Inscriptions aux camps de jour: une course contre la montre

À 6 h, mercredi, l’alarme a sonné. À 6 h 30, le formulaire pour l’inscription au camp de jour était préparé. À 6 h 58, Nathalie était déjà installée devant son écran. À 7 h, la course contre la montre était lancée. Victoire! Les deux enfants auront une place.


Pour plusieurs organismes, les places étaient toutes comblées dès 7 h 05. Tous les parents arrivés un peu en retard ont dû renoncer au camp ou se trouver un plan B.

«Une amie à moi a réussi à avoir la dernière place d’un groupe à 7 h 01», raconte Nathalie. 

Des parents ont pu garantir la place d’un enfant sur trois… Les frères et sœurs n’iront pas au même camp de jour cette année. 

«Le camp de jour est essentiel. L’offre devrait être égale à l’offre scolaire. Et ça ne couvre même pas tout l’été. Il faut s’ajuster entre la fin du camp de jour et l’entrée à l’école», s’entendent pour dire les parents rencontrés par Le Soleil

En plus d’offrir des activités éducatives et sportives aux enfants, le camp de jour permet aux parents d’aller travailler sans soucis. 

Dans la ville de Québec, les inscriptions se sont déroulées lundi, mardi et mercredi dès 7 h pour les différents arrondissements. Il fallait décidément inscrire les dates au calendrier, les places étant limitées…

L’organisation et l’inscription des camps de jours relèvent de 27 organismes de loisirs mandatés par la Ville et répartis sur l’ensemble du territoire. Sur les 14 000 places prévues — le même nombre que l’année dernière — des places demeurent disponibles dans tous les arrondissements sur les listes d’attente. 

Certains sites affichent déjà complet «parce qu’ils ont atteint leur capacité maximale sécuritaire».

Au point de vue technique, les inscriptions se sont bien déroulées, signale la Ville de Québec. Cependant, six plaintes ont été formulées à la ville de Québec concernant le manque de place dans certains sites de camps plus populaires. 

«Le nombre total de places offertes sur le territoire est déterminé conjointement par la Ville et les organismes, selon la capacité des organismes, la disponibilité du personnel, et l’espace des locaux et sites disponibles», explique David O’Brien, porte-parole de la Ville.

La pénurie de main-d’œuvre touche les camps de jour et s’avère un des principaux enjeux pour les organismes, elle a un impact direct sur l’offre de places disponibles. «Plusieurs organismes de loisirs ont des enjeux de recrutement et mettent beaucoup d’efforts pour la recherche d’animateurs afin d’assurer l’offre de service à l’été 2022, cela demeure la priorité avant de pouvoir penser à une augmentation de places disponibles», ajoute David O’Brien.

La Ville encourage d’ailleurs les jeunes travailleurs à choisir ce secteur d’activité pour leur emploi d’été. 

Une tendance dans la province 

L’impression d’un manque de places dans les camps de jour n’est pas propre à la Ville de Québec.

«C’est une tendance qu’on observe de plus en plus, partout dans la province», note Éric Beauchemin, directeur général de l’Association des camps du Québec, membre du Conseil québécois des loisirs. 

Les programmes municipaux — gérés en partie par les villes — demeurent abordables. D’autres organismes et camps privés offrent des activités pour une portion de jeunes, mais sont plus dispendieux, moins accessibles à tous.

Dans plusieurs cas, les camps attendent de compléter leur équipes avant d’ajouter des groupes, le nombre de jeunes admis dépend des animateurs engagés et des locaux disponibles. 

«Je salue la prudence. Il ne faut pas ouvrir des places démesurément. On entend partout qu’il manque de monde! La pandémie n’a pas aidé pour conserver la main-d’œuvre», souligne M. Beauchemin. 

Le cadre de référence du Conseil québécois des loisirs pour les camps de jour municipaux est de 1 animateur pour 15 enfants. «On est en 2022… plus d’enfants que ça, c’est trop. Si on a de l’aide d’un apprenti animateur, qui représente deux supports pour les enfants, c’est raisonnable de penser à un groupe de 18 enfants», explique Éric Beauchemin. 

Encadrement des camps de jour

Le Conseil québécois des loisirs et ses partenaires du milieu tendent la main au gouvernement. Les camps de jour «ont besoin d’un meilleur encadrement» du gouvernement, ainsi que plusieurs engagements comme un financement à la hauteur de leur importance dans la vie des familles. 

Depuis plusieurs années, les camps de jours permettent la conciliation travail-famille lorsque l’école prend congé.

«À l’an 1 de la pandémie, il fallait absolument ouvrir pour contribuer à la relance économique. Les parents organisent leur été en comptant sur les camps de jour pour assurer un service de garde, au-delà du programme d’apprentissage et de loisirs. Il y a une grosse attente des familles et une grande responsabilité des municipalités d’offrir ce service. On n’est pas un service essentiel… mais on est très important», soulève Éric Beauchemin. 

Bonifier l’offre et le volume de places accessibles fait partie des demandes, ainsi qu’un accès facilitant à des locaux et infrastructures adéquats. Louer le terrain d’une école pour un camp de jour ne devrait pas coûter une fortune.

Surtout, pour attirer la main-d’œuvre, les camps ont besoin de financement afin d’offrir de bons salaires. Actuellement, si le salaire des animateurs augmente, le prix d’inscription pour les parents sera plus élevé. Ainsi, certaines familles doivent renoncer au camp de jour parce qu’il apparaît trop dispendieux. 

À la Ville de Québec, l’inscription d’un enfant dans un camp de jour pour tout l’été (4 semaines ou plus) coûte 375 $. 

«Il faut reconnaître notre importance dans la société québécoise. On a une belle collaboration dans le milieu, mais on doit aller plus loin. On ne met pas de chiffres sur la table, mais on veut des actions concrètes», ajoute le directeur général de l’Association des camps du Québec.

Il lance donc un appel au ministère de la Famille, de la Santé ainsi qu’au ministère de l’Éducation, des Loisirs et des Sports, par exemple. 

«On nous demande d’intégrer les jeunes avec des besoins particuliers. D’accord, avec plaisir. Mais on n’a pas de soutien supplémentaire en suivi à ces jeunes. Il faut nous accompagner. On a besoin d’aide pour bien faire les choses. Ça commence par du financement», ajoute-t-il. 

Sécurité

Le Conseil a aussi une préoccupation pour la sécurité des enfants. Ses membres ont établi des normes à respecter, mais elles ne sont pas obligatoires pour les camps de jours privés, par exemple. 

«Beaucoup de milieux offrent des programmes de camps de jours sans normes strictes, il n’y a pas d’obligation pour l’encadrement. Minimalement, tous les animateurs de camps de jour devraient suivre une formation de premiers soins et n’avoir aucun antécédent judiciaire, par exemple», explique M. Beauchemin.

Il faudrait que les enfants bénéficient du même degré de sécurité partout. «Il y en a qui opèrent sans permis… On ne veut pas réagir quand il y aura un accident», exprime M. Beauchemin.