Le Soleil a rejoint Diane Obomsawin à la place éphémère François-Duchesne afin de discuter des nouvelles œuvres installées sur l’artère commerciale. Si elle a tout d’abord été frappée par la couleur vive de ses créations, la bédéiste et cinéaste confie avoir eu pendant quelques instants un œil critique sur son travail. Mais l’attachement qu’elle ressent envers ses personnages a rapidement repris le dessus.
L’artiste, reconnue pour ses dessins souvent rigolos aux lignes simples et aux couleurs vives, s’est vue offrir trois options dans le cadre de ce projet. Alors qu’elle pouvait réutiliser des œuvres déjà conçues ou créer un tout nouveau concept, Diane Obomsawin a tout de suite été interpellée par l’opportunité de puiser dans les 30 000 photographies des collections du Musée national des beaux-arts du Québec (MNBAQ).
D’autres auraient pu figer devant l’ampleur des possibilités, mais l’illustratrice savait d’ores et déjà ce qu’elle cherchait : des gens. En action. Peu importe qu’ils soient en train de travailler ou assis devant leur maison.
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/TUSXEWMOFVH6BEIIFZKQK3UM3U.jpg)
Une fois la sélection d’images complétée, l’artiste visuelle s’est donc mise au boulot. «En mou et bien confinée», Diane Obomsawin a décidé de plonger et de mélanger son univers à celui des photos.
«Je me suis basée sur les archives pour créer une réponse entre elles et les dessins. Comme pour l’image des coiffeurs, j’ai ajouté à côté un personnage avec des cheveux complètement hirsutes. […] Je reprends aussi des éléments de la photo que je transpose en formes et en motifs», explique-t-elle.
Les passants dans le quartier Montcalm auront donc l’occasion d’observer les collages réalisés par Obom où photographies d’hommes et de femmes ayant vécu entre 1940 et 1970 côtoient formes géométriques et petits êtres comiques. Ceux qui s’arrêteront et lèveront les yeux au ciel remarqueront ainsi la pointe d’humour, mais aussi le sens tout nouveau que prennent les photos mariées aux dessins.
«Ce qui est très touchant, je trouve, c’est quand je découpe des personnages pris en photo pour les coller dans un tout autre contexte. Je m’attache à ces personnes. C’est incroyable parce que je me demande si cette femme, par exemple, qui marchait dans la rue dans les années 50 a pu soupçonner que son image serait réutilisée des années plus tard dans un cadre comme celui-ci», ajoute l’artiste, un sourire en coin, soulignant toute la tendresse qui se crée entre les deux univers.
Alors qu’on aurait pu croire l’exercice assez difficile, Diane Obomsawin insiste : il s’agit d’un des projets dans sa carrière où elle a vécu le moins d’embûches. «Le défi, c’était de marier les photos, mes dessins et l’abstrait géométrique. Mais ça a marché tout de suite! C’était une très belle surprise. […] En quelque sorte, c’était reposant. Tout allait de soi.»
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/PTFZHSOORVE2RPZUD354KTIOIU.jpg)
Un beau hasard pour l’artiste qui s’est également basée sur «la suite de Fibonacci» pour mettre sur pied des dessins équilibrés dans «des proportions idéales et agréables pour l’œil humain». Le principe mathématique, duquel elle ne s’était inspirée qu’une seule fois auparavant, s’est avéré tout à fait utile et «très naturel» dans son processus créatif.
Intemporels et non genrés
Diane Obomsawin laisse libre cours à l’imaginaire des passants en ce qui concerne l’interprétation de ses personnages. Si elle reconnaît un contraste marqué entre les images d’archives et ses dessins, l’artiste visuelle n’estime pas nécessairement avoir mis l’accent sur la frontière entre le passé et aujourd’hui.
«Je ne situe pas vraiment ce que je fais dans le présent. Je sais que j’en fais partie, mais je ne le sens pas tant que ça. Je ne crois pas que mon art soit contemporain. […] Je regarde des dessins d’animation des années 50 avec des personnages tout ronds et ça pourrait se ressembler [à ce que je fais]», affirme-t-elle.
Lorsque vient le temps de définir davantage ses créations, l’illustratrice souligne toutefois avoir volontairement mélangé des caractéristiques masculines et féminines sur un même personnage. Les questions d'identité sexuelle sont très contemporaines, admet-elle.
«C’est un passage obligé, mais j’ai hâte qu’on en finisse. […] J’apprécie qu’on sorte des sentiers battus du genre, mais lorsque c'est de tous les genres», souligne celle qui se tanne rapidement des multiples étiquettes que la société appose à la va-vite sur tout individu.
:quality(95)/cloudfront-us-east-1.images.arcpublishing.com/lescoopsdelinformation/35LR4JHPGFERZGNDLGMH3BSFSM.jpg)