Protection du patrimoine: Québec Solidaire suggère la création d’une Commission permanente

Le manoir Taschereau de Beauce a été détruit par un incendie criminel, alors qu'il était pas habité. 

Les bâtiments patrimoniaux continuent de se détériorer en silence partout dans la province. Pour Québec Solidaire, la création d’une Commission permanente sur la protection du patrimoine culturel devient la seule manière de «régler le problème à la source». 


Le projet de réforme de la Loi sur le patrimoine de la ministre Nathalie Roy n’a ni ambition ni vision, croit la députée solidaire Ruba Ghazal.

Dans les derniers jours, le Parti libéral et plusieurs groupes ont critiqué la réforme de la loi 69 : on insiste sur l’existence d’une instance indépendante pour défendre le patrimoine.

Le PLQ et QS ont entre autres réagi à la lettre de Serge Joyal et Phyllis Lambert, sénateur et fiduciaire émérite du Centre canadien d’architecture (CCA) et présidente fondatrice du CCA, parue dans Le Devoir la semaine dernière.

«Non seulement ce projet de loi ne réglera pas la cause fondamentale de la déchéance constante du patrimoine au Québec, mais que, d’une certaine manière, il contribuera à en rendre la protection encore plus difficile», écrivaient les deux intervenants.

Les deux partis se rangent derrière leurs propos. Ruba Gazhal précise que la loi 69 n’est pas «mauvaise», mais elle n’entrainera aucun changement majeur.

«On ne peut pas être contre le projet de loi, il manque juste d’ambition. Il va y avoir un inventaire, il va y avoir un nouveau règlement et un comité de démolition, la ministre sera davantage au courant de ce qui se passe. Il va y avoir des règlements que les villes vont devoir suivre pour l’entretien des bâtiments. Mais ça ne donne pas le pouvoir de dire "STOP"», explique la députée de Mercier, qui tient le flambeau de la culture en attendant le retour de Catherine Dorion au mois de mars.

La seule façon de freiner les démolitions est de laisser le sort des bâtiments patrimoniaux entre les mains d’une commission nationale, indépendante du gouvernement, martèle Ruba Ghazal.

Enjeux financiers durs à ignorer

Le plus gros problème avec le projet de loi proposé par la ministre de la Culture actuelle est qu’il manque de mesures contraignantes pour forcer les municipalités à protéger leur patrimoine bâti.

«Il y a un incitatif financier pour détruire plutôt que protéger. Les municipalités ne possèdent pas toujours les bonnes connaissances entourant le patrimoine. C’est dur de résister, personne ne veut augmenter les taxes des citoyens pour protéger une église. Oui, il y a un manque de ressources et de connaissances, mais c’est surtout qu’il n’y a aucun intérêt financier à protéger, tout est mis en place pour détruire», résume Mme Ghazal.

La députée compare la Commission permanente sur la protection du patrimoine culturel de Québec solidaire avec l’Office de la langue française.

«Quand on fait référence à la loi 101 et à la protection du français, je n’ose imaginer ce qui serait arrivé avec la langue, surtout à Montréal, s’il n’y avait pas l’Office pour la protéger», note Ruba Ghazal.

Ruba Ghazal, députée solidaire de Mercier

Le moment idéal pour agir

Québec Solidaire remarque un engouement pour la protection du patrimoine. Les événements récents entourant le manoir Taschereau de Beauce ou le presbytère de Saint-Michel-de-Bellechasse parlent d’eux-mêmes.

Les citoyens deviennent de plus en plus nombreux à défendre leur territoire, les enjeux prennent aussi plus de place dans les médias.

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«On réalise qu’on en a perdu beaucoup. Les joyaux sont nombreux à être détruits, et ils vont continuer l’être si on ne fait rien de concret. Il faut que ça cesse et ça ne peut pas cesser si ça reste entre les mains de la ministre et des municipalités.»

Ruba Ghazal insiste : les citoyens ne souhaitent pas voir disparaître d’autres pages de leur histoire ou de leur identité.

«Quand le gouvernement dit qu’il est nationaliste, une façon de le prouver est de protéger notre patrimoine de la bonne façon. S’il est sincère, il va montrer que le patrimoine a une valeur réelle.»

«Je pense que la question d’indépendance à quelque chose à voir là-dedans, il y a un regain. Les Québécois tiennent à leur identité. Qu’est-ce qu’on peut conserver de ce qu’on est? Comme l’engouement pour la langue française qu’on voit renaître, la protection du patrimoine va dans la même logique. On veut protéger qui nous sommes, on veut protéger notre histoire. Ces bâtiments-là parlent beaucoup», ajoute la députée solidaire.

Même si les partis d’opposition jugent que la ministre Nathalie Roy fait des pas timides en avant, le gouvernement balaie les reproches et maintient que le chantier se déroule pour le mieux.