Apprendre à vivre avec l’anxiété, c’est apprendre à s’écouter

Robin Williams est décédé le 11 août 2014.

POINT DE VUE / Le 11 août 2014 a été un moment marquant dans ma vie. C’est cette journée que le grand acteur Robin Williams est décédé. Cet élément fut pour moi un point de basculement. C’est donc également lors de cette journée que j’ai annoncé à mes amis et à mes proches, via les réseaux sociaux, que je vivais moi aussi avec un trouble de santé mentale, plus précisément avec l’anxiété.


Pendant près de 20 ans, j’ai tout fait pour cacher mon diagnostic, trop humilié du regard des autres et de la société. Pour être honnête, je ne voulais pas l’accepter. Si vous m’aviez demandé en 1994 si j’avais préféré être diagnostiqué avec un trouble de l’anxiété ou un cancer, c’est ce dernier qui l’aurait remporté. L’anxiété m’amenait une honte, une colère.

Tout comme Robin Williams, j’ai joué un rôle. Je voulais que personne ne sache que je vivais avec un trouble de santé mentale par peur d’être perçu comme étant atypique, faible ou simplement fou. Mon remède: l’évitement. Les résultats qui en ont découlé: des crises de panique à répétition.

En 1994, il n’y avait pas de Semaine de la santé mentale. Je vivais mes propres épisodes d’anxiété et de panique seul, sans repère, sans accompagnement outre celui de mon médecin. Au début, l’anxiété se manifestait comme un vrai coup de poing. Lors de ma première crise de panique, j’étais convaincu que j’avais une crise cardiaque. Les symptômes étaient similaires: pression sur la poitrine, bras gauche engourdi, vision rétrécie, sueur et étourdissements. Ces crises se multipliaient. Durant les quelques minutes de chacune, j’avais l’impression de mourir.

J’ai vécu le confinement bien avant la pandémie de la COVID-19. Pendant près d’une décennie après mon diagnostic, j’évitais de sortir de chez moi le plus possible. J’évitais les transports, les lieux publics et les stimuli. En 2004, j’étais tanné de souffrir, la vie ne tenait plus qu’à un fil. J’ai même été sauvé in extremis, par l’appel d’un ami. Sentant que j’avais besoin d’aide, il est venu me chercher et m’a aidé — c’est par ailleurs ce soir-là, quelques heures après cet épisode de grande peine, que j’ai rencontré la mère de ma fille.

C’est notamment à ce moment que j’ai décidé de donner une chance à la vie.

L’anxiété sera toujours présente dans ma vie, je sais que je n’en guérirai jamais. Mais aujourd’hui, mon niveau d’anxiété est moins élevé qu’auparavant. Je suis désormais en mesure de reconnaître les signes et les éléments déclencheurs et de m’assurer de donner à mon corps ce dont il a besoin. De mon côté, j’ai besoin de temps personnel pour recharger mes batteries et j’ai ma propre formule gagnante pour réduire les risques.

L’autogestion est clé pour les personnes vivant avec de l’anxiété. Chaque individu a ses limites et ses «stresseurs», il leur suffit d’avoir les outils nécessaires pour les reconnaître et les contrôler afin de reprendre du pouvoir sur leur santé mentale. Que ce soit à travers la médication, la méditation, la luminothérapie ou un meilleur contrôle du sommeil, l’important c’est de comprendre ce qui fonctionne pour soi.

Démystifier l’anxiété est devenu ma mission personnelle et professionnelle. Avec Relief, anciennement Revivre, depuis 31 ans, nous outillons et offrons du mentorat aux personnes vivant avec l’anxiété, la dépression et la bipolarité, en complémentarité aux services psychologiques et médicaux. Nous éduquons les proches, les employeurs et la société aux réalités des personnes vivant avec des troubles de santé mentale.

Soyons à l’écoute des signes que nous envoie notre corps, afin de s’aider mieux, de s’aider plus.