L'anniversaire (pas célébré) de la COVID au Québec

Les Québécois soulignent un anniversaire désagréable le 28 février, celui du premier cas de COVID-19 confirmé dans la province. Le virus a maintenant deux ans.

Les Québécois soulignent un anniversaire désagréable le 28 février, celui du premier cas de COVID-19 confirmé dans la province. Le virus a maintenant deux ans. Entrevue avec le virologue de l’Institut national de recherche scientifique (INRS) Alain Lamarre.


Est-ce que nous sommes au même stade que l’an dernier à pareille date, dans notre «combat» contre la COVID? 

Il y a beaucoup plus de développements. On est très avancés au niveau de la vaccination. Il y a maintenant plusieurs antiviraux acceptés et approuvés, d’autres en développement. On sait aussi beaucoup plus comment le virus se transmet. Les mesures de santé publique, les gens les connaissent et les appliquent en général assez bien. Il y a une fatigue, mais les gens arrivent à comprendre ce qu’ils ont à faire pour éviter la transmission. 

Le Paxlovid [un médicament pour traiter la COVID-19] a un très bon potentiel de changer la donne avec Omicron. Il est efficace, contrairement à d’autres médicaments, parce que le virus a trop muté. Le problème pour l’instant est la disponibilité, s’il peut être plus disponible, ça pourrait être un atout important. 

Le vaccin est-il la grande récompense de 2021? 

Absolument. On est rendus à six vaccins approuvés au Canada. La grande majorité, presque la totalité, de la population a eu deux doses, alors que la moitié de la population a trois doses.

Le variant Omicron a changé la donne. Beaucoup de gens ont été infectés par Omicron, pas mal de gens ont une immunité face à ce variant aussi, en plus des vaccins. 

Avec Omicron, est-ce qu’on se dirige vers la fameuse immunité collective?

On n’est pas encore là. Il faut qu’un pourcentage assez élevé de la population soit immunisé, ce qui ferait en sorte que le virus n’arriverait pas à se transmettre, et ce n’est pas le cas. Le virus se transmet encore très bien. Les vaccins actuels ne préviennent pas toujours l’infection, ils sont bons pour prévenir les maladies graves causées par le virus.

Qu’est-ce qu’on ne comprend pas encore, de ce virus, après deux ans?

Il reste beaucoup de questions sur la susceptibilité des gens. Pourquoi certaines personnes vont-elles avoir une réaction ou une maladie sévère? On a une idée des facteurs de risque : les maladies chroniques, maladies pulmonaires, l’obésité… Mais il y a des gens en bonne santé qui sont très malades, d’autres n’ont presque pas de symptômes. On n’a pas encore beaucoup de détails du pourquoi certaines personnes sont plus touchées. C’est le même principe pour la COVID longue. On ne connaît pas très bien qui est plus susceptible que d’autres d’avoir la COVID longue. Toutes ces formes de diverses maladies liées à la COVID, on ne les comprend pas encore beaucoup. 

Est-ce qu’on peut prévoir mieux la suite des choses, les prochains mois? 

C’est toujours périlleux de prédire l’avenir avec ce virus-là. On est jamais à l’abri d’un nouveau variant. Ce n’est pas impossible qu’il y ait une nouvelle vague à l’automne. Mais on aura probablement un été calme au niveau des infections, comme l’année passée. 

Est-ce que le pire est derrière nous?

On ne peut pas dire non plus que le pire est derrière nous. Omicron, quand il est arrivé, on disait qu’il n’était pas dangereux parce qu’il était moins virulent et plus contagieux. C’était quand même la vague la plus meurtrière. C’est trop risqué de dire que le pire est derrière nous, je l’espère, mais c’est trop tôt. 

Est-ce que les tests rapides sont un beau cadeau cette année? 

Le gouvernement a finalement compris que c’est un outil utile, surtout dans le contexte d’Omicron, qui est très transmissible. C’est important pour les gens de savoir quand ils sont infectés et quand ils doivent s’isoler. Surtout que les tests PCR sont réservés aux personnes plus à risque. Les tests rapides sont très bons, c’est un bon outil pour savoir si on est contagieux ou pas. Comme ils sont moins sensibles que les tests PCR, ça prend beaucoup de virus pour être positif avec un test rapide. Donc, un résultat positif avec un test rapide, ça veut dire que tu es contagieux. Les tests PCR sont tellement sensibles qu’on peut être positifs sans être nécessairement contagieux. 

Est-ce qu’on a finalement mis le doigt sur la bonne période d’isolement en cas d’infection?

Ç’a toujours été imparfait comme méthode. C’est basé sur une moyenne, par définition, il y a des gens qui n’entrent pas dans la moyenne. Même après dix jours, des gens sont encore contagieux, pas beaucoup, mais c’est possible. C’est une question de gestion de risque. Par exemple, si la capacité hospitalière le permet, on peut se permettre d’être moins sévère avec le temps de quarantaine.

Doit-on recommencer à tester davantage? 

Maintenant que la vague Omicron redescend, il faudrait remonter notre capacité de dépistage. Au même niveau qu’avant la vague Omicron, pour tous ceux qui ont des symptômes et tous ceux en contact avec des personnes contaminées. On aurait une meilleure idée d’où se situe la pandémie et c’est important pour l’étudier et l’analyser. 

Après combien de temps peut-on «vivre avec le virus»?

Ça se peut que ce soit dès l’automne prochain. S’il n’y a pas d’autres variants ou sous-variants, il se peut que ce soit le cas, qu’on ait une immunité suffisante au niveau de la population. Oui, le virus va causer des infections, mais comme la grippe, il y aura des petits pics saisonniers. Des centaines de cas, mais pas d’une façon incontrôlée. Je le répète, on n’est pas à l’abri d’un nouveau variant.