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D’Éric Duhaime à Jean Charest: agitation à l’Assemblée nationale

Selon un sondage Léger mené pour les médias de Québecor, le Parti conservateur du Québec d’Éric Duhaime obtient 14 % d’intentions de vote.

CHRONIQUE / Il est toujours étonnant d’entendre des gens comme le solidaire Gabriel Nadeau-Dubois et d’autres parler comme si le Parti conservateur du Québec d’Éric Duhaime n’allait pas marquer de points aux prochaines élections générales, en octobre.


En remontée dans les intentions de vote, ce parti ne concourra pas pour la première place. Mais on aurait tort de sous-estimer ce genre de formation politique à notre époque. Ou de croire que celle d’Éric Duhaime se dégonflera avec la disparition des restrictions sanitaires.

Son parti ne remplacera évidemment pas le gouvernement de François Legault. Mais il est possible qu’il fasse mieux que Québec solidaire et que le Parti québécois en octobre prochain.

Bien sûr, on peut le dire aujourd’hui en jetant un œil au dernier sondage, un Léger mené pour les médias de Québecor, qui accorde 14 % d’intentions de vote à Éric Duhaime, ce qui le place devant Québec solidaire et le Parti québécois. Le Parti conservateur du Québec se classe de plus en deuxième position chez les francophones, ainsi que dans la région de Québec.

Les sondages, ça va, ça vient, certes. C’est changeant.

Ce qui permet tout de même d’avancer qu’il ne faut pas sous-estimer l’ancien animateur de radio, c’est tout simplement, qu’on le veuille ou non, que la place occupée par la défunte Action démocratique du Québec de Mario Dumont demeure vacante. Ce parti a connu des hauts et des bas, mais il a pu compter sur un pourcentage appréciable d’électeurs fidèles.

Quand Mario Dumont a quitté la scène politique, après avoir subi une sévère raclée aux élections de décembre 2008, sa formation venait tout de même de recueillir 16 % des suffrages.

Le Parti conservateur du Québec n’est pas le successeur comme tel de l’Action démocratique du Québec. Les deux diffèrent. Mais pour des électeurs, il représente ce que l’autre a représenté, même s’il est plus libertarien dans son approche.

Il souhaite réduire les impôts des particuliers afin, dit-il, de stimuler la croissance économique, mais aussi... d’étrangler l’État. Soyons-en avertis!

Après avoir fait le plein de personnes farouchement opposées à la vaccination et en s’opposant depuis des mois à bien des mesures visant à contrer la pandémie, il entend promouvoir un projet accordant plus de place au privé dans le domaine de la santé. Sachons-le aussi.

À moins de huit mois des prochaines élections générales au Québec, c’est un exploit politique pour le gouvernement Legault de recueillir encore 41 % d’intentions de vote. À 41 %, la Coalition avenir Québec fait encore mieux que les 37,42 % qu’elle avait recueillis lors des dernières élections.

Pointant encore une fois à 20 %, le Parti libéral du Québec fait moins bien que ses 25 % obtenus en 2018. À 12 %, les solidaires font moins bien que leurs 16 % du dernier scrutin; et, à 11 %, le Parti québécois fait nettement moins bien que ses 17 %. 

Ces trois partis d’opposition commettraient une erreur stratégique s’ils continuaient de considérer Éric Duhaime comme quantité négligeable.

Jean Charest, émoi au caucus!

D’un certain point de vue, on peut dire que le Parti québécois et Québec solidaire ont été conséquents en assumant pleinement mercredi les durs propos qu’ils avaient tenus la veille contre l’ex-premier ministre Jean Charest. Mais il n’empêche qu’ils ont manqué d’un minimum d’élégance. On a beau ne pas être libéral, on devrait convenir qu’après des années d’enquête de l’UPAC, aucune accusation n’a encore été portée contre lui.

Mais au-delà de cela, on a vu cette semaine une Dominique Anglade qui a voulu garder ses distances de l’ère Charest et des députés de son aile parlementaire qui, ministres sous son gouvernement, refusent qu’on s’en prenne à lui.

Après avoir fait le minimum la veille, Mme Anglade s’est reprise mercredi en déclarant qu’elle ne laisserait pas ses adversaires «s’essuyer les pieds sur le Parti libéral du Québec». Mais c’est la députée Lise Thériault (qui a parlé à M. Charest au téléphone mardi) qui est montée aux barricades pour défendre son intégrité. Elle a sonné la charge contre les adversaires politiques des libéraux en évoquant de nombreux dossiers qui ne sont pas à leur gloire.

Cet épisode est symptomatique d’un vrai tiraillement au sein du caucus libéral entre des députés qui, comme Mme Anglade, cherchent à prendre leurs distances des gouvernements Charest et Couillard, et un certain nombre d’autres, environ une dizaine, qui estiment qu’il n’y a pas de trait à tirer. Le parti est assis entre deux chaises.

Le nom de Jean Charest est revenu à l’Assemblée nationale parce que l’ancien premier ministre du Québec songerait à participer à la course à la direction du Parti conservateur du Canada, un parti qui n’a cessé de se droitiser depuis qu’il l’a quitté — et encore davantage depuis la dernière fois qu’il a envisagé de briguer ce même poste de chef conservateur, en janvier 2020. Pour l’heure, l’actuel militant conservateur moyen au Canada serait naturellement porté à juger Jean Charest beaucoup trop centriste.

Mais retenons ceci : si Jean Charest est intervenu auprès du caucus libéral parce qu’il était mécontent que son nom soit associé à des allégations de corruption par les autres formations politiques, c’est qu’il songe très sérieusement à se lancer.