Les mères de famille exigent du gouvernement Legault des mesures pour garantir des places en services de garde éducatifs afin qu’elles puissent retourner sur le marché du travail.
«C’est un véritable recul pour la condition féminine que de voir des milliers de femmes retarder un retour au travail et perdre des gains en raison de la pénurie de places en garderie», s’inquiète la porte-parole de Ma place au travail.
Selon l’OBNL, le manque de places en services de garde éducatifs fragilise les familles et précarise particulièrement les femmes. «On a dit aux femmes de notre génération d’aller à l’école, de faire des carrières. On est en pénurie de main-d’œuvre dans de nombreux secteurs et là on est forcé de faire un choix entre la famille et le travail. Ce n’est pas normal que tout ça repose sur le dos des mères», explique Mme Lapointe-Gagnon.
En novembre 2021, Ma place au travail avait déposé un mémoire à l’Assemblée nationale pour la bonification du projet de loi N1 sur le réseau de la petite enfance. Dans ce mémoire, l’organisation a mis de l’avant six recommandations.
Depuis, il n’y a eu aucune avancée avec le gouvernement, dénonce Mme Lapointe-Gagnon. «Je vis énormément de colère depuis un an parce qu’on fait tout avec le gouvernement pour que ça avance et on n’a pas l’impression que ça avance dans la bonne direction ni assez vite non plus.»
Aide temporaire d’urgence
Ma place au travail réclame entre autres le droit à l’accès à des places en garderie de qualité à un prix abordable pour que chaque parent et chaque enfant reçoivent un service qui est essentiel à la justice sociale et à l’égalité des chances pour les femmes et les hommes. «Le ministre de la Famille [Mathieu Lacombe] a choisi de ne pas suivre cette recommandation et ça nous inquiète profondément», confie Mme Lapointe Gagnon.
L’OBNL demande également au gouvernement Legault une aide d’urgence temporaire aux familles pour pallier les pertes salariales actuelles. «On ne comprend pas quand le gouvernement nous dit que le réseau sera complété dans quatre ans et qu’en parallèle on nous dit qu’une telle aide serait trop dispendieuse. On parle d’une aide d’environ 100 millions $ par année. On s’entend que plus il y aura de place en garderie, moins cette aide coutera cher. On est vraiment dans un non-sens actuellement.»
Mais pour Myriam Lapointe-Gagnon, promettre aux familles une place d’ici quatre ans pour tout le monde est loin d’être suffisant et même irréaliste. «Il y a une pénurie de main-d’œuvre chez les éducatrices. C’est absurde de penser qu’on va trouver demain matin 18 000 éducatrices à l’enfance.
«Si on veut être patiente, ça prend une aide d’urgence en attendant. La banque qui attend l’hypothèque n’est pas patiente. Les enfants ont besoin d’être nourris. On ne peut pas sacrifier quatre ans de la vie d’un enfant et d’une famille. Ce sont des pertes de qualité de vie et ça engendre du stress sur des familles.»
Trouver des solutions
Mme Lapointe-Gagnon ne cherche pas à pointer du doigt le gouvernement. Elle souhaite au contraire trouver des solutions pour réparer une situation qui est grave. «La ministre de la Condition féminine [Isabelle Charest] a des responsabilités en lien avec le poste qu’elle occupe. Celles de veiller à l’avancement, et non au recul de la place des femmes dans la société. Le fait qu’on ne s’intéresse même pas à chiffrer cette problématique, ça nous montre que ce n’est pas une priorité gouvernementale.»
La présidente de Ma place au travail reçoit des centaines de témoignages de femmes et de mères désespérées face à la situation. «Des femmes de 20 ans décident de ne pas compléter des études parce qu’elles veulent des enfants et qu’elles voient des mères 10 ans plus vieilles qui sont désabusées. Ça m’inquiète énormément. On entend aussi beaucoup de femmes enceintes pour la seconde fois dire qu’elles ont avorté parce qu’il n’y a pas de place en garderie pour le premier.»
Elle-même a failli perdre presque 10 ans d’étude à l’université et son doctorat en psychologie parce qu’elle ne trouvait pas de place au moment où elle devait reprendre son programme d’études.
Si je ne peux pas aller travailler, c’est de nombreuses personnes que je ne peux pas aider dans mon emploi. Chaque emploi est important en ce moment au Québec, l’impact de manque de place en garderie touche tout le monde.
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«Un équivalent du Dr Arruda en environnement»
La marche organisée dimanche, jour de la fête des Mères, est une initiative de Mère au front et Ma place au travail. Les deux organismes ont souhaité se réunir en cette journée symbolique pour montrer que les changements climatiques n’ont pas seulement des conséquences sur l’environnement.
Le cri d’alarme lancé par les scientifiques est sans équivoque selon l’auteure, cinéaste et co-instigatrice de Mères au front, Anaïs Barbeau-Lavalette. «Les gouvernements ont trois ans pour réagir et prendre des décisions courageuses. Quand les mères sortent dans la rue, ça veut dire que l’heure est grave pour l’avenir de nos enfants.»
L’organisme souhaite que le gouvernement Legault adopte une loi-cadre, qui oblige le gouvernement à passer toutes ses décisions au crible de leurs impacts sur l’environnement et l’équité sociale, et nomme un conseiller scientifique pour l’environnement.
«Ce gouvernement en a plein les épaules depuis quelque temps. La première chose à faire est de mieux s’entourer et de nommer un conseiller scientifique qui réfléchit à toutes les décisions gouvernementales qui sont prises, comme le Dr Arruda l’a fait pendant la pandémie. Ça prend un équivalent du Dr Arruda en matière d’environnement», explique Mme Barbeau-Lavalette.
Cette mobilisation politique et poétique est menée sous la direction artistique d’Anaïs Barbeau-Lavalette et de Brigitte Poupart. Melissa Mollen Dupuis, Françoise David, Jessica Barker, Danielle Proulx, Laure Waridel, les sœurs Boulay, Christian Bégin, Eve Landry, Sarah Montpetit et Myriam Lapointe-Gagnon seront présents, de même que plusieurs autres personnalités publiques et politiques de différents partis.
Mentionnons également la présence d’Antoine Desrochers, Rose Marie Perreault, Robin L’houmeau, Éléonore Loiselle, Kelly Depeault et Zeneb Blanchet, qui prendront la parole devant l’Assemblée nationale au nom de la jeune génération qui ne veut plus faire d’enfants dans le contexte social et environnemental actuel.
La marche débutera au parc du Musée à midi, sur les plaines d’Abraham, et se terminera devant l’Assemblée nationale.