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Officiellement, il dit soutenir encore le projet, mais les nouvelles conditions qu’il pose commencent à ressembler à la quadrature du cercle.

Il voudrait que la Ville protège les arbres matures sur le passage du tramway, mais rejette le scénario d’une «rue partagée» qui épargnerait un maximum d’arbres, mais freinerait le trafic sur René-Lévesque.

Le gouvernement dit craindre que la circulation en haute ville en soit perturbée et que le trafic «supplémentaire» que devrait absorber Grande Allée allonge les files d’attente à l’approche des ponts.

La préoccupation semble légitime. Le gouvernement aurait cependant intérêt à jeter un coup d’oeil sur la carte. Il verrait que le boulevard René-Lévesque se déverse déjà sur Laurier au niveau de l’avenue des Gouverneurs.

Tout son trafic se retrouve déjà dans la file d’attente des ponts l’après-midi. Une rue partagée près de la rue Cartier et une autre près du Collège Garnier n’ajouteraient pas de nouvelles voitures sur Laurier. Elles feraient juste modifier le trajet pour y arriver.

Cet argument de la rue partagée ressemble à un faux-fuyant du gouvernement, un autre, pour neutraliser le projet de tramway et ne pas l’avoir dans les pattes lors de la prochaine campagne électorale.

Le détail des conditions sera connu le 6 avril. On comprend que le gouvernement s’apprête à renvoyer la balle dans le camp de la Ville.

«Nous allons mettre des conditions et la Ville y répondra», prévient une source haut placée. «Ce sera à elle de mettre des solutions sur la table.»

Elle ignorait tout des nouvelles exigences du gouvernement Legault. La ministre Geneviève Guilbault en a informé le maire sans lui donner les détails, quelques heures seulement avant que Le Journal de Québec en fasse état mardi après-midi.

Je ne sais pas ce qu’on doit en comprendre.

La logique et la politesse voudraient qu’on informe d’abord le principal partenaire quand on s’apprête à changer les règles du jeu en cours de route.

Depuis novembre, les administrations Marchand et Legault avaient entretenu des relations harmonieuses qui tranchaient avec l’époque Labeaume.

On sent désormais qu’il y a du sable dans l’engrenage et on retrouve un rapport de force qui ressemble à ce qu’on a connu sous l’ancienne administration. Les lunes de miel ont toujours une fin. C’est ici que s’arrête celle entre M. Marchand et le gouvernement Legault.

Québec attendait ces jours-ci un feu vert qu’elle croyait être une formalité pour lancer des appels de proposition sur le matériel roulant et les infrastructures du tramway.

Tout est maintenant remis en question, car il est peu probable que l’administration Marchand renonce à sa rue partagée.

D’abord parce qu’elle est convaincue que c’est la meilleure solution. Et aussi, parce qu’elle estime que le sujet est de «compétence» municipale.

Le gouvernement dit n’avoir appris que tout récemment que la Ville privilégiait un projet de rue partagée pouvant avoir des impacts sur la circulation en haute ville.

Cela étonne.

Ce scénario (et deux autres envisagés pour le secteur Cartier) sont sur la table du gouvernement depuis juin 2021.

En campagne l’automne dernier, M. Marchand avait exprimé sa préférence pour une rue partagée.

Il a réitéré cette préférence en décembre, puis à nouveau en janvier lors de son «état des lieux» du tramway. Le projet a depuis fait l’objet de discussions entre la Ville et le gouvernement sans que jamais celui-ci évoque des conditions nouvelles ou un refus de la rue partagée.

Que s’est-il donc passé qui pourrait expliquer ce nouveau coup de frein du gouvernement Legault pour le projet de tramway?

Je vous soumets quelques hypothèses:

1- Le gouvernement est de bonne foi. Il craint que la circulation plus lourde sur Grande Allée nuise à l’accès aux ponts et veut éviter des dommages. Cette crainte a été exacerbée par la diffusion récente d’une étude préliminaire de circulation.

Le gouvernement redoute que des citoyens de la rive sud et de la périphérie nord-ouest en souffrent. Et comme le «hasard» veut qu’il s’agisse de circonscriptions qui ont voté pour la CAQ, la sensibilité au trafic s’en trouve augmentée. Si l’objectif est vraiment de «sécuriser» l’accès aux ponts, les faits devraient finir par avoir raison des appréhensions.

Pour l’heure, il n’y a aucune étude suggérant qu’une rue partagée au centre-ville engorgerait l’accès aux ponts.

2- La montée à Québec du Parti Conservateur de Éric Duhaime incite peut-être le gouvernement Legault à lever le pied sur le tramway.

Pour l’essentiel, M. Duhaime courtise les mêmes électeurs que la CAQ et il est un farouche opposant au tramway. La CAQ ne voudra pas lui abandonner la clientèle des opposants.

3- La déclaration du maire Marchand voulant «qu’on ne construit pas un tramway pour les gens de Portneuf, Château-Richer ou Saint-Apollinaire» a déplu.

Le gouvernement dit tenir à ce que le projet de «réseau express de la capitale» soit au bénéfice de toute la région métropolitaine de Québec et pas seulement à celui des citoyens de Québec. Il a lui-même pris en charge l’an dernier les futurs corridors de voies réservées sur les autoroutes pour s’assurer que les banlieues trouvent aussi leur compte dans le projet.

«Nous sommes le principal bailleur de fonds de ce projet et c’est notre responsabilité de nous en assurer», insiste le gouvernement.

Suggérer le contraire n’a pas plu, mais ce serait un motif bien mince pour renoncer à un projet d’une telle ampleur.

4- Le refus du maire de marchander son appui au troisième lien contre les décrets du tramway a manifestement déçu au gouvernement.

Celui-ci veut-il faire pression sur la ville en stoppant le tramway? Ou punir le maire pour son irrévérence et son indépendance d’esprit?

J’aime penser que les ambitions de la CAQ sont plus nobles, mais c’est une hypothèse qui ne peut être écartée.

5- La CAQ a toujours eu un intérêt mitigé pour le tramway. Le faible appui populaire pour le projet n’a rien fait pour stimuler son appui. Les nouvelles conditions qu’il impose à la ville ne seraient-elles qu’un prétexte pour «tirer la plug» sans en porter l’odieux?

La suite bientôt.

***

Personne ne va lever le nez sur un «chèque» ou un virement bancaire de 500 $.

Portée par la guerre en Europe et les sursauts de la pandémie, l’inflation restera élevée au moins jusqu’à l’an prochain.

Le coup de pouce aux citoyens au sortir d’une pandémie éprouvante, sera généralement bienvenu.

On peut bien dénoncer le caractère «électoraliste» et éphémère de la mesure ou déplorer qu’elle profite aussi à des «riches» qui n’en ont pas besoin.

On peut lui reprocher de s’attaquer de façon imparfaite aux effets de l’inflation plutôt qu’aux causes de l’appauvrissement des familles.

La réalité est cependant que les citoyens n’en tiendront pas rigueur au gouvernement et lui diront merci.

J’ai pourtant l’impression que si je demandais aux citoyens de Québec ce qui les préoccupe aujourd’hui, ce n’est pas de l’inflation dont ils me parleraient d’abord.

Ils me parleraient de la difficulté d’accès à un médecin de famille et de la pénurie de main-d’oeuvre qui érode de plus en plus la qualité des services et ce faisant, la qualité de vie. Pour d’autres, ce sera l’urgence climatique peut-être.

En décembre dernier, plus de 111 500 citoyens de la région de Québec étaient sur la liste d’attente pour un médecin. Sans compter Chaudière-Appalaches.

Loin de s’estomper, le problème s’amplifie de gouvernement en gouvernement, de promesses d’élection en promesses d’élection.

Y a-t-il dans ce nouveau budget de quoi faciliter l’accès à un médecin ou à des soins de première ligne?

Peut-être, mais on n’y voit rien de concret encore.

Le gouvernement promet d’ajouter 9 milliards$ en cinq ans pour «rétablir le système de santé» et «rehausser» les soins et les services.

Quand, comment et avec quel effet sur les délais d’attente?

Le ministre des Finances Éric Girard n’a cependant pas de réponse précise à offrir. Il appartiendra à son collègue ministre de la Santé de le préciser, dit-il.

Il est connu déjà que la solution ne se trouve pas seulement dans les budgets.

Elle est aussi dans une réorganisation du travail et des soins de première ligne; dans un meilleur partage des tâches entre professionnels de la santé; dans la mise en place de guichets d’entrée plus efficaces; dans un recours accru aux nouvelles technologies, etc.

Quand verrons-nous au bout de nos téléphones ou de nos ordinateurs les résultats tangibles des réformes et milliards $ annoncés? Allez savoir.

Le budget 2022-23 offre par ailleurs très peu pour lutter contre la pénurie de main-d’œuvre qui à Québec comme ailleurs, freine les entreprises et compromet les services.

À peine une courte mesure pour favoriser l’intégration des immigrants pendant les cinq prochaines années. Pas de nouveaux incitatifs fiscaux pour retenir des travailleurs ou les encourager à revenir.

Pas d’efforts de formation supplémentaires en proportion de ce qui serait nécessaire. On semble faire le pari que la pénurie de main-d’œuvre finira par se résorber d’elle-même.

***

Les villes en général et celle de Québec en particulier avaient des attentes élevées pour le logement social. 500 unités par année d’ici 2025, avait souhaité le maire Bruno Marchand.

Un budget est cependant le résultat d’arbitrages entre les besoins et demande de tout le monde. Québec devra se contenter de moins. Question de mathématique.

Le gouvernement va financer 3500 unités de supplément au loyer et 1000 nouvelles unités de logement abordable pour l’ensemble du Québec. On peut spéculer sur la part qui viendra à Québec, mais on sera nécessairement loin du compte.

***

Pas un sou pour le tramway ni pour le troisième lien dans le nouveau Plan québécois des Infrastructures (PQI).

En fait, le mot tramway n’apparaît qu’une fois, à la page 66 d’un document qui en fait 175, noyé dans la liste des modes de transport collectif que soutient le gouvernement et sans référence au projet de Québec.

Il n’y a pas à s’en réjouir ou à s’en inquiéter.

La pratique est d’inscrire des sommes d’argent au PQI à partir du moment où un projet entre en phase de «réalisation». Ce n’est pas le cas du tunnel Québec-Lévis ni du tramway, même si le gouvernement a déjà versé quelques centaines de millions pour le tramway.

Cela ne veut pas dire qu’on ne planifie pas ces dépenses, a expliqué la présidente du Conseil du Trésor, M^me Sonia Lebel. Il y a un «provisionnement progressif», décrit-elle.

En d’autres mots, il n’y a rien encore dans les documents écrits, mais l’argent est là qui attend, quelque part dans le nuage sidéral des dépenses du gouvernement. Il suffit d’y croire.

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