Agence Spatiale: former l’espace, déformer le temps

Les trois associés d’Agence Spatiale, Yannick Badeau, Marianne Charbonneau et Étienne Bernier, dans leur bureau de la rue Saint-Jean.

UNE BOÎTE ET SES PROJETS / Dix ans après sa fondation, la firme Étienne Bernier Architecture adopte un nouveau nom qui colle davantage à l’éventail de son offre. Place à Agence Spatiale!


«Le nom Étienne Bernier Architecture, ça nous décrivait moins… Cette année et l’an dernier, on a gagné des prix Best of Canada pour le design intérieur de restaurants et bars. Les gens ne savaient même pas qu’on faisait du design d’intérieur! On voulait mettre ça clair et choisir un nom vraiment cool avant que quelqu’un d’autre le fasse!» souligne l’architecte Étienne Bernier, sourire en coin, en précisant que son entreprise s’est assurée d’avoir le droit de se renommer Agence Spatiale. À ne pas confondre avec l’Agence spatiale canadienne, bien évidemment!

«L’idée de base, c’était d’avoir un nom qui regroupe un peu tout le monde. On veut parler d’espace, pas en référence aux planètes, mais en même temps on trouvait le clin d’œil assez drôle», indique l’architecte Marianne Charbonneau, maintenant associée au sein d’Agence Spatiale après avoir travaillé plusieurs années auprès d’Étienne Bernier, qui est aussi son conjoint.

«On réfléchit à l’espace, qui englobe beaucoup de choses : pas que l’architecture, mais aussi l’art, le design de mobilier… On touche même à l’image de marque assez fréquemment. On voulait ramener ça de l’avant», mentionne Mme Charbonneau. 

Si l’architecte a un impact sur l’espace qu’il conçoit, il en a aussi sur le temps que les gens vont passer dans un lieu : «Quand on va dans un restaurant, il y a des endroits où on a envie de passer beaucoup de temps, et d’autres d’où on part assez rapidement. Chez soi, on peut passer un bon ou un moins bon moment, ça peut être juste à cause d’un éclairage désagréable. On forme et déforme le temps, comment les gens vont passer de bons moments ensemble, c’est un aspect important», ajoute Marianne Charbonneau.

Selon Étienne Bernier, le concept d’agence qui aborde un projet selon différents angles démarque beaucoup l’Agence Spatiale des autres firmes d’architecture, qui n’ont généralement «pas autant de tentacules». L’entreprise intégrait déjà diverses disciplines à ses projets — qu’ils soient commerciaux, institutionnels, résidentiels et même artistiques —, mais la nouvelle identité vient redéfinir sa mission. «Dans notre choix de nom, c’est quand même une volonté de se positionner comme une agence d’idéation», souligne l’architecte, qui a remporté en 2021 le prix de la relève en architecture décerné par l’Ordre des architectes du Québec.

Le plaisir

Y a-t-il une signature particulière qui distingue les projets de l’Agence Spatiale? À cette question, Étienne Bernier «passe la puck» à son nouvel associé Yannick Badeau, qui œuvre à ses côtés depuis la réalisation de son stage en 2015 : «Je pense qu’on essaie de se détacher d’avoir une signature et de répéter un projet unique, de faire en sorte que les gens nous reconnaissent toujours. On essaie de changer, d’innover à chaque projet, de pousser l’architecture et le design plus loin, de se réinventer.»



Le bureau lumineux d’Agence Spatiale, rue Saint-Jean, où on a conservé le cachet du lieu : mur de brique, vitrines, colonnes et vieux calorifères circulaires.

M. Bernier ajoute que sans avoir de signature unique, il y a cependant un fil conducteur dans tous leurs projets : le plaisir. «On essaie de se mettre à la place d’un enfant : est-ce que c’est wow, est-ce qu’on est émerveillé, est-ce que c’est l’fun? Le plaisir fait partie de notre travail. Quand on regarde un projet et qu’on le trouve plate, on va l’arrêter, le remettre en question.»

En orbite

Si la pandémie a frappé durement plusieurs entreprises, elle n’a pas freiné la croissance d’Agence Spatiale, bien au contraire. «Les projets de construction ont augmenté. Le bureau d’Étienne s’était déjà positionné comme un bureau qui fait de tout — résidentiel, commercial, restauration, industriel — je pense que ça nous a beaucoup aidés parce qu’on a connu une croissance dans chacun de ces créneaux», signale l’architecte Yannick Badeau. 

L’Agence a notamment réalisé plusieurs chalets dans diverses régions du Québec dans les dernières années, allant de la luxueuse résidence secondaire au petit chalet ouvert sur la nature.

Parmi les projets marquants, certains n’aboutissent pas, mais demeurent une grande source de satisfaction. «On a fait le concours d’architecture pour la bibliothèque de Marieville. On ne l’a pas remporté, mais on a été finaliste. C’est quelque chose qui augmente notre pratique. On veut faire des concours parce que ce sont des moments où on peut cristalliser une vision un peu plus audacieuse qui challenge les paradigmes et les manières de faire habituelles. C’est là où on excelle, où on a du plaisir, et l’équipe est super motivée», indique Étienne Bernier.

Ayant pignon sur la rue Saint-Jean depuis environ un an et demi, Agence Spatiale compte aujourd’hui 24 employés — architectes, designers intérieurs, technologues, artistes 3D, stratèges de marque, designers graphiques, designers industriels.

Parmi les nombreux projets en cours, M. Bernier signale que des lignes de mobilier sont en préparation et «devraient sortir en 2022 si tout va bien». Ayant déjà réalisé des installations artistiques, l’Agence Spatiale prendra même part à la prochaine mouture du spectacle déambulatoire Où tu vas quand tu dors en marchant? révèle l’architecte.

Info : agencespatiale.ca

Les trois associés d’Agence Spatiale, Marianne Charbonneau, Étienne Bernier et Yannick Badeau, dans leur bureau de la rue Saint-Jean.

+

TROIS PROJETS

Parmi les nombreux projets réalisés par Agence Spatiale (Étienne Bernier Architecture) au cours des deux dernières années, signalons notamment le Studio Telus du Grand Théâtre de Québec, le design et l’agrandissement du lobby de l’Hôtel Château Laurier (tous deux lauréats d’un prix Best of Canada remis par le magazine Canadian Interiors) ou encore le nouveau restaurant Sushi X de la Pyramide. Coup d’œil ici sur trois autres projets marquants.

BŌ Cuisine d’Asie

Niché au rez-de-chaussée du théâtre Le Diamant, le restaurant asiatique BŌ Cuisine d’Asie fait tourner les têtes depuis son ouverture au printemps dernier. Le projet a d’ailleurs remporté l’or aux Grands Prix du Design et un prix Best of Canada à la fin de 2021. L’endroit mise sur un design aux courbes vaporeuses, où de grandes voiles sont suspendues au plafond. «L’idée est d’avoir une ambiance enveloppante toujours en mouvement qui invite à regarder autour de soi», indiquait l’architecte Marianne Charbonneau au Mag en mai dernier. La richesse du bois, du bleu foncé et de la dorure contrastent avec les voiles blanchâtres. 

École Marguerite-d’Youville, Lab-École Saguenay

«Parmi nos projets marquants, le concours Lab-École a été une super expérience», confie l’architecte Étienne Bernier. Sa firme a été sélectionnée, en consortium avec APPAREIL Architecture et BGLA Architecture, pour réaliser le Lab-École de Saguenay, sur le terrain de l’ancienne école Marguerite-d’Youville à Chicoutimi. Actuellement en chantier, cette nouvelle école primaire doit être complétée l’été prochain. Le bâtiment qui comportera 15 classes est scindé en «maisonnettes», qui s’organisent autour d’une cour extérieure, unies par des circulations vitrées. L’objectif est de créer une école «accueillante comme une maison». Le projet a remporté en 2021 un prix international AZ Awards décerné par le magazine Azure dans la catégorie «Concept - Projets non construits». 



Résidence Les Pavillons du Lac

Cette résidence privée aux abords du lac Saint-Joseph est en cours de réalisation. «La décomposition de la résidence en pavillons permet une intégration passive sur le terrain pentu et des brèches sur le paysage», indique l’architecte Yannick Badeau, derrière la conception. «Ça donne l’impression d’un petit village», ajoute Étienne Bernier. La demeure de quelque 9400 pi2 répartis sur trois niveaux sera normalement livrée d’ici la fin de l’année ou au début de 2023. Les matériaux privilégiés sont des lambris de bois (teintes naturelles et opaques), des panneaux d’aluminium et de la pierre naturelle.

+

D'autres projets d'Étienne Bernier Architecture à (re)voir