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Je n’ai pas pu résister. Lisa Kudrow (Michelle) et Mira Sorvino (Romy) étaient interviewées au Late Late Show de James Corden. Elles ont raconté la frénésie qu’a créée leur passage aux SAG Awards, où elles présentaient ensemble le prix de la meilleure comédie.

Pour ceux qui n’ont pas vu le film ou l’ont oublié, c’est l’histoire de deux amies inséparables depuis le secondaire qui se rendent à une réunion des anciens élèves de leur école avec l’ambition de redorer leur réputation. Elles s’inventent des vies de femmes d’affaires prospères et vont jusqu’à prétendre avoir inventé le post-it. Jusqu’à ce que la vérité éclate en plein conventum...

Pourquoi ce film résonne-t-il encore autant aujourd’hui? Peut-être parce que son scénario a touché une corde universelle: le sentiment que l’adolescence ne nous quitte jamais vraiment et qu’on passe le reste de notre vie à essayer de s’affranchir de ses stigmates.

Quand elles étaient au secondaire, Romy et Michelle ne faisaient pas partie de la clique des «cools». Les filles huppées se moquaient d’elles, les garçons convoités les ignoraient. Les deux amies essayaient de faire semblant qu’elles s’en fichaient, mais, au fond, elles aussi voulaient devenir les reines du bal. Dix ans plus tard, ce désir n’avait pas changé.

Et ce n’est pas si étonnant. La recherche scientifique montre que notre popularité à l’adolescence teinte nos relations sociales à l’âge adulte, souligne le chercheur Mitch Prinstein dans son livre Popular: The power of Likability in a Status-Obsessed World (Populaire: le pouvoir de l’amabilité dans un monde obsédé par le statut).

Sans qu’on s’en rende compte, les interactions que nous avons eues avec nos amis, nos camarades de classe ou nos coéquipiers à l’adolescence ont modifié le câblage de notre cerveau, explique le professeur de psychologie à l’Université de la Caroline du Nord.

À l’âge adulte, c’est un peu comme si on voyait les situations sociales d’aujourd’hui avec les lunettes de notre adolescence. «À un certain niveau, écrit Mitch Prinstein, nos cerveaux passent toutes leurs journées à s’appuyer sur ces souvenirs initiaux et formateurs de l’école secondaire.»

Cette lorgnette entraîne des biais de perception qui nous font voir la réalité différemment si on a été populaire — ou impopulaire — à l’adolescence.

Dans une expérience racontée par M. Prinstein, des chercheurs ont par exemple demandé à des adultes de visionner huit courts métrages avec des scènes typiques de la vie dans une école secondaire — des ados devant leurs casiers, à la cafétéria, à l’extérieur. Parfois, les ados avaient l’air de s’apprécier mutuellement; d’autres fois, ils semblaient se rejeter.

Avec un appareil sophistiqué, les chercheurs observaient où les pupilles de leurs sujets se dirigeaient. Et ils ont fait une découverte bouleversante.

Les adultes qui avaient eu un certain succès social dans le passé se concentraient sur les interactions positives et survolaient les interactions négatives. À l’inverse, ceux qui avaient été isolés durant leur adolescence ignoraient presque entièrement les interactions positives; leurs pupilles étaient fixées sur les actions qui évoquaient l’exclusion sociale et la négativité.

Quand vous quittez un party, pensez-vous à tous les gens avec qui vous avez parlé ou à ceux qui ne vous ont pas salué? demande-t-il. Quand vous faites une présentation devant un groupe, regardez-vous ceux qui ont l’air attentif ou ceux qui semblent s’ennuyer?

Ces biais sont habituellement automatiques ; ils se produisent en une fraction de seconde. Mais, à force de les détecter, note Mitch Prinstein, on devient plus aptes à les désamorcer.

À la fin de Romy et Michelle, les deux amies se rendent bien compte qu’elles accordent beaucoup trop d’importance à l’opinion d’une ex-camarade dont elles se contrefichent, au fond. Et elles l’envoient promener. À ce moment, elles se sont peut-être aussi délivrées d’une partie de leur adolescence.

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