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LES ÉMONDEURS TRAVAILLENT POUR QUI?

Une lectrice du Soleil inquiète nous a recommandé de regarder en direction de ce boisé entourant l’édifice de Revenu Québec de la rue de Marly. Des émondeurs sont au travail, nous a-t-elle écrit. Et leur tâche semble colossale, puisque de très nombreux arbres portent des marques de peinture orangée, signe qu’ils seront tronçonnés. L’amie du Soleil craint que le parc urbain soit irrémédiablement charcuté, craint que la faune en pâtisse.

Nous les avons cherchés pendant un bout de temps, les émondeurs. Et cherché pour qui ils travaillent.

Hydro-Québec?

Nous avons d’abord songé qu’ils bossent peut-être pour Hydro-Québec. La société d’État coupe-t-elle les arbres du secteur pour libérer son câblage?

Nous avons demandé à Marc-Antoine Ruest, conseiller communications et collectivités. «On a effectué des travaux d’élagage», confirme-t-il. Mais c’était l’an dernier, seulement derrière les maisons de la rue Louis-Francoeur.

Mauvaise piste, donc.

La Ville?

À moins que les travaux soient effectués par la Ville de Québec? Oui! nous a confirmé le chef d’équipe aux communications, David O’Brien. Il n’était toutefois pas habilité à nous donner des détails sur le chantier puisque le boisé de Marly appartient à quelqu’un d’autre…

DU BOIS SAIN

Ne reculant devant rien (!), le journaliste a voyagé jusqu’à l’extrémité ouest de Sainte-Foy avec l’espoir que les émondeurs à l’ouvrage seraient plus loquaces. Nous les avons finalement trouvés en suivant une nouvelle piste que venait de nous transmettre notre lectrice-informatrice.

C’est dans un stationnement en retrait, dans le bois près de Revenu Québec, qu’ils ont installé leur camp. Dans un coin, il y avait des billots de bonne dimension. De bois sain, fraîchement coupé.

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Un ouvrier sortant d’un camion a convenu avec nous que l’ampleur du chantier peut surprendre. Mais nous a expliqué que l’agrile du frêne, insecte coléoptère ravageur, marche sur Québec et qu’il faut combattre.

Une des façons de le ralentir, c’est de lui couper l’arbre sous le pied. Sinon, la capitale ressemblera vite à Gatineau où des boisés complets ont été rasés. Au moins, a conclu l’homme avant de retourner à sa tâche, le bon bois sera récupéré pour faire des planchers et du carton.

LA VILLE SOUS-TRAITANTE

«Dans le boisé de Marly, le plan d’action consiste à retirer les 830 frênes qui ne se qualifient pas pour l’injection avec l’insecticide TreeAzin. Cela permettra de sécuriser les aménagements du boisé (sentiers) et les propriétés privées voisines contre d’éventuelles chutes de branches ou de troncs de frênes attaqués par l’agrile.»

Celui qui nous fournit les détails de l’entreprise de coupe en cours à Sainte-Foy, c’est Stéphane Desmeules. Il est coordonnateur aux communications et à la promotion de la Commission de la capitale nationale du Québec.

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Pourquoi est-ce le porte-parole de la CCNQ qui répond aux questions? Pour faire court : le boisé de Marly appartient au ministère de l’Environnement qui l’a créée dans les années 1980 pour protéger… l’ail des bois [vous comprendrez en parcourant les capsules explicatives, un peu plus bas]. Le gouvernement a cependant confié la gestion du site à la CCNQ en 2003.

Donc, M. Desmeules nous explique que certains frênes sont soignés avec du TreeAzin afin de repousser l’agrile du frêne. Mais qu’on a choisi d’en abattre d’autres. La CCNQ n’ayant pas d’expertise en la matière, elle a sous-traité le mandat à la Ville de Québec où «une équipe en foresterie urbaine […] travaille sur le dossier de l’agrile depuis plus de 10 ans».

Au boisé de Marly, les travaux ont débuté l’automne dernier et dureront un an.

«L’échéancier se détaille de la façon suivante:

Automne 2020: retrait de 230 frênes;
Hiver 2021: retrait de 450 frênes;
Automne 2021: retrait de 150 frênes.»

Plantation

Stéphane Desmeules fait valoir que de nouveaux végétaux seront plantés une fois les tronçonneuses rassasiées. «Une première plantation de remplacement d’arbres de naturalisation sera faite dès l’automne 2021 dans le boisé Marly. Le complément sera fait au printemps 2022, lorsque tous les retraits auront été complétés, ce qui impliquera 700 arbres et arbustes de remplacement au total. Les travaux de plantation permettront de reconstituer rapidement et de maintenir les effets bénéfiques de la canopée sur la qualité de vie des usagers et du voisinage.»

SAUVER L’AIL DES BOIS

«Le boisé de Marly et le boisé des Compagnons-de-Cartier constituent les derniers vestiges d’un espace boisé qui occupait autrefois la quasi-totalité de la Pointe-de-Sainte-Foy (environ 250 hectares) et qui s’est effrité au fil des ans pour laisser place à l’urbanisation», note la CCNQ sur le Web.

«En péril dans les années 1980, le boisé de Marly doit sa sauvegarde à la mobilisation de citoyens et à l’intervention du ministère de l’Environnement», raconte l’Association forestière des deux rives. […] Ce boisé sert d’habitat à l’ail des bois, une espèce végétale menacée. C’est pourquoi il figure parmi les aires protégées du Québec.»

La Commission de toponymie ajoute : «En 1988, le ministère de l’Environnement lui a attribué une vocation de parc récréotouristique et de conservation afin de sauvegarder l’ail des bois. Érables à sucre, chênes rouges, frênes et hêtres sont quelques-unes des essences qui composent le boisé. On y retrouve aussi quelques spécimens de pin blancs.»

Une centaine d’espèces d’oiseaux le fréquentent, dont une trentaine y nichent.

«D’une superficie de 15,6 hectares, [le boisé de Marly] est délimité par le chemin des Quatre-Bourgeois, par la rue Louis-Francœur, par le chemin Saint-Louis et par la rue de Marly.»

COURSE CONTRE L’AGRILE

L’agrile du frêne ne peut pas être battu. La Ville de Québec en convient, mais ne baisse pas pavillon pour autant.

Sans combat, 100 % des frênes seront décimés en 15 ans. En déployant un programme de lutte, l’administration municipale espère additionner 15 ans de plus avant l’extinction de l’espèce sur son territoire.

Pour les détails, allez lire cet article : La Ville de Québec s’avoue vaincue devant l’agrile du frêne, mais continue le combat

POURQUOI «MARLY»?

Selon une fiche de la Commission de toponymie du Québec, Marly est «une ville où Louis XIV a signé, en 1711, deux arrêts établissant les bases du régime seigneurial en Nouvelle-France et fixant les droits à payer par les seigneurs et les censitaires. Cette dénomination évoque également Marly-le-Roi, chef-lieu de canton des Yvelines. Cet endroit abrite un château que le Roi-Soleil fit construire par Jules Hardouin-Mansart.»

UNE CARTE DES SENTIERS ET UN GUIDE

La carte des sentiers du boisé de Marly produite par la Commission de la capitale nationale du Québec est ici.

Le Centre d’enseignement et de recherche en foresterie (CERFO), affilié au cégep de Sainte-Foy diffuse, en outre, un guide d’interprétation.

POUR APPROFONDIR

Vous désirez poursuivre votre lecture au sujet des périls guettant les arbres de la capitale? Explorez notre dossier publié récemment : Comment va la forêt urbaine à Québec?. Vous y constaterez qu’il n’est vraiment pas simple de faire pousser des végétaux en ville.

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