La santé comme «fondation» au Parti conservateur du Québec, dévoile Éric Duhaime

Le chef du Parti conservateur du Québec, Éric Duhaime

Quand les membres du Parti conservateur du Québec l’ont élu chef, Éric Duhaime leur a promis de faire d’une approche sanitaire «beaucoup plus ciblée, moins restrictive et plus respectueuse des droits et libertés» sa priorité. Il comptait aussi s’attarder à une réforme «en profondeur» du système de santé. Ce sont les «fondements» de la proposition en matière de santé qu’il présente aujourd’hui.


À moins de trois semaines de son congrès et en pleine année préélectorale, le Parti conservateur du Québec (PCQ) dévoile ses orientations en santé. Dans un document d’une dizaine de pages, il étale ce qu’un gouvernement du PCQ s’engage à réaliser, en phase avec sa vision d’un système de santé québécois «décentralisé où il y a de la concurrence». 

«C’est clair pour nous qu’on est en train de dire : voici où on va camper dans la prochaine campagne électorale», affirme Éric Duhaime, en entrevue avec Le Soleil.  

Sans oublier l’économie, l’éducation, la langue, la culture, l’identité, le transport et l’environnement, le thème de la santé est «de loin» celui qui occupera le plus de temps la réunion avec les congressistes. 

«Ça fait deux ans que le Québec a des mesures sanitaires abusives en raison du fait qu’il faut sauver le système de santé, alors que le système de santé est supposé être là pour sauver les Québécois», dénonce-t-il, plaidant que la pandémie n’a fait que «mettre en lumière les failles du modèle québécois».  

«Le système était déjà inefficace avant l’arrivée de la COVID et on pense qu’il faut le corriger même quand la COVID va être partie. C’est un peu ça notre fondation», répète-t-il. 

Élu par un fort 96 % des voix en avril dernier, celui qui est depuis chef de la formation politique de droite se faisait déjà critique, avant même la course à la chefferie, des règles imposées en ces temps de pandémie de la COVID-19. Il n’a d’ailleurs pas hésité à qualifier la stratégie du gouvernement Legault d’«extrémisme sanitaire».  

Peu étonnant, donc, que la première de ses cinq résolutions porte sur l’amendement de la Loi sur la santé publique. Il en avait fait son engagement pendant la course à la direction du parti. Il avait dit que son premier projet de loi viserait à faire cesser le renouvellement par décret de l’état d’urgence sanitaire, projet de loi qu’il a déposé avec sa députée Claire Samson. 

«Pour que la démocratie ne soit pas remise sur pause pendant deux ans, pour ne pas qu’un homme seul puisse diriger le Québec sans consulter personne, pour ne pas qu’on vive des confinements sans données scientifiques. Pour nos militants, c’est hyper important avec ce qu’on vient de vivre depuis 19 mois», résume-t-il. 

Ainsi, le PCQ propose que toute prolongation de l’état d’urgence sanitaire soit voté secrètement à au moins 80 % des députés de l’Assemblée nationale, de même que toutes les mesures décrétées en vertu de cette loi. 

Des propositions «historiques» 

Pour soigner un système de santé malade comme il le décrit, le parti dirigé par Éric Duhaime mise principalement sur la concurrence et la contribution du privé, loin de la vision du premier ministre Legault qu’il a d’ailleurs déjà critiqué comme étant un «ardent défenseur du monopole public». 

Ce qu’il propose n’est certes pas «révolutionnaire» de son propre aveu - beaucoup de positions historiques se retrouvaient dans le programme de l’Action démocratique du Québec (ADQ) - mais «c’est encore plus nécessaire aujourd’hui que ça l’était à l’époque où on l’a adopté à l’ADQ», juge-t-il. 

Il ouvre donc grande la porte à une contribution du privé en santé non seulement pour «encourager l’entrepreneuriat» et pour «réduire l’intervention de l’État dans la vie des Québécois», mais surtout pour que ces derniers aient accès à des services médicaux dans un «délai raisonnable». Cette proposition, précise-t-il, est justifiée par l’arrêt Chaoulli de la Cour Suprême du Canada qui stipule que «les Québécois devraient avoir la possibilité de souscrire à une assurance privée s’ils n’obtiennent pas des soins de santé dans un délai raisonnable au public». L’assurance-maladie pourrait ainsi défrayer les coûts de services privés que le système public n’est pas en mesure de fournir rapidement. 
 

Voulant que le patient devienne une source de revenus pour les hôpitaux, le PCQ s’engage à instaurer le concept d’hôpitaux «magnétiques», pour financer les établissements en fonction des services rendus, selon le nombre de patients soignés, leur degré de vulnérabilité, la nature des soins donnés et leur qualité. À l’instar de ce qui se fait dans plusieurs pays européens, «une saine compétition s'instaurerait à travers les hôpitaux pour soigner plus de patients», vise-t-on, et les entrepreneurs privés pourront y «additionner leurs compétences» dans le marché. 

Pour les aînés, en s’inspirant de ce qui se fait aux Pays-Bas, au Japon, en Corée du Sud et en Allemagne, le PCQ souhaiterait instaurer une assurance vieillesse, à l’image de ces pays où l’on a implanté une assurance universelle de soins de longue durée pour toute personne de plus de 65 ans, avec la possibilité d’y souscrire dès l’âge de 40 ans. 

En plein débat entourant les médecins de famille, le PCQ souligne aussi qu’il viserait à bonifier de 2000 à 3000 le nombre de médecins dans la province au cours des prochaines années en augmentant les admissions en médecine et les postes de formation en résidence. 

«Pour augmenter l’offre de services médicaux tout en respectant l’évolution de la profession vers des charges de travail et des horaires plus humains, favorisant une prise en charge de qualité, et favorisant l’attrait et la rétention de la relève, il serait préférable d’avoir un plus grand nombre de médecins au Québec, plutôt que d’exiger davantage de travail du même nombre de médecins», est-il écrit dans la proposition du parti. 

Toutes ces orientations seront discutées avec les membres du Parti conservateur du Québec lors du congrès qui se tiendra les 20 et 21 novembre. Au cours des derniers mois, ils sont passés de 500 à 37 000, d’après le chef Éric Duhaime. 

Fort de cet appui, celui pour qui l’arène politique n’est pas étrangère est prêt à mener sa première campagne en tant que dirigeant d’un parti, en vue des élections d’octobre 2022. Toujours avec la santé comme cheval de bataille. 

«Avec ce qu’on a vécu depuis deux ans, j’ai l’impression que le système de santé ça a tellement préoccupé de monde […] On n’a pas le choix, il faut faire quelque chose, on ne peut pas laisser le système dans l’état qu’il est actuellement», termine-t-il.