Land : en territoire inconnu *** [VIDÉO]

Edee (Robin Wright) part se réfugier dans un lieu isolé du Wyoming dans <em>Land</em>.

CRITIQUE / Le tournage de Land, premier long métrage réalisé par Robin Wright, s’est déroulé juste avant la pandémie de COVID-19. Par une curieuse synchronicité, il s’attarde au destin d’une femme en confinement total dans une cabane en rond au cœur des montagnes. Une expérience transformatrice dans ce beau film, superbement interprété, mais à la trame et aux thèmes connus.


Le spectateur retrouve Edee Mathis (Wright) à un moment particulièrement douloureux de son existence — une tragédie aux circonstances inconnues. Un court retour en arrière avec sa sœur révèle que celle-ci craint pour sa vie…

Edee part se réfugier dans un lieu isolé du Wyoming (en réalité, les Rocheuses en Alberta). La citadine n’a pas le minimum pour survivre dans ce milieu sauvage et impitoyable, magnifiquement filmé et souvent superbement cadré. Miguel (Demián Bichir), un chasseur local, va découvrir la survivaliste débutante à deux doigts de la mort.

Une épreuve à laquelle, c’est écrit dans le ciel, l’ermite survit. Il ne s’agit d’ailleurs pas de l’enjeu du film, qui examine plutôt la relation particulière qui se développe entre les deux protagonistes. La femme blessée doit baisser ses défenses pour laisser ce bon samaritain lui offrir sa compassion.

Wright (Wonder Woman, Blade Runner 2049), qui joue le rôle principal et produit, aurait peut-être eu avantage à écrire aussi le scénario… Land démontre sans nul doute qu’elle a ce qu’il faut du côté cinématographique — la réalisation de quelques épisodes de House of Cards, où elle interprétait Claire Underwood, lui a permis de se faire la main.

Le contraste entre ce rôle, une arriviste froide et calculatrice, et celui d’Edee Mathis, une femme blessée au bord de la catastrophe, démontre l’étendue de sa palette d’actrice dans une interprétation qui demande beaucoup d’intériorité. Cette ermite volontaire doit exprimer ses émotions, sa détresse surtout, par le regard et son visage.

Même l’arrivée de Miguel, un taiseux qu’Edee surnomme Yoda, ne fait pas augmenter de façon significative les dialogues, réduits à leur plus simple expression. Ce dernier, et son chien, essaient de l’aider, sans insister, à reprendre goût à la vie.

Edee va trouver soutien et compréhension auprès de Miguel (Demián Bichir).

Land s’inscrit ici exactement à l’inverse de films comme Délivrance (John Boorman, 1972) ou La rivière sauvage (Curtis Hanson, 1994), où les locaux font figure de menace à l’existence même des citadins qui se sont aventurés sur leur territoire.

L’enrobage, en lumière naturelle et son ambiant, convient parfaitement à la période actuelle, tout comme le fait que le long métrage aborde les défis de la solitude et la résilience. De la mort aussi, qui rôde constamment autour des personnages.

On s’en doutera, la nature même du sujet impose un rythme lent, mais l’utilisation judicieuse des ellipses évite les redites et compresse le temps.

La révélation du «secret» d’Edee, à la fin, rassemble à un ballon dégonflé — le spectateur a depuis longtemps compris de quoi il retourne. Land n’apporte guère un éclairage différent sur sa thématique, souvent abordée au cinéma, au théâtre ou en littérature.

N’empêche. Il y a deux interprètes absolument magnifiques. On sait Robin Wright douée, mais le grand public connaît peut-être moins bien le talent de Demián Bichir, lui aussi un acteur hors pair, malgré sa nomination aux Oscars pour A Better Life (2011) et son rôle dans Les 8 Enragés de Tarantino. 

L’occasion est bonne.

Land est présenté au cinéma et en vidéo sur demande à compter du 5 mars.

(Focus Features)

Au générique

Cote : ***

Titre : Land

Genre : Drame

Réalisatrice : Robin Wright

Acteurs : Robin Wright, Demián Bichir

Durée : 1h29