Le lavage des bateaux devient obligatoire et payant au lac Mégantic

Il faudra obligatoirement laver son embarcation pour pouvoir naviguer sur le lac Mégantic à compter de cet été, et payer pour le faire.

Il faudra obligatoirement laver son embarcation pour pouvoir naviguer sur le lac Mégantic à compter de cet été, et payer pour le faire.


Les quatre municipalités riveraines de ce plan d’eau ont dévoilé lundi les modalités de cette nouvelle exigence annoncée le printemps dernier et qui entrera en vigueur le lundi 9 mai.

Ainsi, avant de mettre leur bateau à l’eau sur le lac Mégantic ou le lac aux Araignées, les plaisanciers devront préalablement nettoyer leur embarcation et leur remorque à l’une des trois stations de lavage situées au rond-point des routes 161 et 263 à Nantes et au parc riverain Sachs-Mercier à Frontenac. 

Le fonctionnement des stations de lavage et des descentes à bateau sur le lac Mégantic a été présenté en conférence de presse par Peter Manning, maire de Piopolis et président du comité intermunicipal Municipalités riveraines du lac Mégantic, unies pour la santé du lac, Claude Roy, maire de Marston, Lucie Bélanger, mairesse suppléante de Frontenac, et Julie Morin, mairesse de Lac-Mégantic.

50 $/lavage

Le lavage obligatoire ne sera toutefois pas sans frais pour les utilisateurs de ces deux plans d’eau. 

Les résidants des quatre municipalités riveraines (Lac-Mégantic, Piopolis, Frontenac et Marston) devront se procurer une vignette au coût de 25 $ pour chacune de leur embarcation motorisée ou non motorisée, mais sur remorque. Cette carte annuelle leur permettra de procéder à des lavages gratuits illimités pour avoir accès aux deux plans d’eau.

Pour ce qui est des non-résidants, ils devront acquitter un tarif de 50 $ à chacune de leur visite à la station de lavage. Le coupon qui sera alors émis permettra d’ouvrir la barrière deux fois, soit pour accéder au lac dans les 24 heures suivant le lavage et pour en sortir.

Unique au Québec

Le projet déployé autour du lac Mégantic est novateur à la fois par la concertation des quatre municipalités riveraines, mais aussi et surtout par la technologie qui a été développée pour que le système fonctionne 24 heures par jour, sept jours par semaine, sans employé, et qu’il transmette les informations aux six descentes à bateau.

«Cette technologie permet une grande souplesse dans les heures d’ouverture et sans elle, le nombre d’employés qui aurait été nécessaire n’aurait pu être comblé dans le contexte de pénurie de main-d’œuvre que nous vivons présentement», a détaillé le maire de Marston, Claude Roy, en rappelant que les pêcheurs accèdent très tôt aux lacs et que les plaisanciers, au contraire, en sortent souvent après le coucher du soleil.

«Le projet qu’on présente n’existe pas ailleurs au Québec, soutient Peter Manning. Et on est regardé actuellement par beaucoup d’associations et d’organisations.» 

«C’est un projet novateur qui va demander une période d’adaptation, mais il est essentiel pour la pérennité de nos lacs», ajoute-t-il.

La mise en place des stations de lavage, des barrières levantes et du système de contrôle informatique a nécessité des investissements de plus de 560 000 $, partagés à parts égales par les quatre municipalités riveraines. 

Une partie de ce financement (80 000 $) provient du Fonds région et ruralité du ministère des Affaires municipales et de l’Habitation via la MRC du Granit.

Les dépenses d’opérations sont également estimées à 80 000 $ par année.

Le site web lavetonbateau.com donne tous les détails sur le fonctionnement des stations de lavage et des barrières levantes.

Une séance d’information est aussi prévue le jeudi 10 mars à 19 h au Centre sportif Mégantic. 



La chargée de projet Marie-Christine Picard a expliqué le défi technique qui sous-tend la conception du système qui entrera en opération le lundi 9 mai.


Et la capitainerie de Lac-Mégantic?

On peut difficilement parler de plaisance sur le lac Mégantic, sans demander si un projet de construction d’une capitainerie à la marina de Lac-Mégantic est enfin sur la table, neuf ans après la tragédie ferroviaire qui a rasé l’installation précédente en juillet 2013. Un promoteur privé a déposé un projet « assez récemment », confirme la mairesse Julie Morin, et une demande de certificat d’autorisation a été adressée au ministère de l’Environnement par la Ville de Lac-Mégantic en décembre dernier pour l’aménagement de la partie de terrain qui va rester de propriété municipale. «On est en discussion avec ce promoteur-là. Ce ne sera pas pour cet été, mais on espère vraiment pour 2023», dit-elle. Pour la première fois en 2021, la Ville de Lac-Mégantic a également dû gérer une liste d’attente pour les 115 places à quai dans sa marina du centre-ville. Les plaisanciers qui renouvellent et les citoyens de Lac-Mégantic ont priorité.

«Je trouve ça complètement discriminatoire de nous imposer un tarif de 50 $ par sortie comparativement à 25 $ annuellement pour un résidant», lance Marcel Lachance, un Sherbrookois qui possède un chalet à Chartierville et qui pêche depuis 35 ans au lac Mégantic de même qu’au lac Memphrémagog. 

Le citoyen s’était glissé dans la salle pour la conférence de presse des municipalités riveraines lundi à Lac-Mégantic.

«On a appris la nouvelle en fin de semaine, explique-t-il en entrevue avec La Tribune. On est d’accord avec l’installation des stations de lavage et on comprend qu’il y a des frais reliés à ça. Mais à 50 $ par sortie, c’est inacceptable, et on va le contester fortement.»

M. Lachance est d’autant plus outré que selon lui, les pêcheurs qui ne sont pas résidants des municipalités riveraines contribuent à l’économie locale en dépensant davantage dans les petits commerces locaux, en essence, restauration et équipements de pêche. 

Or à 50 $ par mise à l’eau, cela peut devenir un frein pour les petites familles ou les courtes sorties de fin de journée, estime celui qui jugerait plus acceptable qu’on impose un tarif unique de 10 $ par exemple pour les résidents comme pour les non-résidents.

«Au lac Memphrémagog, ç’a commencé avec un 10 $ il y a quelques années et graduellement les prix ont augmenté jusqu’à atteindre 50 $ aujourd’hui. Ce n’est pas vrai qu’on va se faire avoir ici aussi», avertit Marcel Lachance, en glissant qu’au Vermont et au New Hampshire, l’accès aux plans d’eau est gratuit même pour les Québécois.

Libre accès à tous les Québécois

Dans la salle, un citoyen de la région qui s’est dit membre du groupe Unis pour la faune a quant à lui salué le travail qui se fait pour protéger le lac Mégantic, mais déploré du même souffle que ce soit les municipalités riveraines et les utilisateurs qui se retrouvent à devoir en assumer la facture. 

Jean Légaré estime que cette responsabilité devrait incomber au palier de gouvernement supérieur et que l’accès aux plans d’eau devrait rester libre pour tous les contribuables québécois. 

«Il est peut-être temps qu’au Québec, en tant que payeurs de taxes, on se réunisse et qu’on implique nos gouvernements, a-t-il invité. Le gouvernement de [M. Legault] a promis il y a quatre ans de régler le problème des conflits d’usage face à l’accès aux plans d’eau. On est les seuls en Amérique du Nord à imposer des tarifs pour avoir accès à une richesse collective. J’espère qu’on pourra travailler en collaboration pour offrir un accès plus équitable à notre ressource qui appartient à tout e monde.»

Marcel Lachance pêche dans le lac Mégantic depuis 35 ans.

Responsabilité partagée

La mairesse Julie Morin a quant à elle répondu qu’elle comprenait les doléances des pêcheurs et que le tarif de 50 $ pour les non-résidents avait été établi après avoir étudié ce qui était en vigueur ailleurs dans la province, et notamment des tarifs quotidiens de plus de 200 $ dans les Laurentides, a-t-elle souligné.

Elle a aussi assuré que la discussion était ouverte avec l’Association chasse et pêche de Lac-Mégantic et que la main était aussi tendue vers les autres municipalités de la région de Mégantic pour qu’elles participent au projet par des ententes intermunicipales, qui permettraient d’étendre la tarification de résidents à leurs propres citoyens.

«Il fallait d’abord s’entendre à quatre sur ce qu’on était prêts à investir dans ce système, explique Mme Morin. Maintenant que c’est fait, il faut que les citoyens se fassent entendre pour que leur municipalité voie l’importance du lac pour eux.» 

«Ce n’est pas vrai que c’est juste aux quatre municipalités [riveraines] à absorber les coûts quand ça va mal et que quand il est question d’accessibilité, c’est le lac à tout le monde. Il faut que ce soit une responsabilité partagée», martèle Mme Morin.

Myriophylle et moules zébrées

Enfin le président de l’Association de protection du lac Mégantic a salué l’aboutissement de cet important projet auquel l’APLM collabore depuis les tout débuts, après avoir levé le drapeau rouge sur la présence de myriophylle à épis en 2018. 

«Nous pensons que le prochain défi de la mise en opération des stations de lavage en sera un de communication avec le public en général, et plus particulièrement avec les usagers du lac», a exprimé Robert Mercier. 

«Il faut qu’ils comprennent bien l’importance de ces mesures face à la menace du myriophylle à épis et des autres espères exotiques envahissantes, dont les conséquences sont la perte de biodiversité, la limitation pour les activités nautiques et pour la pêche, ainsi que la diminution potentielle des valeurs foncières.»

« Le myriophylle est un cancer qui ne partira jamais, mais qu’il faut contrôler, a conclu le maire de Marston Claude Roy. Et ce qu’il faut tenter d’enrayer aussi pour les années à venir, c’est des choses comme la moule zébrée, la moule brune, ou d’autres espèces qui s’accrochent aux embarcations et qui viennent envahir nos lacs. » 

« La moule on disait que ça ne pouvait pas vivre dans nos lacs jusqu’à ce qu’on en trouve au lac Memphrémagog et au lac Massawippi. Si on n’est pas prévoyants et qu’on ne cherche pas à aller de l’avant, on va finir par avoir le problème nous aussi. »