit.