Touki Toussaint, un profil pas ordinaire

Touki Toussaint des Braves a un père qui a déjà été candidat à la présidence d’Haïti et une sœur chanteuse.

Je n’irai pas jusqu’à dire que Touki Toussaint est le joueur le plus intéressant des ligues majeures. Cependant, le lanceur des Braves d’Atlanta a un profil pas banal du tout. Quel autre joueur des majeures peut dire qu’il a un père qui a déjà été candidat à la présidence de son pays et une sœur chanteuse ?


Né en Floride d’une mère kényane et d’un père haïtien, Dany Gilbert Kiti Toussaint, alias «Touki» (un surnom qui est en fait l’abréviation des noms de ses deux parents), vient en effet d’une famille aux racines politiques profondes. J’en ai discuté avec sa mère, Kahaso Kiti, qui réside en Floride.

«Mon père était ambassadeur, donc moi-même j’ai toujours baigné dans la politique. Quant au père de Touki, lui aussi prénommé Dany, il a été sénateur en Haïti et il a aussi été candidat à l’élection présidentielle de 2006», explique celle qui suit de près la carrière de son fils.

Le major Dany Toussaint, décédé le 15 septembre à sa résidence de Port-au-Prince, avait aussi été militaire dans l’armée de son pays, chef de la police d’Haïti et garde du corps de l’ancien président Jean-Bertrand Aristide avant de tenter sa chance à son tour en 2006 comme chef du Mouvement démocratique et réformiste haïtien (MODEREH), terminant quinzième sur 35 candidats lors des présidentielles remportées par René Préval.

Touki Toussaint a aussi baigné dans le sport depuis son plus jeune âge, à Haïti jusqu’à l’âge de 7 ans, ensuite aux États-Unis où sa famille a déménagé de nouveau. 

«Comme la plupart des jeunes d’Haïti, il a commencé par jouer au soccer et il a continué quand nous sommes déménagés en Floride. Dans sa ligue, il était l’un des meilleurs. Je me souviens qu’il avait marqué un but à partir du milieu du terrain !», indique sa mère, tout aussi fière de son fils que de sa fille Garielle Kiti, une chanteuse qui a participé aux auditions des émissions télévisées The Voice et America’s Got Talent.

C’est parce qu’un de ses amis proches jouait au baseball que Touki s’est aussi mis à ce sport. «Ils ne se voyaient jamais, car ils pratiquaient des sports différents, alors les deux se sont mis à pratiquer les deux sports», poursuit Mme Kiti, indiquant que son fils jouait au départ à l’arrêt-court, au champ extérieur et parfois comme receveur.

Trop souvent retiré

«Au départ, Touki n’aimait pas du tout le baseball, car il se faisait trop retirer au bâton ! Alors il est retourné au soccer, puis il a décidé de retourner au baseball. C’est en dixième année qu’il est vraiment devenu un lanceur», explique sa mère. 

Le jeune athlète du Coral Springs Christian Academy qui était trop souvent retiré au bâton est donc passé au monticule et s’est mis à servir la même médecine aux autres. «En douzième année, quand il prenait part à des tournois, tout le monde n’arrêtait pas de dire qu’il était un bon lanceur. Mais c’est quand j’ai commencé à voir des dépisteurs autour de lui que j’ai compris qu’il irait dans les ligues majeures», explique-t-elle. 

L’instinct d’une maman se trompe rarement et Touki a effectivement été repêché par les Diamondbacks de l’Arizona avec la seizième sélection du repêchage de 2014 alors qu’il n’avait encore que 17 ans. Après une saison et demie dans l’organisation, il était échangé aux Braves avec Bronson Arroyo pour le joueur de champ intérieur Philip Gosselin.

«Il a été échangé le jour de son 18e anniversaire! Je m’en rappelle très bien, car nous célébrions en famille à la fois mon anniversaire et le sien puisque nous sommes nés à la même date. Il a reçu un appel lui disant qu’il était échangé. Je l’ai regardé et je lui ai demandé ce qui n’allait pas et il m’a dit : “Regarde ton téléphone...” Disons que c’était une journée assez intéressante !», illustre-t-elle.

La transaction aura finalement été pour le mieux puisque Touki s’est développé dans l’organisation des Braves. Il a fait ses débuts dans les majeures en 2018 après avoir brûlé les niveaux AA et AAA, où il avait retiré 163 frappeurs sur des prises en 136 manches. Depuis la fin juillet cette année, Touki montre une moyenne de points mérités de 4.50 avec 48 retraits sur des prises en 50 manches lancées. Il était devenu un habitué de la rotation des partants avant de retourner récemment dans l’enclos des releveurs.

Fier de ses origines

Mais au-delà du talent de son fils, une chose dont Mme Kiti est particulièrement fière est le fait qu’il ne cache pas ses racines haïtiennes. «Il comprend bien le français, qui est la première langue qu’il a apprise à Haïti, il parle très bien le créole et il parle de ses origines. Il y a un tas de joueurs des majeures, notamment des Dominicains comme Domingo German des Yankees de New York, qui ont des origines haïtiennes, mais ils hésitent toujours à en parler !», déplore-t-elle.

Touki Toussaint n’était pas retourné à Haïti depuis sa jeunesse avant la semaine dernière, pour aller rendre hommage à son père décédé. Mme Kiti avait pour sa part passé du temps sur l'île des Antilles après le tremblement de terre de 2010. « J’y suis allée pour aider, mais ça m’a vraiment arraché le cœur de voir tout ça. C’était dur de voir Haïti comme ça », avoue-t-elle.

Ce désir d’aider son prochain, Kahaso Kiti l’a aussi transmis à son fils. «C’est un jeune homme qui sourit tout le temps et qui est toujours prêt à aider. Il fait beaucoup de choses pour les jeunes joueurs de baseball en Floride. Il participe à des camps avec son coéquipier Lewis Brinson pour aider la relève. Chaque mois de décembre, il donne des vêtements et des chaussures aux sans-abri», conclut-elle.

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Le chiffre

  • 46

Le nombre de coups de circuit frappés cette saison par Salvador Perez, le receveur des Royals de Kansas City. Le Vénézuélien mène les majeures, à égalité avec Vladimir Guerrero Jr. des Blue Jays de Toronto, pour les longues balles. De plus, en claquant son 46e lundi, Perez a battu un record vieux de plus de 50 ans, celui de l’ancien receveur des Reds de Cincinnati Johnny Bench qui avait claqué 45 circuits en 1970, alors un sommet pour un joueur évoluant à cette position.

Le Grand Chelem

J’aime beaucoup parler de joueurs qui reviennent dans les majeures après plusieurs saisons dans les mineures ou les circuits indépendants. Cette semaine, nous avons un cas intéressant en Anthony Gose, un ancien voltigeur des Blue Jays de Toronto et des Tigers de Detroit. Après la saison 2016, Gose, qui n’avait jamais réussi à frapper suffisamment bien pour devenir un régulier dans les grandes ligues, s’est réinventé comme lanceur. Il a gravi les échelons un à un dans les organisations des Tigers, des Rangers du Texas et des Indians de Cleveland pour revenir dans les majeures et faire ses débuts comme releveur des Indians lundi. En une manche et deux tiers, Gose a permis un coup sûr, un but sur balles et un point en plus de retirer sur des prises le dangereux Salvador Perez (voir «le chiffre»). L’athlète de 31 ans a même poussé une balle à 100.8 milles à l’heure!

Le Golden Sombrero

Je n’apprendrai à personne que les Pirates de Pittsburgh ont eu une très mauvaise saison. Parmi les joueurs des Pirates, on peut dire que l’arrêt-court Kevin Newman est l’un de ceux qui ont le plus «contribué» à cette année à oublier. Non seulement Newman frappait .224 en date de mardi, mais sa moyenne de présence sur les buts n’était que de .261 et sa moyenne de puissance, un horrible .311. Selon Fangraphs, sa «moyenne de présence sur les buts pondérée» (WOBA), une statistique un peu compliquée et longue à calculer qui permet d’identifier les meilleurs (et les pires) frappeurs au niveau statistique, était de .248 mardi, de loin la pire des majeures. Depuis 20 ans, seul l’ancien des Orioles de Baltimore Chris Davis a fait pire avec une WOBA de .239 en 2018...