Restaurant Cari: du côté du Sichuan

La généreuse portion de bœuf à l’orange, d’une cuisson irréprochable.

CRITIQUE / Sur une avenue dénuée de charme, dans un petit mail planté entre deux garages et un Normandin, on peut trouver de belles surprises. C’est le cas du Restaurant Cari, qui roule depuis 14 ans et dont la renommée dans le secteur Charlesbourg n’est plus à faire.


Enfin, elle sort du centre-ville, direz-vous peut-être. C’est vrai que la plupart de mes critiques portent sur des restos centraux. L’explication est statistique: c’est là que se trouve la majorité des établissements. Les nouveaux, du moins. Bref. Ça fait un moment que je vise à m’éloigner plus souvent de Saint-Roch et compagnie pour vous parler de restaurants de banlieue. Et comme, depuis environ deux ans, le nom du Cari surgit ici et là dans mon fil Facebook, suggéré à des gens en quête du meilleur asiatique à Québec, je suis allée voir de quoi il en retourne.

Décorée simplement, la salle à manger est très animée une fois remplie.

Des classiques et des raretés

Mercredi soir frisquet de la fin avril. Le soleil entre à flots dans la petite salle à manger sans prétention, aux banquettes fleuries et aux murs rouge vin avec napperons de papier assortis. David, nos amis Charles et Sandra et moi hésitons devant la costaude carte du chef Yi Guang Lor, qui propose une cinquantaine de plats thaïlandais et sichuanais. Quelques tables d’hôte pour deux réunissent les mets les plus populaires à un prix dérisoire (c’est rare, de nos jours). Sandra et moi allons en profiter. 

La sympathique serveuse vient prendre nos commandes après nous avoir munis d’un seau de glace pour garder frais le picpoul de Pinet qu’on a apporté. Autour de nous, ça mange de bon cœur. Et ça sent bon. Et ça donne faim.



Bouillon goûteux, dumplings moelleux: la soupe won-ton est réussie.

Ma soupe won-ton arrive à la rescousse. Le bouillon est goûteux, et les dumplings porc-crevettes bien réussis. Servis également en entrée avec une sauce aux arachides, ces mêmes raviolis souffrent d’une farce un peu sèche. Où sont les baguettes? Étonnamment, elles ne sont pas fournies d’office, il faut les demander.

Autre surprise : les rouleaux de printemps annoncés dans le menu sont frits — je m’attendais à des rouleaux tout en fraîcheur, dans une feuille de riz. D’abord un peu déçue, car je ne suis pas fan de rouleaux impériaux — je les trouve généralement inintéressants —, je me ravise : ceux-ci sont très bons. Peu gras, ils croustillent allègrement et leur farce est riche en saveur. Bien assaisonnée, comme diraient les juges des Chefs

Suit une assiette de légumes variés (fèves germées, carottes, champignons, chou-fleur, brocoli et beaucoup d’oignon) dont la sauce est bien relevée, ainsi qu’il est d’usage dans la cuisine du Sichuan.

Les légumes ont été sautés dans une sauce relevée.

Beau plat que les crevettes au poivre avec épinards croustillants. Baignant dans une sauce à base de bouillon de poulet, de sauce soya et de poivre, les crustacés sont charnus comme on les espère toujours, et d’une cuisson impeccable. Je m’attendais cependant à une présence poivrée plus marquée. C’est la première fois que je goûte aux épinards croustillants sucrés, une recette thaïe typique qui joue bien sur la combinaison des saveurs (amer et sucré). J’adore. Ça se mange comme des chips, chaque bouchée en appelant une autre.

Mon plat favori de la soirée: les crevettes au poivre et les épinards croustillants sucrés.

On pousse ce qu’on peut sur la table afin de dégager de la place pour d’autres plats généreux — je prédis une demande de doggy bag à l’issue du repas. Le bœuf à l’orange nous plaît : viande de belle texture (tendre au cœur, croustillante à l’extérieur) et sauce onctueuse dans laquelle perce l’acidité de l’agrume en fin de bouchée — personnellement, j’en mettrais encore un peu plus. 

Le poulet général Tao se distingue par son faible taux de sucre et son acidité perceptible, se rapprochant de la recette originale — c’est en Amérique du Nord que ce mets est devenu sucré. J’aime bien, surtout que la panure est légère, et la viande de qualité.

Très peu sucré, le poulet général Tao est plus près de l’original que ce qu’on trouve souvent dans les restos asiatiques de Québec.

Mes baguettes font quelques enjambées jusqu’au bœuf croustillant au sésame que mange David. La parenté avec notre bœuf à l’orange est évidente; la grande quantité de graines de sésame apporte de l’umami, mais on reste en territoire familier. 

Charles, de son côté, s’amuse à se concocter des rouleaux avec son poulet Mu-Shu. Dans son assiette, il pige de la viande, du chou, des champignons et de l’omelette sautés qu’il dépose sur de petites crêpes (qui ressemblent à des tortillas de blé), gardées au chaud dans un panier à étuver en bambou, puis garnit le tout de sauce hoisin. La prochaine fois, c’est ce que je prendrai.



Les Oreo frits sont intéressants, mais j’ai préféré le beignet aux bananes.

Une finale en sagesse

Mes yeux s’éclairent quand la serveuse vient nous offrir du thé au jasmin. Sandra et moi nous partageons une grosse théière — tant pis pour le sommeil perturbé. Je mords dans mon beignet aux bananes et suis ravie par son cœur bien fondant aux arômes caramélisés. Quant aux Oreo frits que David a commandés, ils sont… intéressants. Après leur séjour en friteuse, les biscuits ont évidemment ramolli, et le crémage, lui, a disparu, absorbé par la panure. Mais ça se laisse manger.

C’est le moment d’ouvrir nos biscuits chinois. «Tendez bien l’oreille. Vous en sortirez gagnant», me conseille le bout de papier caché dans le mien. C’est ce que j’ai fait avec les recommandations concernant le Cari. Et on peut dire que j’en sors gagnante. Avec un doggy bag en prime.

Ouvert depuis 2008, le Cari appartient à Lily Chen, Ming Hui Zhen et Wen Ying Luo.

AU MENU

Restaurant Cari
5000, 3e Avenue Ouest
418 627-8989
facebook.com/restaurantcari

  • Ouvert du mardi au vendredi midi et soir, et le soir seulement samedi et dimanche
  • Apportez votre vin
  • Entrées de 3$ à 14$, plats de 14,50$ à 26$
  • Coût de l’addition pour une table d’hôte pour deux avant taxes et pourboire: 57,95$
  • Bravo : pour la cuisine bien faite et généreuse, les prix très accessibles.
  • Bof : les dumplings en entrée étaient un peu secs.