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«Après deux rapports d'investigation du coroner, je pense que le moment est à l'action», a réclamé jeudi le maire de Lévis, en marge d'une conférence de presse sur les retombées économiques du troisième lien.

Le rapport de la coroner M^e Geneviève Thériault sur le décès de Monique Labrecque, survenu en 2020, venait d'être rendu public, tout juste la veille. Un arrêt cardio-respiratoire a emporté la septuagénaire, après que la première ambulance assignée pour cet appel d'abord classé priorité 7 eut rebroussé chemin pour répondre à un autre, alors jugé plus urgent. La seconde équipe n'est arrivée à son secours que près d'une heure après l'appel initial logé au 9-1-1.

Si Mme Labrecque avait été transportée au centre hospitalier avec la première ambulance, «elle n’aurait peut-être pas fait d’arrêt cardio-respiratoire ou elle se serait trouvée à l’hôpital lors de l’arrêt cardio-respiratoire», écrit la coroner. «Il est certain que ses chances de survies auraient été meilleures, car ils étaient sur les lieux 10 minutes après l’appel au 9-1-1», note M^e Thériault.

Ce second rapport fait suite à l'enquête menée sur le décès d'Hugo St-Onge, laquelle révélait aussi en mai 2020 un problème de couverture ambulancière.

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«Pour moi, il est clair que le manque d’effectif ambulancier a joué un rôle important dans le dossier de M. St-Onge, affirme la coroner Langlois. Lui qui sauvait des vies, n’a pas réussi à être sauvé...»

Le 27 décembre 2017, Hugo St-Onge va rejoindre sa copine chez elle, à Lévis, dans le quartier St-Jean-Chrysostome. Peu de temps après s’être mis au lit, le jeune homme commence à avoir des convulsions. Sa respiration devient irrégulière et saccadée. Sa copine contacte immédiatement les services d’urgence. Il est 00h31. La jeune femme constate au cours de l’appel que son amoureux cesse de respirer. Elle commence des manœuvres de réanimation.

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Les premiers répondants, les pompiers, arrivent à 00h48 et prennent la relève. Les ambulanciers, en provenance de Bellechasse, seront sur place à 00h52, 21 minutes après l’appel au 9-1-1.

Les manœuvres de réanimation se poursuivent dans l’ambulance jusqu’au CHUL. Toujours en arrêt respiratoire, le jeune homme sera intubé. Son décès est constaté à 2h.

Léger problème cardiaque

En avril 2016, Hugo St-Onge a présenté des symptômes de syncope. Il a subi un électrocardiogramme.

Les médecins de Saint-François-d’Assise ont constaté un faible souffle cardiaque et un léger dysfonctionnement d’une valve du coeur, qui ne se fermait plus complètement.

Il a vu un cardiologue en décembre 2016. Un rendez-vous de suivi était prévu en 2019. On le rassure en lui recommandant de toujours bien s’hydrater.

Selon ses proches, le jeune ambulancier n’a jamais eu d’autres symptômes avant la nuit de son décès.

Dans son rapport, la coroner Julie Langlois pose la question si tous les examens requis pour bien évaluer la condition du jeune homme avaient été prescrits. Elle recommande au CHU de Québec de réviser la qualité des soins prodigués.

Une seule ambulance de plus

Le 27 décembre 2017, comme chaque nuit à cette période, seulement trois ambulances couvraient le territoire lévisien. Elles étaient toutes déjà occupées, soit l’hôpital ou en route vers l’Hôtel-Dieu de Lévis.

Depuis mars 2018, l’équivalent d’une seule ambulance a été ajouté par le ministère de la Santé. Est-ce suffisant? «Poser la question, c’est y répondre, répond la coroner Langlois. Il y a encore clairement un manque d’effectif.»

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Pour moi, il est clair que le manque d’effectif ambulancier a joué un rôle important dans le dossier de M. St-Onge. Lui qui sauvait des vies, n’a pas réussi à être sauvé...

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La coroner recommande au ministère de la Santé et au CISSS Chaudière-Appalaches d’examiner la problématique des effectifs ambulanciers sur le territoire de Lévis et d’évaluer la pertinence de revoir les critères d’attribution de ces effectifs.

Deux ans et demi après la perte de leur fils Hugo, Johanne Lapointe et Bruno St-Onge vivent le drame un peu plus sereinement. «Mais il n’en demeure pas moins que c’est un échec total, une suite de manquements, constate Mme Lapointe. C’est difficile de concevoir qu’on appelle le 9-1-1 pour une situation urgente et que ça prend cinq minutes avant qu’on déploie les premiers répondants. Et après, quand vous voyez la recherche d’une ambulance à gauche et à droite et tous les délais... Vous n’accepteriez pas ça pour vos proches ni pour personne.»

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Maxime Laviolette, directeur général pour Dessercom, est encore très ému quand il pense à son ancien employé, jeune ambulancier dévoué et engagé.

«Il faut arrêter d’accepter le statu quo, lance M. Laviolette. Il faut arrêter de dire, \"c’est pas grave\". Ce qui est arrivé en 2017 est grave.»

Et des délais de 20 minutes comme celui vécu par le jeune ambulancier, il y en a encore à Lévis, assure M. Laviolette.

Un mois avant sa mort, Hugo St-Onge avait signé, avec ses collègues, une lettre d’opinion dénonçant le sous-effectif ambulancier et ses conséquences potentielles très graves pour la population.

Deux millions $ de plus

Le maire de Lévis Gilles Lehouillier trouve aussi que ses citoyens attendent depuis trop longtemps un service ambulancier à la hauteur des besoins. «Si on veut assurer la sécurité de notre population, on n’a plus le choix», considère le maire de Lévis.

Avec ses 150 000 habitants, Lévis est maintenant plus populeuse que Saguenay. Lévis a pourtant cinq ambulances de moins que Saguenay, à tous les jours.

Selon les informations transmises au maire de Lévis, il en coûterait environ 2 millions $ de plus par année au ministère de la Santé pour augmenter de 25% la desserte ambulancière à Lévis et se rendre à une dizaine d’ambulances en service.

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En plus d’augmenter le nombre d’ambulances à Lévis, il faut aussi s’assurer que l’entreprise Dessercom soit enfin intégrée au système de répartition assistée par ordinateur véhiculaire, un outil qui fait gagner de précieuses minutes en localisant les véhicules sur le territoire. «On attend juste de pouvoir être connecté, ça prend juste de la volonté des autorités», assure Maxime Laviolette de Dessercom.

Le ministère de la Santé et son ministre ont assuré jeudi qu’ils avaient bien pris connaissance du rapport et prendraient les actions qui s’imposent.

«On prend acte du rapport et on va faire un suivi des recommandations», indique Marjaurie Côté-Boileau, attachée de presse du ministre de la Santé et ancien député de Lévis, Christian Dubé.

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M^e Thériault constate ainsi que l'application des recommandations formulées dans le premier rapport est encore en cours. L'ajout de deux quarts de huit heures, une mesure qui se voulait temporaire jusqu'en mars 2021, est toujours en vigueur. Elles sont toutefois «bien en deçà des 200 heures de services ambulanciers [...] réclamées par les services préhospitaliers d’urgence et le syndicat des ambulanciers», écrit la coroner.

Au CISSS de Chaudière-Appalaches, on évalue que 184 heures de services ont été ajoutées depuis 2018. La couverture ambulancière est calculée en fonction du délai de réponse. À Lévis, il est de 9 minutes, «ce qui est comparable à ceux des municipalités de même envergure».

«Afin de protéger la vie humaine […] je recommande au ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, en collaboration avec le CISSS de Chaudière-Appalaches, de compléter promptement l’évaluation des effectifs ambulanciers dans la zone ambulancière de Lévis recommandée en 2020 et d’implanter rapidement toute mesure jugée nécessaire découlant de cette évaluation», conclut M^e Thériault.

Un enjeu électoral

Le maire de Lévis partage cet avis.

«Ça n'a plus de sens, on est avec un nombre d'ambulances où des villes comparables au Québec comme Sherbrooke, Saguenay, ont le double d'ambulances que chez nous», déplore-t-il une fois de plus. «On a un rapport d'investigation de deux coroners différents complètement indépendants et on voit qu'ils arrivent exactement à la même conclusion. Deux deux choses l'une: ou on dit que les coroners ne font pas bien leur travail, ou on prend très au sérieux leurs recommandations».

Avec un grand territoire et une population qui ne cesse de croître, il opte pour la seconde avenue.

Gilles Lehouillier en a d'ailleurs «glissé un mot» mercredi au ministre de la Santé. Ce dossier est «au-dessus» de la pile, informe-t-il. «On m'a dit que oui, on allait analyser sérieusement la situation, rapporte le maire. Nous, il est clair qu'on va en faire un enjeu électoral lors de la prochaine campagne». Il réclame ainsi des «engagements fermes» de la part de tous les partis politiques.

Et il veut que la réponse vienne rapidement, avant même le départ pour les vacances de la construction.

«Est-ce qu'il y aurait moyen que le gouvernement lance un signal? C'est ce qu'on demande», répète-t-il.

À ses côtés, la Chambre de commerce et d’industrie du Grand Lévis (CCIGL) continue aussi de militer pour une ambulance supplémentaire sur le territoire. «Le rapport de maintenant deux coroners est accablant pour la couverture ambulancière de Lévis, qui ne répond tout simplement plus aux besoins de la population qui a grandement évolué et vieilli dans les dernières années», soutient Marie-Josée Morency, directrice générale à la CCIGL.

Une pétition papier circule d'ailleurs pour demander au gouvernement de bonifier la couverture ambulancière actuelle pour «sauver des vies».

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«Le décès d’un enfant est la pire douleur… Un décès en plus évitable, c’est inimaginable», dit Janet Jones en début de conférence de presse.

Hugo Saint-Onge, âgé de 24 ans, est décédé en décembre 2017 d’un arrêt cardio-respiratoire, l’ambulance est arrivée 21 minutes après l’appel d’urgence, le double du temps recommandé. Un mois avant sa mort, Hugo — lui-même ambulancier — avait signé une lettre qui dénonçait le manque d’ambulances dans la ville de Lévis.

"},"type":"paragraph"},{"position":2,"text":{"fr":"

Plus de quatre ans plus tard, les parents mènent le même combat, celui de leur fils. Il n’y a eu pratiquement aucun changement dans la desserte ambulancière de la ville, malgré le drame.

«À 24 ans, ses dernières volontés, on a jamais parlé de ça avec lui. On est allés au mieux de notre connaissance. Il y avait une volonté d’Hugo qu’on connaissait clairement, et que tous ses collègues connaissaient, il militait déjà pour l’ajout d’une ambulance à Lévis. Avant son décès, c’est clair que la couverture de Lévis était déficiente, elle l’est encore», témoigne Johanne Lapointe, la mère d'Hugo.

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Les parents d'Hugo Saint-Onge, Johanne Lapointe et Bruno Saint-Onge"},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Soleil, Erick Labbé"},"position":3,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F11e6111b-65f1-4823-b789-7f4a5659ae49.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":4,"text":{"fr":"

Les parents d’Hugo essaient de mener cette bataille à sa place. Ils ont le cœur brisé de savoir que d’autres familles ont vécu un drame semblable, après les cris d’alarme lancés au gouvernement, et après les recommandations du coroner qui vont dans le même sens que leurs revendications.

«La démarche qui est entamée [avec les gens d’affaires de Lévis] va permettre d’aller un peu plus loin et de faire en sorte de sauver des vies plus rapidement», ajoute le père d’Hugo, Bruno Saint-Onge.

Les parents ont «malheureusement» fait la connaissance de Marcel Aubin en 2020. Sa conjointe, Monique Labecque, est décédée dans les mêmes circonstances que leur fils, l’ambulance a pris trop de temps à arriver, déjà occupée sur un appel plus urgent.

M. Aubin était lui aussi présent mercredi pour réclamer des changements au gouvernement. Leur rencontre est une synonyme «d'échec», puisqu'ils partagent une perte immense : la mort de leur proche était évitable.

Les gens d’affaires au front

Le comité citoyen et du monde des affaires de Lévis pour de meilleurs services préhospitaliers d’urgence lance une «mobilisation sans précédent» pour demander au gouvernement du Québec d’accorder à Lévis une desserte ambulancière équitable aux autres villes similaires.

Lévis ne demande pas la lune, elle souhaite l’ajout d’une seule ambulance qui permettra au milieu de «se stabiliser».

«Cette ambulance supplémentaire que nous demandons, c’est pour réduire les délais d’intervention, améliorer la couverture ambulancière actuelle et mieux répondre aux enjeux régionaux. Nous croyons savoir que la main-d’œuvre est disponible dans ce domaine et que des ambulances sont déjà prêtes à entrer en action. Pourquoi attendre qu’un nouveau drame se produise avant d’agir?» indique Marie-Josée Morency, vice-présidente exécutive et Directrice générale de la Chambre de commerce de Lévis.

L’ancienne conseillère municipale Janet Jones lance une pétition dès maintenant qui circulera jusqu’au 6 juin puis sera présentée aux élus de l’Assemblée nationale, avant la fin de la session parlementaire.

L’ajout d’ambulances à Lévis se doit d’être un enjeu électoral, croit-elle.

La Chambre de commerce de Lévis regroupe 1100 membres.

Encore plus fort

"},"type":"paragraph"},{"caption":{"fr":"Le maire de Lévis, Gilles Lehouillier"},"contentType":"image","credits":{"fr":"Le Soleil, Erick Labbé"},"position":5,"type":"photo","url":"https://images.omerlocdn.com/resize?url=https%3A%2F%2Fgcm.omerlocdn.com%2Fproduction%2Fglobal%2Ffiles%2Fimage%2F00e37a1f-6b1f-43a2-942a-0c46e52154e1.jpg&width=1024&type=jpeg&stripmeta=true"},{"position":6,"text":{"fr":"

Le maire de Lévis défend déjà l’amélioration de la desserte ambulancière auprès des élus provinciaux. Selon Gilles Lehouillier, la voix des citoyens et celle des entreprises résonneront plus fort.

«Nos députés nous appuient, c’est ce qu’ils nous disent. Mais on n’a pas les résultats. […] Je pense que maintenant c’est la population qui va parler, et ça, c’est pas mal plus fort.»

À ce jour, six ambulances le jour, cinq le soir et trois la nuit sont en poste les jours de semaine à Lévis. À Sherbrooke, une ville similaire souvent comparée à Lévis, il y en a le double, dénonce le maire. Selon lui, on ne prend pas en compte plusieurs aspects propres à Lévis.

Entre autres, les ambulances de Lévis ont un grand territoire à couvrir, avec un enjeu de trafic compliqué. Elles effectuent aussi des transports vers Québec de manière régulière, ce qui les coincent sur la route plus longtemps.

Depuis le pandémie, une centaine de nouvelles entreprises sont nées à Lévis, note le maire. Depuis 10 ans, la ville connaît aussi un essor démographique.

«Il faut qu’on améliore l’ensemble de notre couverture. Depuis le rapport du coroner [sur le mort d’Hugo Saint-Onge], l’ajout de quelques dizaines d’heures, c’est tout ce qui s’est fait. On pourrait sauver des vies. On a un ratio qui n’a pas d’allure, comparé aux villes semblables. C’est quoi les critères qui sont retenus par le ministère de la Santé?» dénonce le maire Lehouillier.

Il demande plus de transparence de la part du ministère.

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