Tout d’abord, j’ai dû me renseigner sur ce comité gouvernemental et essayer de comprendre en quoi le hockey était devenu une priorité nationale au point de mériter un comité gouvernemental.
Je ne cherche pas à discréditer Marc Denis. Il a entièrement droit à son opinion et à sa réflexion pour défendre le hockey qui est une passion qui semble lui tenir à cœur. Mais trois enjeux me sont venus immédiatement en tête à la lecture de cette réflexion.
Premièrement, l’aspect irréaliste de l’idée. Plusieurs écoles tombent en ruines. On manque de locaux de classe et d’enseignants. Beaucoup d’écoles doivent assurer l’éducation avec des ressources désuètes. Je m’imagine mal comment on va implanter l’enseignement du patin à l’école dans des milieux ruraux (imaginez la logistique d’horaire et de transport à l’aréna) ou dans des milieux défavorisés (les patins sont loin dans les priorités quand on doit fournir des déjeuners).
Deuxièmement, cette désagréable manie de vouloir jeter toute nouvelle réalité nécessitant un apprentissage dans la cour de l’école. J’avais déjà écrit là-dessus et triste est de constater que le propos est toujours d’actualité : l’école n’est pas le seul endroit où un jeune peut apprendre des choses. Les parents peuvent aussi apprendre certaines choses à leurs enfants à la maison (et ainsi renforcer le lien avec leur enfant). On peut aussi investir dans des centres communautaires et des activités extrascolaires. Il faudrait cependant se débarrasser de cette manie de vouloir attribuer la responsabilité de tout ce qui est à apprendre aux enseignants.
Troisièmement, le prof de musique en moi fut piqué au vif. Quand j’ai vu qu’on lançait tout bonnement l’idée d’ajouter l’enseignement du patin au cursus de l’école, j’ai pensé à mes collègues qui ont passé la pandémie à se promener avec un chariot d’instruments.
À mes collègues qui doivent partager un local avec le service de garde qui l’utilise pendant leurs cours. À mes collègues qui perdent leur local parce que la clientèle est plus nombreuse et qu’ils sont «sacrifiables». À mes collègues qui font des miracles avec peu de ressources. À mes collègues qui, chaque année à ce temps-ci, doivent encore se battre avec leurs propres collègues pour justifier l’importance de la musique à l’école et les empêcher d’enlever des périodes de musique au profit de l’anglais ou de l’éducation physique.
Je pense aussi à tous les collègues à qui on offre l’équivalent de 30 heures de salaire par année pour les «autres tâches» du prof de musique, c’est-à-dire assurer la réparation d’instruments, magasiner le matériel, organiser un concert, faire la gestion de l’inventaire du matériel, entretenir les instruments, gérer les ensembles parascolaires, participer à un concours ou un festival pour motiver les élèves, trouver des artistes à inviter, etc. Je pense aux collègues de matières artistiques qui se font dire de se débrouiller avec 500$ par année alors qu’on investit massivement dans les programmes sportifs.
Loin de moi l’idée de vouloir dénigrer l’éducation physique et les sports, mais il y a un certain déséquilibre de vouloir ajouter encore plus de ressources pour une discipline sportive optionnelle alors que les matières artistiques en place manquent déjà cruellement de ressources (et bien honnêtement de considération).
Alors, avant de vouloir lancer une autre responsabilité non essentielle (bien que sûrement passionnante) dans la cour de l’école, peut-on prendre soin de celles qui y sont déjà? Peut-on valoriser l’importance des matières artistiques dans le développement humain de nos élèves?
L’auteur est candidat au doctorat en éducation musicale
Québec