Raviver l'habitude perdue des mouchoirs lavables

Transparente, Marie-Ève admet qu’elle n’a pas totalement réinventé la roue. On utilisait des mouchoirs en tissus bien avant les mouchoirs en papier jetables. Avec Bateau bateau, elle a surtout trouvé une manière d’adapter les mouchoirs lavables et leur utilisation aux exigences et au mode de vie actuels.

VERS LE ZÉRO DÉCHET / Il y a des habitudes qu’on change plus volontiers que d’autres. Si je n’ai pas hésité à me mettre les deux mains dans le sang menstruel pour réduire les déchets produits par mes menstruations, je n’avais pas le même empressement à changer mes habitudes en lien avec les autres sécrétions et fluides de mon corps…


Or, quand la compagnie québécoise Bateau bateau m’a proposé d’essayer ses produits, je n’avais plus vraiment de raison de me défiler. Entre les mouchoirs et le papier de toilettes lavables, j’ai décidé de commencer par la première option.

D’abord, je dois mentionner que je n’achète pas de boîte de mouchoirs en papier. J’utilise tout simplement du papier de toilette. Alors, quand j’ai mis mon nez pour la première fois dans les mouchoirs faits de viscose de bambou et de coton biologique, par contraste, c’était comme me moucher dans du cachemire.

«Je n’étais pas convaincue par ce que je trouvais sur le marché, alors je me suis dit que j’allais essayer de trouver le meilleur mouchoir lavable», partage la propriétaire de Bateau bateau Marie-Ève Lupien. Son objectif était de trouver un tissu confortable, en fibres naturelles, qu’elle n’aurait pas besoin de surjeter.

La propriétaire de Bateau bateau Marie-Ève Lupien désirait que ses mouchoirs ressemblent aux mouchoirs jetables.

Elle désirait aussi que ses mouchoirs ressemblent aux mouchoirs jetables. «C’est pour que les gens ne nous jugent pas dans la rue. C’est spécial, mais j’avais encore des appréhensions par rapport à ça moi-même. Je ne voulais pas que ce soit un frein», explique Marie-Ève.

Bateau bateau propose trois couleurs de mouchoirs : blanc, noir et crème. De fait, les blancs sont de loin les plus populaires même si le tissu provient de Chine, comme pour les noirs, alors que ceux de couleur crème sont fabriqués au Québec.



Bateau bateau propose trois couleurs de mouchoirs : blanc, noir et crème.

Ces derniers n’ont malheureusement pas la même consistance que les autres et s’effilochent plus rapidement, particulièrement avec une «laveuse HE à chargement par le haut et sans pivot», prévient le site Web de Bateau bateau.

Marie-Ève a aussi exploré l’option de valoriser des vêtements usagers pour faire ses mouchoirs. «On en a fait, on en a vendu, mais c’est tellement compliqué!» affirme-t-elle. Les deux principaux défis relèvent de l’approvisionnement et de la manutention. Il faut trouver des vêtements avec les bonnes fibres et, puisqu’il s’agit de plusieurs morceaux de tissus de différentes formes, il faut confectionner les mouchoirs manuellement.

Enfin, elle a constaté que les personnes qui achètent des mouchoirs lavables préfèrent avoir un produit neuf. Les puristes du zéro déchet confectionnent probablement eux-mêmes leurs mouchoirs avec le textile qu’ils ont à la maison, évoque l’entrepreneuse.

«On s’adresse à des gens qui ne sont pas puristes, qui veulent faire un changement, mais qui ne sont pas prêts à couper des choses chez eux. Ces gens-là veulent du beau», remarque-t-elle.

La boîte de mouchoir et la petite corbeille, tous deux faits de tissu, sont effectivement beaux — beaucoup plus que mon rouleau de papier de toilette.

Les personnes qui achètent des mouchoirs lavables préfèrent avoir un produit neuf et beau.

Pour l’instant, je réserve mes mouchoirs lavables à mon utilisation personnelle. Je ne me sens pas encore à l’aise de laver le mucus des autres, particulièrement en temps de pandémie, même si, au final, j’ai très peu de contact direct avec cette sécrétion.

Le lavage

Puisque le but est de réduire mon empreinte écologique, je ne fais pas une brassée de lavage supplémentaire uniquement pour mes mouchoirs. Sauf la première fois. J’ai fait un test afin d’apaiser une de mes craintes : avoir des crottes de nez sur les autres items que je laverais avec mes mouchoirs.

La première fois, j’ai lavé un linge à vaisselle blanc avec mes mouchoirs sales dans le but de l’inspecter à la fin. Comme conseillé, j’ai utilisé mon savon habituel dans ma laveuse, mais avec de l’eau chaude pour diluer le mucus. Puis, j’ai mis le tout à la sécheuse. L’expérience a été concluante : aucune crotte de nez n’est restée collée sur le linge à vaisselle ou les mouchoirs eux-mêmes.

Si, comme moi, vous préférez utiliser de l’eau froide et laver les mouchoirs avec des vêtements pour des raisons pratiques, on conseille de les rincer dans l’eau chaude avant de les mettre dans la laveuse. C’est à votre discrétion… Au fil des expériences, on devient plus audacieux.

«Je me suis rendu compte que tous les moyens sont bons. Reste à être confortable avec la routine qu’on veut prendre», partage Marie-Ève qui utilise le même ensemble de mouchoirs depuis 2017.

D’ailleurs, elle n’a pas encore trouvé la limite de vie de son produit. Si quelqu’un désire s’en départir, ce serait probablement pour des raisons esthétiques. À ce moment, ces mouchoirs faits à 100% de fibres naturelles peuvent être envoyés au compost.

Les barrières psychologiques

«Les as-tu essayés après l’amour?» me demande Marie-Ève.

Sur son site Web, Bateau bateau suggère d’utiliser les mouchoirs lavables après avoir fait l’amour.

«J’avais un blocage à utiliser mes mouchoirs pour le nez dans la chambre, partage Marie-Ève. Alors, j’ai décidé d’en prendre des noirs pour la chambre à coucher. Comme ça, je savais que les mouchoirs noirs, c’était pour ça, et les blancs pour le visage.»

Aujourd’hui, confiante en sa technique de lavage, elle ne sépare plus les blancs et les noirs aussi minutieusement et dépasse tranquillement son blocage initial.

Surmonter mes propres barrières psychologiques entourant l’utilisation — et surtout le lavage — de mouchoirs réutilisables a été beaucoup plus rapide que je le pensais.

La pochette de transport permet de ranger hygiéniquement ses mouchoirs sales.

La pochette de transport proposée par Bateau bateau a été encore plus facile à adopter puisqu’elle répond à un besoin supplémentaire que celui de réduire mes déchets. Elle offre une manière hygiénique de traîner les mouchoirs sales quand on est à l’extérieur. C’est beaucoup mieux que de les mettre dans le fond d’une poche ou d’une sacoche!

Transparente, Marie-Ève admet qu’elle n’a pas totalement réinventé la roue. On utilisait des mouchoirs en tissus bien avant les mouchoirs en papier jetables. Quand les mouchoirs en papier sont arrivés sur le marché, on nous a convaincus que c’était plus hygiénique qu’un mouchoir en tissu parce qu’on pouvait le jeter sur le coup, raconte Marie-Ève. Avec Bateau bateau, elle a surtout trouvé une manière d’adapter les mouchoirs lavables et leur utilisation aux exigences et au mode de vie actuels.

La propriétaire de Bateau bateau Marie-Ève Lupien.

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Refuser ou remplacer : bingo!

Sur le blogue de Bateau bateau, Marie-Ève a partagé un Bingo écolo qu’elle a créé afin de permettre aux gens de constater de manière ludique où ils en sont dans leur virage zéro déchet. La carte de bingo présente différents items de la vie courante qu’on est invité à remplacer par leur version durable ou à refuser. Une fois que cela est fait, on marque d’une croix la case concernée et ainsi de suite jusqu’à l’obtention d’un bingo ou, mieux encore, d’une carte pleine!

N'hésitez pas à enregistrer cette image pour jouer au Bingo!