Aujourd’hui, 25 ans plus tard, nous voilà aux antipodes, alors que le taux de chômage est sous la barre du plein-emploi à 4,5% et que 280 000 postes sont à combler dans pratiquement tous les domaines d’activité. Dans la conjoncture actuelle, pourrait-on envisager d’adopter des mesures assez alléchantes pour convaincre les retraités de revenir sur le marché du travail en aussi grand nombre?
C’est ce que souhaite le Conseil du patronat du Québec (CPQ), qui a publié en décembre une étude révélant que la pénurie de main-d’œuvre actuelle continuera de s’aggraver au cours des prochaines années, alors qu’on estime qu’il y aura, en 2030, 102 000 personnes de moins en âge de travailler qu’en 2019.
Les aînés en renfort
L’étude avance que la solution la plus naturelle est d’encourager le prolongement de la vie active chez les travailleurs à l’aube de la retraite. Tout en reconnaissant que le taux d’activité des 60 ans et plus s’est accru de 42% à 52% au cours des dix dernières années, le CPQ cite en exemple d’autres sociétés vieillissantes qui font mieux à ce chapitre comme le Japon (71%), la Suède (74%) et l’Islande (80%).
Bien sûr, il est beaucoup plus facile d’inciter quelqu’un à cesser de travailler que l’inverse. C’est pourquoi le Conseil a émis 29 recommandations qui visent à atténuer les impacts socio-économiques liés au vieillissement de la population. Parmi celles-ci il y a la possibilité d’interrompre ses cotisations au Régime des rentes du Québec (RRQ) lorsqu’on travaille après l’âge de 65 ans, comme le permet le Régime de pensions du Canada (RPC). Présentement, les travailleurs québécois doivent cotiser au Régime de rentes du Québec dès que leurs revenus d’emploi dépassent l’exemption générale
de 3500$.
Le gouvernement Legault a tout de même déjà amélioré les conditions des travailleurs de plus de 60 ans. Lors du dépôt de son budget de mars 2019, le ministre des Finances, Éric Girard, a annoncé que «pour une personne de 60 ans n’ayant que des revenus de travail, le crédit d’impôt bonifié viendra augmenter de 18 129$ à 28 226$ le niveau de revenu à partir duquel elle paie de l’impôt au Québec». Il évaluait alors que cette mesure toucherait près de 158 000 travailleurs, «dont plus de 20 000 qui n’auraient plus d’impôt du Québec à payer». Vu l’ampleur actuelle de la pénurie de main-d’œuvre, le ministre des Finances pourrait annoncer d’autres mesures favorisant le retour au travail des 60 ans et plus lorsqu’il déposera son prochain budget le 22 mars.
Inflation et âge de la retraite
Entre 1976 et 2007, l’âge de la retraite a graduellement diminué de 65,1 ans à 59,9 ans, selon Statistiques Canada. Depuis, elle a repris une courbe ascendante pour atteindre 62,3 ans en 2014.
Une des explications justifiant un départ plus tardif à la retraite au cours des dernières années serait le fait que les Québécois sont de plus en plus endettés. Un rapport publié en 2019 par Desjardins indique que la proportion de ménages québécois de personnes âgées endettées est passée de 27,5% en 1999 à 40,1% en 2016. Les deux tiers de cette augmentation sont attribuables à la dette hypothécaire alors que l’autre tiers à la dette liée à la consommation.