Le droit de la famille sortira-t-il un jour des années 80?

Au Québec, le droit de la famille continue de traiter les couples mariés et non mariés de façon radicalement différente.

POINT DE VUE / Savez-vous à quand remonte la dernière grande réforme du droit de la famille au Québec?


1980.

Eh oui… En 1980, on est au temps des couleurs néon, des premiers CDs, des premiers cellulaires. On est à l’époque du premier référendum. On est avant la criminalisation du viol conjugal. Bref, la société a bien changé depuis!

Lors de la dernière campagne électorale provinciale, François Legault s’est engagé à réformer le droit de la famille, désuet selon tous/tes les experts/es du domaine. Depuis, le gouvernement a entamé des consultations et cet engagement est louable. Mais il est impératif que cette réforme mette fin aux inégalités entre les couples mariés et non mariés.

Le Québec à la traîne

Au Québec, le droit de la famille continue de traiter les couples mariés et non mariés de façon radicalement différente. Ainsi, un couple qui cohabite depuis 20 ans et qui a trois enfants est moins protégé qu’un couple marié depuis deux jours.

Les couples mariés bénéficient des mécanismes de la pension alimentaire, du partage du patrimoine familial, de la protection de la résidence familiale et de la prestation compensatoire. Pour les couples non mariés, rien de tel n’est offert: d’après le droit, ils ne forment apparemment pas une famille!

Pourtant, plus de 60% des enfants au Québec sont issus de couples non mariés. Notre province est celle ayant le plus haut taux de couples non mariés au Canada. Le nombre de mariages diminue d’année en année, mais, à en juger par l’absence de protections offertes aux couples non mariés, le Québec, lui, semble figé dans le temps.

Comment comprendre sinon que le Québec soit la seule province qui refuse de reconnaître les couples non mariés; la seule province à n’accorder aucune protection aux conjoint/es de fait vulnérables?

Il est grand temps que le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, mette fin à la vision archaïque du mariage comme seule forme d’union légitime. Il doit agir dès aujourd’hui pour protéger les femmes et les enfants vulnérables.

Des injustices envers les femmes et les enfants

Les règles mises en place pour gérer les conséquences économiques du divorce servent à protéger les enfants et les conjoint/es vulnérables. Or, ces mêmes vulnérabilités existent au sein des couples non mariés. Imaginons une femme non mariée qui cesse de travailler pour élever ses enfants. À la rupture, elle n’a droit à aucune protection: ni pension alimentaire, ni partage des revenus, ni protection de la résidence familiale.

Encore aujourd’hui, ce sont les femmes et les enfants qui souffrent le plus de l’absence de reconnaissance des couples non mariés. Malgré les avancées des dernières décennies, les femmes gagnent toujours moins d’argent que les hommes, s’occupent davantage des enfants et utilisent une plus grande part de leur salaire pour les dépenses courantes de la famille. Il est prouvé que lors d’une rupture, les hommes s’enrichissent et les femmes s’appauvrissent.

Le droit de la famille contribue à l’appauvrissement des femmes et des enfants: au Québec, le tiers des enfants vivant avec une mère monoparentale vivent dans la pauvreté.

Monsieur le Ministre, il y a urgence d’agir. Faites-nous sortir des années 80!