Un peu plus d’une centaine de personnes se sont rendues à un rassemblement en faveur de l’interdiction pour les francophones et les allophones de fréquenter les cégeps anglophones dans un centre communautaire de Québec, mercredi soir.
L’assemblée a également servi de prétexte pour présenter celui qui portera les couleurs péquistes dans Jean-Talon lors des prochaines élections provinciales. Il s’agit du professeur d'économie au cégep Garneau, Gabriel Coulombe, qui a notamment milité auprès du Regroupement pour le cégep français, qui a mené 38 des 48 syndicats des enseignants au collégial à appuyer formellement l’imposition de la loi 101 au cégep.
«Il y a trois ou quatre ans, la CAQ ne voyait aucune raison de réformer et de renforcer la loi 101. On disait seulement qu’il fallait l’appliquer», a noté le chef péquiste Paul St-Pierre-Plamondon, félicitant ses troupes d’avoir fait passer «la notion d’urgence linguistique dans les cégeps d’un sujet marginal à un appui du deux tiers des Québécois».
«C’est un accomplissement qui doit nous guider dans la manière d’aborder les prochaines élections», a indiqué le politicien devant une salle conquise.
D’un «tabou» à un enjeu central
La présidente de l’aile jeunesse du parti, Marie-Laurence Desgagné, a également pris la parole pour rappeler le chemin parcouru par l’idée d’appliquer la loi 101 au cégep pour finalement atterrir dans le programme péquiste.
«Comme les jeunes, comme les Québécois, le Parti québécois a cheminé là-dessus», a noté celle qui se présentera dans la circonscription de Chambly. La question, qui a longtemps créé un malaise chez les péquistes, a été mise de l’avant un peu avant la pandémie lors d’un congrès du Comité national jeunesse. Le parti a adopté la position quelques mois plus tard, à la quasi-unanimité.
Le candidat dans Jean-Talon a lui-même avoué qu’il y a cinq ou six mois, lui non plus «n’était pas certain d’être pour l’application de la loi 101 au cégep». Aujourd’hui, il se présente pour le PQ avec cet enjeu comme cheval de bataille.
«Je me disais qu’à 17 ou 19 ans, on est capable de choisir la langue dans laquelle on veut étudier, a expliqué Gabriel Coulombe. C’est la position facile et logique à première vue, mais si on gratte, on voit que la concurrence entre les cégeps francophones et anglophones a des impacts plus grands.»
Parmi ceux-ci, le candidat péquiste a plaidé qu’autoriser les jeunes francophones et allophones à fréquenter les établissements anglophones «créait un réseau à deux vitesses» tout en «renforçant l’élitisme des cégeps anglophones», puisque seuls les étudiants avec une excellente moyenne générale y étaient admis. «Les jeunes ne vont pas au cégep pour apprendre l’anglais, mais parce que c’est plus prestigieux», a-t-il laissé tomber.
Comme «illustration spectaculaire de l'aliénation linguistique», M. Coulombe a donné l’exemple du Collège Champlain St. Lawrence de Québec, où environ 75 % des élèves et 63 % des professeurs seraient francophones. «On se retrouve avec une majorité de profs francophones qui enseignent en anglais à une majorité d’élèves francophones», s’est désolé le professeur, déclenchant des huées dans la foule.
Le dernier sondage sur la question, commandé par le Parti québécois au début du mois de juin, indique que 58 % des Québécois se disent «d’accord avec l’application de la Charte de la langue française (loi 101) aux cégeps». Un sondage mené à l'automne 2021 avait plutôt évalué à 47 % d’appui la proposition de «réserver la fréquentation des cégeps anglophones aux étudiants ayant fait leur secondaire en anglais».
Économiste, syndicaliste et ex-conseiller politique
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En 2013 et 2014, M. Coulombe a travaillé aux côtés du député de Laval-des-Rapides d'alors, Léo Bureau-Blouin, qui s'était fait connaître comme l'un leaders des grèves étudiantes du printemps 2012.
M. Bureau-Blouin agissait alors comme adjoint parlementaire dans le volet jeunesse pour la première ministre Pauline Marois, ce qui a aussi fait de M. Coulombe un conseiller au bureau de la première ministre Marois pour un certain temps.
Le candidat, présenté comme un membre de «l’équipe économique» du Parti québécois, se décrit comme un «souverainiste, écologiste, progressiste et nationaliste».
La circonscription de Jean-Talon, à Québec, est représentée par Joëlle Boutin de la CAQ. Elle couvre Sillery et une partie de Sainte-Foy, n'a jamais élu de péquiste depuis sa création, en 1966. Le PQ y a même terminé au quatrième rang lors des deux dernières élections, la générale de 2018 (14,5 %) et la partielle de 2019 (9,3 %). Les projections actuelles placent même le PQ cinquième, à 7 %, derrière le Parti conservateur du Québec.
Gabriel Coulombe croit tout de même pouvoir être élu en courtisant «les caquistes et solidaires indépendantistes déçus», convenant néanmoins de la «difficulté» de son pari. (Avec la collaboration d’Olivier Bossé)