L’Immunoclip pour poursuivre le combat de sa fille Émilie

«Dans un monde idéal», l’Immunoclip agira aussi à titre de levier pour M. Sansfaçon. Il a d’autres promesses à honorer.

Émilie Sansfaçon s’est battue longtemps contre le cancer avant que la maladie ne l’emporte, en novembre. De son lit d’hôpital, elle livrait aussi un combat pour les droits des personnes fragilisées par la maladie. Une lutte que poursuit son père en sa mémoire avec l’Immunoclip, un logo qui identifie les personnes immunosupprimées et un appel à la solidarité pour les protéger.


Émilie, 31 ans, était hospitalisée aux soins palliatifs depuis octobre 2020. Le cancer colorectal de stade 4 avait pris le dessus. En pleine crise de la COVID-19 et déjà affaiblie par de difficiles traitements, elle craignait le virus, raconte son père, Louis Sansfaçon. 

«Elle m’a dit que la COVID lui faisait peur parce qu’elle était immunosupprimée et qu’elle était plus à risque que tout le monde», se souvient-il. Des conditions médicales préexistantes comme la sienne sont reconnues comme un facteur de risque de complications de la COVID-19 pouvant mener au décès, cite-t-il de l’Institut national de santé publique du Québec. 

Pourtant, rien ne permet ni à Émilie ni à quiconque d’être identifiés comme un grand malade, dont la force se voit diminuée par un système immunitaire affaibli ou par des conditions de comorbidité.

«Émilie disait ‘’il faut trouver un moyen qu’on se protège’’. Moi, j’ai pris un engagement de réaliser son souhait.»

C’est donc sur un lit d’hôpital et devant cette «constatation évidente», qu’est né le projet «I». Le fruit de réflexions du père et de sa fille.

Le projet «I»

C’est donc là, sur un lit d’hôpital et devant cette «constatation évidente», qu’est né le projet «I». Le fruit de réflexions du père et de sa fille. 

«Il fallait inventer un logo qui allait permettre d'identifier visuellement et rapidement les personnes immunosupprimées parmi les autres en raison de la fragilité de leur santé», explique M. Sansfaçon.

Et pourquoi pas se servir du masque comme support de présentation? «Il est là, sur notre nez», rapporte le papa en souvenir des propos de sa fille. 

Ensemble, ils ont travaillé à réaliser ce qu’ils ont appelé l’Immunoclip: une petite pince de plastique adaptable à tous les masques - éventuellement à d’autres tissus – et sur laquelle apparaît en rouge la lettre «I», comme un outil de prévention.  



Et pourquoi pas se servir du masque comme support de présentation?

«I», comme dans immunosupprimé, mais la forme représente aussi une personne. «Elle n’a pas de sexe, d’âge ou de nationalité, parce que n’importe qui peut être immunosupprimé», précise le papa. 

Jusqu'au 24 octobre, 10 jours avant sa mort, Émilie a contribué au développement du projet. Elle commentait les prototypes élaborés par son paternel et se permettait de lui suggérer de petits ajustements. Elle a même pu le porter fièrement, à peine quelques jours avant son décès.

Mais la mort d’Émilie ne sera pas vaine. Avec résilience et malgré le deuil, impensable pour Louis Sansfaçon d’abandonner le projet.

«Elle a même pu le porter fièrement, à peine quelques jours avant son décès.»

Par lui-même, à la maison, il l’a rendu tangible. Sur un petit carton représentant un masque, l’Immunoclip existe «pour Émilie», exprime-t-il fièrement.  

Et on peut y lire : «Je porte ce i pour vous demander d’être plus vigilants envers nous. S’il vous plaît, par solidarité, je vous demande de porter votre masque. Respectez la distanciation, car nous sommes plus fragiles que vous face aux différents virus. Vous sauverez des vies.» Signé, Émilie Sansfaçon. 

«Je voulais laisser une trace d’Émilie», exprime son père.

Solidarité

Il espère que cette trace saura se répandre et que l’Immunoclip protègera d’autres individus fragiles afin qu’ils ne se retrouvent pas à l’hôpital.

«Je ne suis pas un médecin, je réponds seulement à une situation que ma fille a vécue. Mais il va continuer à y avoir des gens malades et j’ai l’impression que ça peut nous inciter à être plus à l’écoute de l’autre, surtout celui qui est malade», croit-il.

Il mise sur une «attitude sociale préventive» et la «solidarité» pour que le projet fonctionne. «Mais je ne peux pas l’imposer, il faut qu’il y ait une volonté d’aider l’autre. L’autre, c’est sûrement quelqu’un qu’on connaît et qu’on aime. Alors si on l’aime, faisons un petit bout pour lui.»

«Dans un monde idéal», l’Immunoclip agira aussi à titre de levier pour M. Sansfaçon. Il a d’autres promesses à honorer. 

L’accompagnement de sa fille lors de son séjour en soins palliatifs lui a fait promettre d’améliorer la qualité des chambres de cette unité. «La chambre – et pourquoi pas les chambres - Émilie Sansfaçon», pourraient permettre un départ humain et respectueux pour la famille.

Avec résilience et malgré le deuil, impensable pour Louis Sansfaçon d’abandonner le projet.

«Ma priorité c’est de créer un environnement de qualité pour la personne qui va être dans le même lit que ma fille», rêve-t-il.

À LIRE AUSSI : La touchante lettre En mémoire d’Émilie rédigée par Louis Sansfaçon 

Si la vente de l’Immunoclip génère des profits, il entend aussi suivre la volonté d’Émilie de verser des fonds pour la prévention du cancer colorectal et du myélome multiple.

«Je souhaite que les entreprises s’impliquent socialement, elles ont certainement des gens en situation d’immunosuppression parmi leur personnel ou parmi leurs clients. Les hôpitaux et les fondations pourraient se mobiliser, c’est là que se retrouve la clientèle concernée.»

Déjà, la Fondation québécoise du cancer a partagé à Louis Sansfaçon son appui. La vice-première ministre Geneviève Guilbault lui a accordé un moment virtuel pour entendre sa proposition. «Elle est disposée à l’appuyer», salue-t-il, mais le gouvernement n’a pas signifié d’intention de s’en procurer. 

«Je demande au gouvernement d’y réfléchir pour participer à la réduction de la clientèle qui va se retrouver dans des endroits de soins.»

«Je ne compte pas défoncer de portes, simplement les inciter à s’ouvrir», prévoit-il.

«Mais je vais aller le plus loin possible, je l’ai promis à Émilie.»

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L’AUTRE COMBAT DE L’ASSURANCE-EMPLOI

L’histoire d’Émilie a déjà été médiatisée par le passé, alors que la jeune mère de famille se battait pour que les gens vulnérables, comme elle, bénéficient d’une bonification du régime d’assurance-emploi en cas de maladie. 

La femme de 31 ans dénonçait n’avoir accès qu’à 15 semaines de prestations et réclamait une prolongation à 50 semaines. Elle avait même rencontré le premier ministre Justin Trudeau en décembre 2019 pour l’interpeler à se pencher sur une réforme de cette mesure inchangée depuis son entrée en vigueur, en 1971. Elle était accompagnée de Marie-Hélène Dubé, une survivante du cancer et l’instigatrice de la pétition 15semaines.ca qui a vu le jour en 2009.

Dans une lettre publiée dans les pages du Soleil il y a quelques jours, le père d’Émilie, Louis Sansfaçon, regrette que les promesses engagées par les libéraux lors de cette discussion n’aient toujours pas été honorées. 

«Émilie s’est endormie dans son dernier lit à l’hôpital Hôtel-Dieu de Québec le 5 novembre… sans réponse, sans engagement, déçue. Elle avait signé la pétition», écrivait-il.

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Le Bloc québécois a déposé en février dernier le projet de loi baptisé Émilie Sansfaçon, pour l’extension de 15 à 50 semaines des prestations d’assurance-emploi maladie. «Ça va bouger», lance en toute confiance le père d’Émilie, estimant que cette dernière devait penser davantage «à ses factures qu’à sa santé». 

C’est là un autre combat qu’il entend mener au nom de sa fille. «Elle m’a demandé de poursuivre. C’est ce que je fais.»

Pour plus d’informations et pour joindre Louis Sansfaçon. Aussi, l'adresse courriel info@immunoclip.com sera en fonction dès le lundi 22 mars.