Chronique|

Appel à la paix

<em>Guernica</em>, Pablo Picasso, 1937

CHRONIQUE / Plus que jamais : l’appel de la paix. L’apaisement. Le besoin de déposer : armes, combats, pouvoir, malveillance.


Plus que jamais : prendre refuge. L’offrir. Le rendre à portée. Refuge comme un salut, une oreille attentive, des bras enveloppants.

Plus que jamais : non à la guerre.

L’innocence ne doit pas mourir.

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Aujourd’hui, remplissons nos cœurs d’ondes. De positivisme. D’inquiétude bienveillante. Tournons notre vie, notre porte et notre humanité vers eux, loin, là-bas, mais si près de nous.

Un seul homme assoiffé, avide et terrible ne devrait pas être en contrôle de quoi que ce soit.

Sinon : la violence planétaire.

« Le pouvoir, du point de vue de l’expérience, n’est que le rapport de dépendance qui existe entre la volonté exprimée d’un homme et l’accomplissement de cette volonté par d’autres hommes. » (Guerre et paix, Léon Tolstoï, 1869)

Tant de violence extérieure ne peut être que le reflet d’un mal-être intérieur.

***

L’homme est une faculté qui oublie. Qui fait fi des bombes passées, du mal qui l’a traversé, de l’Histoire qui l’a perdu.

L’Histoire est une faculté qui se répète.

Par cycle, l’humain revient au début. Aux bas-fonds. N’apprend-il pas ? Ne revient-il pas d’une expérience le cœur rempli de leçons ?

Pourquoi, donc, les bombes existent-elles toujours ?

Pourquoi la guerre, si l’homme meurt au bout de 100 ans ?

Il faut plutôt vivre le plus souvent, le plus fortement. Vivre à en perdre le souffle, à s’en exploser l’âme.

Il faut vivre.

***

Non à la guerre — et plutôt guérissons.

Réveillons les drapeaux blancs. Endormons les dictatures. Qui, franchement, n’amènent rien de bon au monde.

Que l’illogisme, l’incompréhensibilité, l’inimaginable et l’inhumanité.

Sortant à peine d’une crise, voilà que l’homme en crée une autre.

A-t-il si peur du silence ?

N’a-t-il jamais goûté le bonheur de la béatitude – de rester immobile à contempler une rivière ?

Maintenant ou jamais : tenir bon et espérer. Se rappeler le droit de pleurer, d’angoisser, de se sentir impuissant. Vivre nos émotions à nous; compatir pour celles de l’autre.

Plus que jamais : faire l’amour et non la guerre.

Renouveler la bonté, la propager autour de nous. Aider une amie, écouter sa mère, appeler ses proches. À défaut de pouvoir, chacun, tendre la main vers eux, tendons-la quand même.

La violence périra par les mains de l’amour.

Le dormeur du val, Arthur Rimbaud (1888)

C’est un trou de verdure où chante une rivière 

Accrochant follement aux herbes des haillons 

D’argent ; où le soleil de la montagne fière, 

Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue, 

Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu, 

Dort ; il est étendu dans l’herbe, sous la nue, 

Pâle dans son lit vert où la lumière pleut. 

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme 

Sourirait un enfant malade, il fait un somme : 

Nature, berce-le chaudement : il a froid. 

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ; 

Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine 

Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.